L’Interorganisation de soutien aux personnes exilées et Utopia 56 tirent une nouvelle fois la sonnette d’alarme. Depuis le 7 avril et l’expulsion du gymnase Felix-Masson, le campement pour migrants du parc de Maurepas, à Rennes, ne cesse de grossir. « Selon notre dernier décompte, 263 personnes, dont une centaine d’enfants et 15 de moins de trois ans, vivent dans le campement où les conditions de vie sont alarmantes », constate Suzanne Mamet, coordinatrice d’Utopia 56 Rennes.
Tentes de mauvaise qualité recouvertes de bâches, pas d’électricité, seulement deux toilettes chimiques à proximité, de l’eau froide pour se laver et une rampe de quatre robinets, mais aussi « un sentiment grandissant d’insécurité ». « Les relations entre occupants se tendent régulièrement avec la densité qui s’accroît et certaines personnes n’osent plus sortir la nuit », alerte l’Interorganisation de soutien aux personnes exilées et Utopia 56 dans un communiqué.
Tensions, bagarres…
« Des tensions sont apparues, abonde Suzanne Mamet. On nous rapporte des bagarres notamment. On assiste à une cohabitation resserrée entre des personnes qui n’ont pas choisi de vivre ensemble et aux profils très différents ». Ici, cohabitent des familles, mineurs isolés, « personnes sous addiction n’ayant aucune envie de s’investir mais seulement de se fondre dans la masse, mais aussi plusieurs groupes de personnes ayant grandi en France, au parcours très cabossé avec des comportements souvent problématiques et quelques personnes souffrant manifestement de troubles psychiatriques », pointent les deux associations.
« Les femmes et les enfants sont en proie à n’importe quelle personne qui passe »
La coordinatrice d’Utopia 56 Rennes est « particulièrement inquiète pour les mineurs isolés et les femmes. Certains nous ont raconté que des tentatives d’intrusion ont eu lieu dans leur tente la nuit. Des femmes vivent des violences ». Des tentatives d’intrusion « inévitables » selon Armelle Bounya, du Mrap (Mouvement contre le racisme et pour l’amitié entre les peuples). « Il n’y a aucune sécurité dans le campement, les femmes et les enfants sont en proie à n’importe quelle personne qui passe ».
La police indique n’avoir reçu aucune plainte de la part des personnes qui vivent dans le campement de Maurepas. Quant à la préfecture d’Ille-et-Vilaine, elle reconnaît que « des incidents surviennent régulièrement dans les campements », mais n’a « pas eu connaissance de faits graves récemment ».
« On est tous traumatisés »
« Il y a surtout un sentiment de peur, estime Trésor, habitant du camp de Maurepas originaire de République démocratique du Congo. Il y a eu des vols entre nous, mais ça a été réglé. Quand il y a un problème, on intervient. Ce sont surtout des querelles et, plus rarement, des bagarres. » Face à ce sentiment de peur, l’homme, arrivé seul en France et en attente du réexamen de sa demande d’asile, effectue trois rondes chaque nuit, « à minuit, 3 h et 6 h ». Sa crainte ? « On a remarqué que des gens extérieurs au campement viennent le soir. »
Ici depuis quatre mois, il essaie de rendre le quotidien un peu plus vivable. « On essaie d’identifier tous les nouveaux qui s’installent. On met des mécanismes en place pour que cela se passe bien, notamment l’organisation du nettoyage complet du camp tous les lundis. Mais il faut avoir les nerfs solides, sans eau courante ni électricité depuis quatre mois, les passants qui nous insultent et font peur aux enfants. On est tous traumatisés. »