«On entend tous des histoires plus terrifiantes les unes que les autres. Comment arriver à positiver au milieu de tout ça ? Peut-être que mon histoire est un peu moins terrifiante, elle n’est pas que belle mais j’en ai tiré quelques leçons. J’ai donc décidé de la raconter. Elle commence mal. Peut-être qu’elle finira bien. » Par ces quelques phrases, Anne-Sophie Vitone Vicquery pose le contexte de son livre Le Jour où j’ai rencontré un crabe , qu’elle vient d’autopublier. Il est en vente sur Amazon. Aujourd’hui en rémission, cette Creusotine de naissance et petite-fille de Jean Chevalier, ancien maire d’Écuisses , relate son quotidien avec le cancer, diagnostiqué à ses 33 ans, en 2021.

« L’institut Gustave-Roussy m’a sauvé la vie mais représente mes plus mauvais souvenirs »

« J’ai d’abord voulu écrire dans une intention thérapeutique, explique-t-elle. Ça m’a fait du bien de tout lâcher. » Témoigner, et « peut-être par mes mots ou mon expérience, permettre de comprendre ce que c’est que combattre cette maladie, pour le patient comme pour les proches. On ne prend pas non plus la mesure de la souffrance et de l’incompréhension des accompagnants ». Anne-Sophie Vitone Vicquery tient également à ce que son livre « ne soit pas un objet commercial. Un tiers de mes bénéfices seront reversés à l’institut Gustave-Roussy, à Villejuif. » Elle tient à contribuer à financer ses recherches contre les cancers. Elle a avec cet établissement un lien particulier : « Gustave-Roussy m’a sauvé la vie mais représente mes plus mauvais souvenirs. » Au total, 16 séances de chimiothérapie et un lourd traitement au quotidien. Elle termine sa radiothérapie en juillet 2022.

« Ce qu’on vit est intense, il n’y a pas de demi-teinte »

Au fils des pages, elle retrace des moments forts avec sincérité. « Parfois même de façon crue ! Ce qu’on vit est intense, il n’y a pas de demi-teinte. Tout ce qui concerne la libido, le sexe, c’est un sujet quand on est malade. Avec la perte de cheveux dès les premières séances de chimio, la mastectomie, le corps qui maigrit, on est atteint dans sa féminité. Et je ne voulais pas cacher cette difficulté à avoir des rapports sexuels avec mon mari, par exemple. » Il tient une place prépondérante dans ce livre et dans sa vie : « Il a été là pour me soutenir dans tous les moments. Il a relu mon premier jet et m’a dit que je passais trop vite sur certains passages alors qu’ils étaient très durs à vivre. Je pense qu’on oublie ou qu’on a envie d’oublier. Parce que, finalement, le temps passe, et on n’est plus dans la dureté de l’instant. Sur le coup, on a l’impression qu’on ne s’en sortira jamais. Il lui reste encore deux opérations à subir en février et en octobre « pour finir la symétrisation de mon sein reconstruit après ma mastectomie, explique-t-elle. Ensuite, je n’attendrai plus que l’annonce officielle d’être guérie. » Si elle n’en a pas encore terminé, « pour l’instant, cette histoire est plutôt positive ! » Le cancer, lui, a emporté plusieurs de ses proches, à qui elle rend hommage dans son livre. Une raison de plus pour continuer à se battre.



Entourée d’une belle famille, Anne-Sophie Vitone Vicquery profite de chaque instant.  Photo fournie par A.-S. Vitone Vicquery

« Se rendre compte qu’on a de la chance de vivre »

Apprendre qu’elle était atteinte d’un cancer du sein a été « comme tomber dans un puits sans fond. Ça a été plein de deuils, comme celui d’avoir un troisième enfant, impossible à cause du Zoladrex, qui provoque chimiquement la ménopause pour optimiser le traitement. Mais, en même temps, ça m’a apporté une montagne de positif : de la force, de la prise de recul, de se rendre compte qu’on a de la chance de vivre. » Accompagnée par une famille aimante, elle prend du temps pour elle : « Je réalise que, dans mon jardin, j’ai un arbre magnifique que je ne voyais plus. On apprécie la vie à sa juste valeur. Je retombe dans mes travers parfois, mais j’ai gardé un bonheur de l’instant présent. »



Les deux familles réalisent un périple solidaire entre Rennes et Lorient.  Photo fournie par Anne-Sophie Vitone Vicquery

Un périple familial et solidaire à vélo afin de présenter son livre

Les premières séances de chimiothérapies la rendent malade : « Avec la sensation que le corps est en pause. Je n’avais plus de force, impossible de faire un jeu avec mes deux jeunes filles. On se sent tellement mal que même dormir est compliqué. » Difficile pour cette hyperactive de se sentir diminuée. « C’est le sport qui a été ma première thérapie. » Encore aujourd’hui, je ne supporte pas bien le fait de ne pas être dynamique. Il faut tout le temps que je fasse quelque chose, de sentir que je vis, je crois. » En ce moment, elle est d’ailleurs quelque part entre Rennes et Lorient dans un périple familial et solidaire, avec ses deux filles et son mari, accompagné d’un couple d’amis proches, dont l’enfant est handicapé. « On a respectivement des pancartes avec notre action solidaire accrochées à nos vélos », explique-t-elle.