Elle est élégante, élancée, tout en finesse, mêlant le surréalisme et le sacré. Le Saint-Pierre tenant la clef du paradis, une sculpture en fer forgé, daté de 1953, créé par l’un des maîtres du surréalisme fait l’objet d’une mise en vente aux enchères le 15 août prochain à Cannes.
L’œuvre d’Óscar Domínguez, étiquetée lot 287, par le commissaire-priseur cannois, Jean-Pierre Besch (Besch Cannes Auction), est estimée entre 6.000 et 8.000 euros. Pour ce spécialiste, même si Domínguez n’a pas l’aura auprès des néophytes d’un Pablo Picasso, il a toutefois une valeur sûre et mise en valeur par les collectionneurs et les musées.
Picasso propriétaire d’un Domínguez
Considéré comme l’un est des derniers « peintres maudits » de Montparnasse, l’homme nait en 1909 sur l’île de Tenerife, a été un proche de Picasso. Ce dernier a d’ailleurs acquis un phonographe signé par son compatriote espagnol Oscar Domínguez pour enrichir sa collection personnelle.
Pour la « petite histoire », le fameux phonographe, objet surréaliste d’Óscar Domínguez, qui avait fait sensation en janvier 1938, lors de l’Exposition internationale du surréalisme à la galerie Beaux-Arts de Paris, était porté disparu.
Du moins, jusqu’à ce qu’une photographie faite en 1947, dans l’atelier parisien de Pablo Picasso, permette de remonter à l’heureux propriétaire: le peintre de Guernica en personne, selon le site philosophieetsurréalisme.
Certifiée par l’Association de défense d’Oscar Domínguez
Pour le commissaire-priseur, Óscar Domínguez demeure « une valeur sûre, exposé au Guggenheim, achetée par des connaisseurs d’art. Certes, il n’a pas la même audience auprès du grand public qu’un Picasso, mais comme les artistes des années 50 à 80, il suscite l’intérêt des collectionneurs ».
La raison? « La traçabilité de l’œuvre qui, étant plus contemporaine permet de connaître son parcours. Ce qui est beaucoup plus facile que pour des œuvres du 17eme, où l’expertise est plus complexe », explique le commissaire-priseur en charge de la vente.
Ce Saint-Pierre fait partie du catalogue « raisonné » de Domínguez, c’est-à-dire des créations officiellement recensées de l’artiste.
Elle sera d’ailleurs accompagnée d’un certificat de l' »Asociación » sera remis à l’acquéreur.
Le domaine d’une mécène belge, puis des Noailles
Construite dans les années 20 par une mécène belge, le « Petit château » situé près de la Villa Noailles a ensuite appartenu à un diplomate chilien, avant d’être racheté par Charles Noailles, donné à sa fille et cédé à la ville en 1966. Le lieux fut abandonné et en ruine avant sa réhabilitation Photo catalogue Besch Cannes Auction, ministère de la Culture.
Mais alors, à qui appartient cette sculpture de 2,19 m de haut et de 1,40 m de large, avec une profondeur au pied de 0,77 m, qui, autrefois surplombé le petit château Saint-Pierre, près de la Villa Noailles, désormais propriété métropolitaine et gérée par l’association Villa Noailles?
Qui est le véritable propriétaire de la sculpture autrefois situé sur la droite du bâtiment? A l’origine, cette maison appelée « petit château », a été construite entre 1920 à 1923, pour la vicomtesse Vroomans-Leclercq, veuve de la Grande Guerre d’origine belge selon le ministère de la Culture.
Sur cette colline, face à la presqu’ile de Giens, avec un panorama exceptionnel, cette mécène a financé des fouilles à l’église Saint-Pierre, avant de créer ce monument et de vouloir léguer à la commune l’ensemble de son domaine hyérois.
Visionnaire, elle imaginait les lieux mis en valeur. Comme l’indique le ministère, « elle abreuva le maire d’une correspondance véhémente en faveur d’une vision prémonitoire du tourisme culturel, mais, isolée, elle finit par se lasser ».
Un propriétaire privé
Abandonnée, la maison en ruines avec ses créneaux de château de style roman et la propriété de 4.711 m2 en friche a été acquis par une autre vicomtesse et son époux, les Noailles. Accaparé par la Villa Noailles, le couple revend le site dans les années 50 à leur ami, le chilien Tony Gandarillas
Dans les années 1950, ces derniers la cédèrent à leur ami chilien, le diplomate Antonio Gandarillas qui en fait son lieu de villégiature entre 1953 et 1964). Rebaptisée Villa Gandarillas, le site est réhabilité et la fameuse sculpture de fer forgé d’Oscar Dominguez est installée en guise d’étendard culturel.
Dans l’impossibilité d’entretenir la propriété, « Tony Gandarillas » la vend à son voisin, Charles de Noailles qui en fait don à sa fille Nathalie. En 1966, le « le château Saint-Pierre » ou « Villa Gandarillas » est cédée, à la commune de Hyères.
Quant à la sculpture?
Elle a disparu du paysage ou presque. « Elle appartient à un collectionneur privé », affirme Me Jean-Pierre Besch. « Lors du rachat de l’édifice appartenant à un particulier par la commune de Hyères, la sculpture n’était déjà plus là », assure-t-il.
Qui deviendra le nouveau propriétaire de Saint-Pierre tenant la clef du paradis? Un particulier ou une collectivité?
La réponse sera connue le 15 août prochain. La vente aux enchères débutera à 14 h 30.