Il faut une certaine audace pour transformer une plage de Normandie en salon du Faubourg Saint-Germain. Éric Rohmer l’a fait en 1983 avec Pauline à la plage, chef-d’œuvre de subtilité où le maillot de bain devient habit de cour et où chaque conversation sur le sable fin rivalise avec les plus habiles échanges de Marivaux. Sous des dehors de chronique estivale, ce film dissèque avec une précision d’entomologiste les méandres du cœur humain, quand les désirs obscurs se brûlent au contact du sel. Un film récompensé de l’Ours d’argent du meilleur réalisateur à Berlin et qui deviendra le film de chevet de Quentin Tarantino. La chaîne T18 a eu la bonne idée de l’inscrire dans son cycle des films de vacances après L’Hôtel de la plage, dans un tout autre registre.

Dès les premières minutes, Éric Rohmer dispose ses pions avec la minutie d’un horloger. Marion, styliste parisienne fraîchement divorcée, débarque en Normandie avec sa jeune cousine Pauline, quinze ans, regard clair et parole rare. Trois adultes vont rivaliser d’éloquence pour justifier leurs philosophies amoureuses : Pierre (formidable Pascal Greggory) défend la constance et l’amour reposant sur la reconnaissance réciproque des valeurs ; Marion prône la passion immédiate ; Henri (Féodor Atkine, plus pervers que jamais), ethnologue et libertin, milite pour les plaisirs sans entraves. Chacun son credo, chacun ses contradictions.

Les paroles et les actes

« Qui trop parloit, il se mesfait », prévient la citati […] Lire la suite