David Hockney est au cœur d’une grande exposition à la Fondation Vuitton.À cette occasion, le peintre vivant le plus coté au monde a répondu aux questions du JT de TF1.À 87 ans, l’artiste évoque notamment son rapport aux nouvelles technologies et à l’autorité.

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Le 20H

Juste après avoir visité les quatre étages de la Fondation Vuitton, où sont exposées, du 9 avril au 31 août, 400 de ses œuvres, représentant son travail des 25 dernières années, David Hockney allume une cigarette en fixant la caméra de TF1 d’un petit air canaille, dans le reportage du JT visible en tête de cet article. « Je n’ai jamais arrêté. J’adore le tabac », affirme le peintre, du haut de ses 87 ans, à notre micro, lors d’un entretien exclusif. En 2018, l’un de ses tableaux, Portrait d’un artiste, mis aux enchères chez Christie’s, avait constitué une vente record sur le marché de l’art, en étant adjugé 90,3 millions de dollars. Signe qu’il demeure le peintre vivant le plus coté au monde, grâce à la clarté de son trait et son goût pour les couleurs folles.

Dans sa vie comme dans ses œuvres, David Hockney est homme à toujours revendiquer sa liberté. Celle de ne jamais renoncer au plaisir coupable de la nicotine, donc. Mais aussi celle de rallier Paris seul, au volant, depuis son Angleterre natale, malgré l’approche de la fin de sa 9ᵉ décennie. « J’ai trouvé ça vraiment fantastique, d’avoir pu réunir tous ces tableaux. C’est la toute première fois que je vois ce travail. Je pense que ça va toucher beaucoup de gens. Parce que j’ai moi-même ressenti de la joie. Celle que j’ai voulu partager. Le matin, je n’étais pas du tout en forme. J’ai pris ma voiture à Londres et j’ai fait six longues heures de route… Mais maintenant, après la visite, je suis totalement revigoré », confie-t-il en effet.

Capture d’écran TF1

Lors de cet entretien, il exhibe, accroché au revers sa veste, le même badge que celui figurant sur son tout dernier autoportrait. « End bossiness soon », peut-on y lire. Qu’est-ce que cela signifie ? « Ça veut dire en finir avec les petits chefs, qui nous dictent ce qu’on peut faire ou non, répond-il. Moi, je ne veux pas subir ces règles idiotes. Je n’ai jamais raisonné comme ça. Toute ma vie, j’ai toujours tenu éloigné toute personne qui aurait voulu m’en imposer. » Plus qu’un message : un principe de vie. En écho à la phrase en très gros caractères accueillant les visiteurs à l’entrée de l’exposition : « Souvenez-vous bien qu’on ne peut pas annuler le printemps. » Cette saison qu’il a particulièrement explorée et mise en valeur dans ses œuvres.

Regardez ici l’intégralité de l’entretien accordé par David Hockney au JT de TF1.Source : TF1 Info

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« C’est une phrase que j’avais écrite à mes amis quand les Jeux olympiques de Tokyo avaient été annulés (en fait reportés d’une année, de 2020 à 2021, pour cause de Covid, ndlr). Le printemps est une période formidable dans l’année. Il prend plus de temps que les autres saisons pour arriver, et l’été lui succède vite. Le printemps, c’est le moment du renouveau. Un sentiment délicieux. Avril à Paris, c’est le titre d’une chanson non ? », lâche, dans un éclat de rire, celui qui, en 2020, avait justement tiré profit de son confinement en Normandie pour peindre, en long, en large et en travers, la campagne normande. « Il voit tout. Et nous voyons le printemps surgir partout, aussi bien dans les prés que sur les arbres ou dans l’eau. C’est l’arrivée du printemps avec un regard d’enfant, qui le découvre pour la première fois », décrypte Suzanne Pagé, directrice artistique de la Fondation Vuitton.

La campagne normande vue par David Hockney.La campagne normande vue par David Hockney. – Capture d’écran TF1

David Hockney rendait alors visite, cette année-là, à son complice de 40 ans, le galeriste parisien Jean Frémont. « À chaque déjeuner, il commandait des andouillettes. C’est rare pour un Anglais », s’esclaffe celui-ci, avant de divulguer une autre singularité du peintre, surtout à l’échelle de sa génération : l’usage d’un iPad, configuré tout exprès pour lui avec sa palette de couleurs préenregistrée, plus facile à trimballer qu’un ensemble de toiles avec son matériel. « La rapidité est quelque chose qu’il cherche, reprend Jean Frémont. Par exemple, pour saisir le ciel. Il disait que ça changeait trop vite, qu’il n’avait pas le temps de le faire. Avec l’iPad, il a réussi à apprivoiser le ciel, parce qu’il ne lui faut plus trois jours pour le peindre. »

David Hockney peignant un ciel sur son iPad.David Hockney peignant un ciel sur son iPad. – Capture d’écran TF1

Concernant cet inattendu pas de côté technologique, sans jamais délaisser ses vieux pinceaux pour autant, l’intéressé indique : « Il faut utiliser la technologie pour l’image que l’on veut faire. Pendant un certain temps, on a dit de la photographie que c’était la représentation ultime de la réalité. Mais ce n’est pas vrai. Je ne sais pas pourquoi on a dit ça… Après, l’iPad, c’est juste un outil (rires). Je m’amuse vraiment beaucoup quand je l’utilise. Je le fais pour mon propre amusement. » Des rires enthousiastes d’enfant, une vision féérique du monde qui l’entoure, une douce dissidence libertaire et un esprit ouvert à la modernité : voilà tout David Hockney. Un homme dont la personnalité et le travail demeureront intemporels.

Hamza HIZZIR | Reportage TF1 : Florence LEENKNEGT, Jean-François DROUILLET