En plein procès dit des viols de Mazan, Stéphane Babonneau s’est éclipsé de la cour criminelle d’Avignon (Vaucluse). Des parties civiles, où il conseillait entre autres Gisèle Pelicot, il a rejoint la défense, dans un autre tribunal. De sa cliente, droguée par son mari et victime de viols pendant presque dix ans par des dizaines d’inconnus, il est passé à un homme accusé de viol conjugal. Une adaptation qui traduit l’habitude de l’avocat de se confronter aux violences sexuelles et leur appréciation par la justice.
Ce détachement apparent ne résiste pas au récit qu’il fait du « procès Pelicot », lorsqu’il nous reçoit dans une pièce attenante à son bureau du boulevard Saint-Germain, à Paris. Au printemps 2022, un jour d’audience en région pour un dossier de fraude fiscale, maître Babonneau reçoit un appel de son confrère Antoine Camus. « Il m’indique avoir été contacté par une femme victime de viols pendant son sommeil par plusieurs dizaines d’hommes. Au début, je n’y crois pas, cela me paraît impossible », retrace-t-il. Fort de plus de quinze années de barreau, il « n’hésite pas » à accepter ce « dossier fascinant », y voyant un « défi professionnel inouï ». « Comment accompagner une victime de faits aussi extrêmes ? », s’interroge-t-il. Le premier contact avec Gisèle Pelicot, en visioconférence, préfigure la singularité du procès qui s’annonce. « Elle s’exprime dans un français parfait, précis, là où la plupart des victimes d’agressions sexuelles ont plutôt un syndrome réactionnel et des difficultés à s’exprimer », se souvient la robe noire.