Les visiteurs sont rares ce vendredi après-midi, dans les allées du cimetière Saint-Jérôme, dans le 13e arrondissement de Marseille. Pourtant, celui-ci affiche déjà complet et ne peut plus proposer la moindre nouvelle concession. « Les familles parfois nous en parlent, nous demandent des informations », glisse-t-on à l’entrée. Car cette crise touche toute la ville.
À l’heure actuelle, il ne reste qu’une centaine de concessions sur l’ensemble des 21 cimetières marseillais, dont une trentaine musulmanes, aucune israélite, pour environ 13 000 inhumations chaque année. Le résultat : une liste d’attente de 1 300 noms. Et la demande risque encore de croître de façon exponentielle à l’horizon 2030, en raison de la pyramide des âges.
« Il manque 30 000 places »
« La Ville, comme d’autres grandes villes urbaines, fait face à un déficit d’emplacements », reconnaît la municipalité, rappelant « la saturation progressive des espaces existants et la forte demande en concessions ». Un enjeu qu’elle promet avoir anticipé, en créant de nouvelles concessions dans les cimetières existants et en accélérant les démarches de reprises administratives afin de libérer des emplacements.
Dans les allées du cimetière Saint-Jérôme, des plaques en laiton posées auprès de quelques tombes invitent ainsi les familles à joindre les services municipaux, tandis qu’une fosse déjà béante est barrée de rubalise. Mais ces mesures restent encore insuffisantes. « Il manque 30 000 places », alertait déjà l’ex-adjointe à l’urbanisme Mathilde Chaboche en juin 2022, alors que le conseil municipal approuvait l’achat d’un hectare de terrain jouxtant le cimetière des Aygalades.
« Un vaste projet d’extension de quatre cimetières est en cours », indique aujourd’hui la municipalité, qui prévoit « à terme, de créer plus de 5 400 emplacements supplémentaires ». Sont ainsi concernés les cimetières des Aygalades (15e), de Saint-Jérôme (13e), des Olives (13e) et des Vaudrans (12e). En juin 2024, le conseil municipal avait déjà approuvé une première enveloppe de 1,7 million d’euros pour créer 1 000 places supplémentaires. « Les administrés doivent en effet pouvoir se recueillir au plus près de chez eux », défendait la délibération qui visait à « concilier le développement harmonieux de notre ville ainsi que l’égal accès au service public pour l’ensemble des administrés ».
Carrés juifs et musulmans
Une attention particulière est portée aux carrés confessionnels. « De nouvelles concessions juives seront créées au cimetière des Olives et des emplacements musulmans supplémentaires seront aménagés aux Aygalades et aux Vaudrans », indique la municipalité qui insiste sur cet engagement « là où d’autres collectivités ne le font pas systématiquement ».
À Saint-Jérôme, la préfecture a ouvert une enquête publique, qui s’achève le 7 août prochain. Le projet prévoit un agrandissement sur un terrain de 5 000m² au pied de l’Ehpad Mistral voisin, pour un cimetière écologique, sans pierres tombales. « Il n’acceptera que des inhumations en pleine terre en interdisant les travaux de constructions et les produits chimiques », présente le dossier de l’enquête publique. Derrière l’actuel mur de soutènement, 332 nouvelles places doivent être créées, dont une moitié de concessions musulmanes, au pied d’alignements d’oliviers, ainsi que 102 concessions classiques autour d’un kiosque central, et 59 caveaux destinés aux urnes funéraires. Un jardin du souvenir de plus de 300 m² doit aussi être aménagé pour y épandre les cendres des défunts. L’alignement d’arbres qui jouxte l’Ehpad, lui, sera bien conservé. De quoi apporter de la dignité aux familles. Et éviter que la crise du logement ne touche aussi ces ultimes demeures.
« Marseille, comme d’autres grandes villes urbaines, fait face à un déficit de places. »