Le successeur de René Bouscatel à la tête de la LNR balaie l’actualité chargée du rugby en France : affaire du transfert de Jaminet, salary cap, déclarations de Sébastien Chabal, tournée des Bleus en Nouvelle-Zélande…
Les prochaines demi-finales du Top 14, qui auront lieu cette année à Lyon (vendredi 20 et samedi 21 juin), s’annoncent déjà comme un succès. Les quelques 120.000 places des deux matches ont été vendues depuis janvier. En seulement 12 jours. À l’occasion de la présentation de ce rendez-vous incontournable du rugby français, Yann Roubert, le nouveau président de la Ligue nationale de rugby, a balayé la riche actualité du ballon ovale en France. Et d’annoncer, pour la finale du Top 14 au Stade de France le 28 juin, un grand spectacle d’avant-match mis en scène par le danseur et chorégraphe Benjamin Millepied.
Cette année, les demi-finales du Top 14 auront lieu à Lyon. C’est un hasard ?
Yann Roubert : Effectivement, la décision date d’avant moi, donc je ne peux pas être taxé d’avoir été partial. Mais c’est un joli clin d’œil et je serai bien évidemment ravi de retrouver Lyon, cette ville que je connais bien et que j’aime.
Pour la finale au Stade de France, vous avez décidé d’organiser un spectacle d’avant-match chorégraphié par Benjamin Millepied…
Une finale, c’est toujours exceptionnel. Cette année, il y aura une cérémonie d’ouverture exceptionnelle avec Benjamin Millepied. Il trouve un certain esthétisme dans le rugby, donc il y aura deux spectacles. Certains pourront trouver le rugby un peu moins gracieux que la danse (sourire)… Mais ce sera une belle première au Stade de France de voir ce spectacle qui mêlera danse contemporaine et rugby. Les deux peuvent se mélanger et Benjamin va le prouver.
La LNR et le Stade Toulousain ont trouvé un accord. Donc maintenant cette affaire Jaminet est purgée, on peut regarder devant
Que retenez-vous de vos premiers jours à la tête de la Ligue ?
C’est parti fort, il n’y a pas de temps mort. Je ne pensais pas m’ennuyer et c’est le cas en arrivant. On a eu nos premiers bureaux, notre premier comité directeur. Avec, déjà, des décisions à prendre sur des principes pour préparer la saison prochaine, renforcer les sanctions contre le salary cap et puis beaucoup de choses passionnantes qui vont nous occuper pour les quatre ans à venir.
Le salary cap, c’est vraiment l’un de vos chantiers prioritaires…
Oui, c’est un garde-fou absolument essentiel à la fois pour la durabilité des modèles économiques de nos clubs et pour la compétitivité de nos championnats. Donc on y est très attachés. Il faut bien sûr le préserver et s’assurer que son contrôle soit le plus effectif possible et que les sanctions soient très dissuasives, bloquées à échéance s’il y a besoin.
Est-ce que l’affaire du transfert de Jaminet n’a pas jeté un trouble ? On a parlé des conditions de ce transfert, du salary cap, mais aussi de contrat d’image…
Cette affaire a été purgée en chambre de médiation. La LNR et le Stade Toulousain ont trouvé un accord. Donc maintenant cette affaire est purgée, on peut regarder devant. L’A2R (ex-DNACG) s’est saisie du dossier et fera ses diligences en toute indépendance parce que la LNR n’a plus à intervenir sur le sujet. Après, indépendamment de cette affaire, qui maintenant encore une fois est derrière nous, il est évident que le salary cap doit être préservé, renforcé et respecté.
Est-ce que les sanctions doivent aussi être renforcées ? On voit que les cas d’infraction se multiplient (Montpellier, Toulon, Toulouse)…
J’avoue que je suis partisan du fait que les sanctions soient renforcées et qu’elles puissent inclure des sanctions sportives pour les clubs éventuellement tricheurs, parce qu’on a tous un combat commun pour bannir la triche du rugby. Il n’y a aucun président de club qui ne sera pas d’accord avec ça. On va proposer au comité directeur des principes pour renforcer ces sanctions et les appliquer dès la saison prochaine.
On n’oublie pas d’apprendre à nos enfants à faire du vélo même s’il y a des chutes. Et on n’annule pas le Tour de France pour autant…
Les dernières déclarations de Sébastien Chabal ont fait grand bruit. Comment réagissez-vous à cela ?
Il faut évidemment être lucide sur le fait qu’on est un sport de contact. Rappeler qu’on essaye de prendre toutes les mesures possibles. Par rapport à l’époque où Sébastien jouait, les choses ont évolué parce que c’est un sujet mouvant. Donc il faut évoluer, se mettre toujours au mieux de ce que l’on peut faire pour éviter les risques parce que la santé des joueurs, c’est un enjeu évidemment absolument essentiel. Aujourd’hui, on a les protège-dents connectés, on a les médecins de match indépendants, on a les règles qui ont changé dans le rugby amateur, on a le carton bleu qui a été mis en place… Parce que ce combat est évidemment commun avec la Fédération, la Ligue, tous les clubs et tous les amoureux du rugby.
Emmanuel Eschalier et Yann Roubert, respectivement directeur général et président de la Ligue nationale de rugby.
Hugo Pfeiffer / Icon Sport
Est-ce qu’il faut aller encore plus loin ?
Il ne faut jamais s’arrêter parce qu’évidemment, chaque accident est un accident de trop et donc tant qu’il y en aura, il faudra qu’on fasse tout notre possible pour les limiter. Après, il ne faut pas oublier que le rugby est un sport merveilleux. Il faut rassurer les parents sur le fait que si chaque accident est un accident de trop, dans le vélo, on n’oublie pas d’apprendre à nos enfants à faire du vélo même s’il y a des chutes. Et on n’annule pas le Tour de France pour autant… Dans le rugby, faisons ce que l’on peut pour limiter le risque, sachant que ce risque zéro n’existe pas. N’oublions pas que pour un accident qui peut arriver au rugby, il y a des milliers de moments de partage qui se passent. Il faut éviter la peur généralisée, notamment du monde amateur. C’est important de rassurer les parents. Il faut à la fois être lucide et faire tout ce qui est en notre pouvoir pour limiter les soucis de commotion et les soucis physiques pour tous les joueurs de rugby.
Plusieurs internationaux dits «premium» ont émis le souhait d’aller disputer la prochaine tournée du XV de France en Nouvelle-Zélande. Peut-il y avoir un changement de la convention entre la FFR et la LNR ?
On a effectivement entendu et on peut comprendre que des joueurs veuillent aller se confronter aux All Blacks chez eux et faire une tournée en Nouvelle-Zélande. On peut comprendre qu’ils en ont envie. Après, il faut tenir compte à la fois des enjeux de l’équipe de France, de la volonté des joueurs et des enjeux des clubs pour avoir un équilibre et une situation qui convienne à tous pour ne pas mettre en péril ni nos clubs, ni nos joueurs, ni notre équipe de France.
Où en êtes-vous des discussions avec la FFR à ce sujet ?
Elles auront lieu à partir de la semaine prochaine avec les représentants de la LNR qui rencontreront ceux de la Fédération.
Sentez-vous que les clubs sont réceptifs à l’argument des joueurs qui veulent aller en Nouvelle-Zélande ?
Les présidents de clubs sont évidemment sensibles aux envies de leurs joueurs mais aussi tout à fait lucides sur leurs enjeux et leurs besoins. Donc on va en discuter sereinement avant de pouvoir prendre une décision qui permettra de l’annoncer à tout le monde.
On a parlé de la finale du Top 14 en 2015 au Stade de France. Qu’en est-il de celle de 2026 sachant que l’enceinte dyonisienne pourrait changer de concessionnaire ?
Si le futur concessionnaire est le groupe GL Events, les conditions sont déterminées. En 2025 et 2026, on est de retour au Stade de France après une belle parenthèse marseillaise l’année dernière.
Sur les 30 années qui viennent, il y aura 25 ou 26 finales qui se passeront au Stade de France
Et sur la durée ?
Les conditions sont convenues pour que sur les 30 années qui viennent, il y ait 25 ou 26 finales qui se passent au Stade de France. Donc il y aura peut-être quelques événements exceptionnels en dehors du Stade de France mais le lieu des finales, d’une manière générale et d’une manière classique, c’est évidemment le Stade de France où on a des moments merveilleux à partager.
Vous n’êtes plus en lien avec GL Events depuis que vous êtes le président de la Ligue ?
Non, j’ai démissionné du LOU Rugby après mon élection, avec beaucoup d’émotions évidemment parce que ça a été une belle parenthèse. Maintenant il y a une nouvelle page qui s’ouvre où je serai à la Ligue.
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On peut se réjouir de la croissance des revenus du rugby. Après, il faut être lucide sur le fait qu’il y a beaucoup de clubs qui sont en déficit. Donc merci à ceux qui les comblent parce que ce sont des présidents, des propriétaires qui bien souvent investissent sur leurs deniers personnels. Merci au public, aux partenaires qui sont là pour entretenir cette croissance. Ça veut dire que le rugby a un beau potentiel et il est en pleine croissance. On le voit dans les audiences, dans les fréquentations des stades, dans les audiences télé. C’est tant mieux. Après, ça reste des économies qui doivent trouver leur équilibre et qui sont fragiles. Ça implique justement le respect du salary cap, à son renforcement, au fait d’être de bons gestionnaires pour que cette croissance puisse donner plus de sérénité à l’ensemble des clubs professionnels du rugby français.
On a un modèle qui fonctionne, qui est une référence européenne, même une référence mondiale, toute fausse modestie mise à part
Concernant la prochaine loi étudiée par le Sénat sur la professionnalisation du sport. Qu’est-ce qui vous inquiète dans cette loi et qui va dans votre sens ?
Dans cette loi, il y a trois volets. Un, sur lequel on est parfaitement supporteurs, c’est tout ce qui est contre le piratage, parce que c’est un fléau et un danger pour le sport professionnel français, pas simplement le rugby. On est très supporteurs et on serait même ravis que cette loi passe le plus vite possible sur ces aspects-là. Il y a tout un volet sur tout ce qui va vers plus de transparence, pour la prévention des conflits d’intérêts, pour la limitation des salaires des présidents, qui ne nous pose aucun problème parce qu’on n’a absolument rien à cacher à la Ligue nationale de rugby. Et puis il y a un volet qui nous inquiète plus, qui est celui sur les relations entre fédérations et ligues. On a un modèle qui fonctionne, qui est une référence européenne, même une référence mondiale, toute fausse modestie mise à part. Je pense qu’on peut dire que le rugby de club français est le premier dans le monde, en tout cas celui qui attire le plus de stars de ce jeu, le plus de monde dans les stades, le plus de monde devant sa télé. Donc il ne faut évidemment pas mettre ça en péril. Ce sont des aménagements qui peuvent être assez simples à formaliser. Donc on l’a suggéré aux sénateurs, quand ils nous ont reçus, on espère avoir été entendus. Et si ce texte devient équilibré, on en sera supporters.
Concernant votre statut de votre statut de président de la Ligue. Il était question de votre rémunération pour ce rôle. Qu’en est-il ?
Non, ça n’a pas été dans les priorités de l’ordre du jour. Mais oui, en toute transparence, j’ai toujours dit que c’était une conviction, mais pas une condition. Donc effectivement, il faudra soumettre ça à l’ensemble des présidents, parce que sur ce sujet, comme sur les autres d’ailleurs, c’est la majorité des présidents qui décident. Mais oui, le sujet devra être abordé. Ma femme s’en inquiète… (rires) On verra ce qu’il en est. J’ai dit que je ne pouvais pas faire quatre ans bénévole à plein temps. J’ai quelques mois devant moi. Mais il faudra que ce sujet soit tranché.