L’été, saison propice à la torpeur et au farniente… sauf chez les Républicains. Depuis que Michel Barnier et Rachida Dati se sont, tous les deux, portés candidats en vue de la législative partielle qui se tiendra dans la deuxième circonscription de Paris, après la démission du macroniste Jean Laussucq en raison d’irrégularités dans ses comptes de campagne, rien ne va plus à droite. Après ses échecs lors de la dernière présidentielle et des législatives l’an passé, le parti avait pourtant retrouvé des couleurs ainsi qu’une certaine remise en ordre, avec l’élection du ministre de l’Intérieur, Bruno Retailleau, à sa tête.
Mais, dans cette famille, les guerres intestines sont, il est vrai, une grande tradition. Ces trente dernières années, on se souvient des célèbres duels Chirac-Balladur et Sarkozy-Villepin. Reste que dans le cas Dati-Barnier, certains en perdent leur latin et ne comprennent pas la stratégie de la ministre de la Culture alors qu’elle concentre, depuis des mois, son énergie vers les municipales à Paris, en 2026, en ayant d’ailleurs réussi à se placer comme favorite dans les sondages. Pourquoi alors tant vouloir, aussi, un siège de député, quand Michel Barnier, fort de son passage éphémère à Matignon en fin d’année dernière, espère, lui, se placer en vue d’une autre échéance, la présidentielle de 2027 ?
Mauvaise image
« J’ai du mal à croire que Dati ira aux législatives. Je ne vois pas son intérêt. Elle est assez seule et isolée à Paris, elle l’est aussi à la CNI », relève-t-on au sein du parti. Cette Commission nationale d’investiture a pourtant ménagé la chèvre et le chou en désignant, lundi 28 juillet, Michel Barnier comme candidat officiel pour la législative partielle, tout en soulignant que Rachida Dati était la mieux positionnée pour incarner l’alternance à Paris, aux municipales.
« La seule explication que je vois, c’est son affaire judiciaire (avec Renault-Nissan et Carlos Ghosn, NDLR). Les législatives lui feraient peut-être une sorte d’immunité parlementaire alors qu’une condamnation pourrait mettre en péril sa candidature aux municipales », se questionne-t-on de même source, pas totalement convaincu par cette explication. Tout en insistant sur le caractère toujours aussi imprévisible de Rachida Dati : « Avec elle, on ne sait jamais à quoi s’attendre mais on n’est jamais déçu ». Quoi qu’il en soit, si, chez LR, on remarque que Bruno Retailleau fait les choses dans l’ordre, on concède que l’image tirée de cette séquence n’est pas bonne pour la droite.
« Ce sont des calculs très personnels de carrière, d’ambition électorale. Ils ne réfléchissent pas beaucoup aux conséquences que cela peut avoir pour leur famille politique. C’est un brouillage des cartes qui pourrait être préjudiciable », analyse l’universitaire Jean Garrigues, spécialiste d’histoire politique. Tout en voyant, dans cette bataille, la déliquescence de la vie politique en général et, dans la droite et le centre-droit, un pôle qui se cherche toujours une direction politique et une identité depuis son explosion post-2017, avec l’élection d’Emmanuel Macron.
« Un chef, c’est fait pour cheffer »
Sans parler de chienlit chère au Général de Gaulle, ce désordre a des répercussions jusqu’au niveau local. À Nantes, par exemple, c’est une primaire qui devra départager, pour la première fois, deux candidats, en vue des municipales. Fin août, les 800 adhérents LR de la Cité des Ducs de Bretagne devront ainsi choisir entre Julien Bainvel, le candidat soutenu par la figure locale Laurence Garnier, et Foulques Chombart de Lauwe, qui s’est lancé, très tôt, dans la bataille, en marge des instances locales.
« Au niveau national, il y a une difficulté à avoir une ligne. Elle a été, en partie, trouvée avec Bruno Retailleau mais Laurent Wauquiez n’a pas renoncé à être le challenger. Cela ouvre l’idée, y compris à l’échelle locale, que chacun peut jouer sa carte. C’est très contraire à l’esprit et l’histoire de la droite qui, en général, se rangeait derrière un chef », note Jean Garrigues, rappelant la célèbre phrase de Chirac : « Un chef, c’est fait pour cheffer ».