« Dinguerie, ce qui vient d’arriver ! » Depuis le week-end dernier, un jeune homme fait parler de lui, sur les réseaux sociaux, en raison d’une vidéo pour le moins étonnante. Il y relate sa mésaventure vécue au musée du Louvre, à Paris, quelques instants plus tôt. « Je rentre au musée, j’ai envie d’aller aux toilettes, je cherche des WC non binaires, je n’en trouve pas ! C’est bizarre, pour un musée si mondialement connu, qu’il ne se soit pas adapté, qu’il n’ait pas cette ouverture d’esprit, déclare-t-il, face caméra. Je vais voir un responsable, je lui demande où sont les toilettes non binaires. Il me dit : « ha ha ha, il n’y en a pas, monsieur. Les toilettes non binaires, c’est ici », en me désignant les poubelles. Est-ce que vous trouvez ça normal ? […] J’ai dû uriner dehors. J’ai dû sortir mon pénis devant des gens. Je suis scandalisé. »

S’agit-il d’un vrai témoignage, donné au premier degré ? On aimerait croire à un gag, mais dans notre France de 2025, tout semble désormais possible… En attendant, le jeune individu gender fluid annonce son boycott du Louvre, ainsi que son intention de déposer plainte contre le célèbre musée.

Une revendication à prendre – hélas – au sérieux

En France, quelques institutions se sont d’ores et déjà équipées de toilettes « non genrées ». C’est le cas du magasin des Galeries Lafayette Champs-Élysées, des locaux de BNP Paribas ou encore de Spotify, Ubisoft et Meta (la maison mère de Facebook). Créateur de jeux vidéo, Ubisoft a passé le pas dès 2020, à l’occasion de l’ouverture de ses nouveaux locaux à Saint-Mandé (Val-de-Marne). Il s’agissait, pour l’entreprise, de suivre la tendance inclusiviste qui déferlait alors sur la côte ouest des États-Unis, mais aussi de répondre aux demandes de ses quelques salariés trans ou « non binaires » ne se sentant ni hommes ni femmes. En mal d’espaces adaptés à leur identité de genre, ces personnes seraient amenées à se retenir le plus possible d’aller aux toilettes, voire à ne pas y aller du tout. Avec, à la clef, le risque de développer des infections, insuffisances rénales, hémorroïdes et constipation. Et peu importe si ces salariés ne sont qu’une infime minorité. « Le combat de l’inclusion vaut même pour une seule personne », affirme fièrement Céline Parsoud, responsable diversité et inclusion chez Ubisoft France.

Car, à en croire certains, il est urgent d’ouvrir des toilettes non binaires partout. Ce serait même une simple question d’égalité. En 2017, le Guardian avait fait le test : quinze hommes, quinze femmes se soulageant avec un W.-C. par sexe. Les premiers devaient attendre 40 secondes, quand les secondes patientaient 2 minutes et 20 secondes. Si les deux toilettes avaient été non genrées, le temps moyen aurait été de 60 secondes. CQFD !

Par ailleurs, une étude de l’Alliance de la fonction publique du Canada a démontré que le malaise physique, le harcèlement ou « la peur d’être harcelé.e d’un.e employé.e trans ou non binaire » peuvent atteindre son bien-être et, à terme, sa productivité, ses performances au travail. De quoi nourrir l’indignation du média LGBT français Têtu : « Comment expliquer que les toilettes neutres ne se démocratisent pas tellement, en France ? » Sans doute en raison de la loi qui oblige les employeurs à mettre des toilettes genrées à disposition de leurs salariés ?

Une susceptibilité XXL

Cette propension à se sentir blessé dans son genre et à porter plainte n’est pas nouvelle. En 2023, des militants LGBT avaient saisi la Justice au motif que la SNCF ne proposait « que » l’alternative « Monsieur » ou « Madame » sur ses formulaires. « Réduire le choix à une alternative binaire, c’est enfermer les voyageurs dans des stéréotypes de genre et nier la diversité des personnes LGBTQI+ ! », s’étaient alors émus 64 clients de la SNCF, emmenés par les associations Stop Homophobie et Mousse. Après avoir vu leur plainte rejetée par la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL), les plaignants s’étaient tournés vers la Cour de justice de l’Union européenne. Ils réclament une sanction de 200.000 euros à l’encontre de la société de transport. Les musées doivent-ils, eux aussi, s’attendre désormais à être poursuivis par des militants très à cheval sur leur identité de genre ?


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