Le soleil tape et la route défile. C’est déjà l’heure des playlists qu’on hurle en chœur sur l’autoroute des vacances, des refrains qui collent à la peau entre deux plongeons ou qui tiennent compagnie sur un quai de gare déserté. Cet été encore, pourquoi ne pas troquer les tubes usés contre de nouveaux horizons sonores ?
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Parmi les milliers de sorties qui inondent les plateformes, on a retenu dix pépites françaises : de la pop pastel au punk électro, du baile funk au soft grunge, un panorama vibrant qui donne envie de danser, de rêver et de tout envoyer valser. Prêts pour la bande‑son de votre été ? Tendez l’oreille.
Joe la panic – Happy Hour
Posters défraîchis de Karate Kid au mur, coussins à l’effigie de Nicolas Cage sur le lit, guitare pastel accrochée à un clou : c’est dans sa chambre‑refuge que Joe la panic a composé la bande‑son douce‑amère de l’été. Sur Happy Hour, la Montpelliéraine raconte les désenchantements amoureux et le quotidien d’une génération système D – sans le sou mais ingénieuse –, qui ne fait la fête qu’en happy hour, qu’elle fait malicieusement rimer avec whisky sour. Refrains sucrés, flow parlé, guitare scintillante et basse feutrée : la production lo‑fi enveloppe sa voix réverbérée et rêveuse. Autrice, compositrice et DJ de 24 ans, que l’on situerait quelque part entre Angèle et Miki, Joe la panic signe un hymne chill et intime qui capture à merveille l’état d’esprit des vacances. Un an après vous l’avoir présentée, on persiste et signe : Joe n’avance pas seulement vers un avenir doré, elle trace déjà le chemin de nos futurs étés.
Théodora – Fashion Designa
Une voix basse et souveraine aux envolées subtiles, une production qui vogue entre RnB, afrobeat et sonorités orientales : sur Fashion Designa, Theodora dessine un autoportrait flamboyant. Celui d’une fille issue d’une famille congolaise, qui a grandi entre la Suisse, la Grèce, le Congo, La Réunion, avant de poser ses valises en Seine-Saint-Denis – et qui a appris à composer avec des sonorités du monde entier. Après avoir surpris tout le monde avec le succès de Kongolese sous BBL – produit par son grand frère Jeez Suave – et son style unique, l’ancienne étudiante en prépa a renversé les attentes en conquérant l’Internet français avec le clip de Fashion Designa aux accents surréalistes, aux inspirations puisées chez Grace Jones, Rita Mitsouko, Michel Ocelot ou encore Salvador Dalí. Tout s’y mélange dans une créativité sans limite. Le résultat ? Un morceau qui ne ressemble à rien d’autre, porté par quinze ans d’expérimentations et un éclectisme assumé. Dans un paysage musical souvent formaté, Fashion Designa fait l’effet d’une bouffée d’air frais.
Feu ! Chatterton – Allons voir
Premier extrait d’un album attendu le 12 septembre, Allons voir est à la fois une invitation au voyage et un cri d’amour pour l’audace. « Il est temps de vivre », annonce Arthur Teboul, avant de s’élancer à pleine voix au refrain : « Allons voir ce que la vie nous réserve… N’ayons peur de rien ! », comme un mantra d’été à crier la tête hors de la fenêtre, les cheveux au vent. Derrière l’élan, la finesse : un xylophone cristallin et un sifflement discret, presque enfantin, glissent l’idée simple et précieuse qu’il n’est pas si compliqué de se lancer dans l’aventure – quand le synthétiseur analogique et la rythmique tendue font sentir l’empressement. « Tu meurs d’envie d’aller voir par toi-même, faire tes preuves », continue Arthur Teboul de sa diction magnétique. Pour l’été, difficile de rêver mieux : Feu ! Chatterton livre une chanson habitée, nerveuse, et plus que jamais portée par l’envie de vivre. Il ne reste qu’à suivre le mouvement.
Oklou – Blade Bird
Un battement d’ailes, une flûte en apesanteur, des nappes synthétiques qui s’étirent comme un ciel d’été au ralenti : Blade Bird est l’instant suspendu de Choke Enough, le deuxième album de la géniale Marylou Mayniel, alias Oklou. Encore méconnue en France, la musicienne venue de Poitiers s’est pourtant hissée en janvier dans le top 10 mondial de Spotify, adoubée d’abord par Rosalía puis par Billie Eilish, qui l’ont érigée en nouvelle référence. Ici, elle confie un amour qu’elle compare à un oiseau insaisissable, beau parce qu’il échappe. La mélodie, fragile et tendue à la fois, se déploie dans une douceur aérienne. Le morceau a voyagé jusqu’à Londres, où Oklou l’a joué en live sur une patinoire, entourée de patineurs dont les figures rappelaient ces oiseaux polaires qui traversent la chanson. Entre mélancolie et légèreté, Blade Bird devient un morceau‑refuge, capable d’embraser une nuit solitaire comme une route d’été au petit matin.
Anaïs Mva – Monde
Dans un décor clinique, un vélo d’appartement bardé de câbles et un écran qui affiche son « taux de sérotonine » à chaque coup de pédale, ANAÏS MVA pédale comme on s’arrache, comme on s’accroche pour rester debout. La scène rappelle The Substance, cette obsession du corps et ce poids du regard des autres dans lequel on peut finir par s’oublier. « Je rêve de faire le tour du monde, mais le monde ne tourne pas rond », répète‑t‑elle dans un refrain obsédant. Monde est une leçon de résilience : Anaïs y raconte sans filtre ses troubles alimentaires, les années de solitude et l’impression de vivre « sans raison ». Derrière ce cri brut, une pop lumineuse et immédiate qui agit comme un antidote. ANAÏS MVA s’inscrit dans la nouvelle vague de voix féminines qui bousculent la chanson française (Camille Yembé, Yoa, Marguerite Thiam) avec des récits crus et des refrains entêtants. Dans cette pièce blanche, elle transforme la douleur en énergie. Et, le temps d’un morceau, le monde recommence à tourner.
Bianca Costa – Zone Interdite
Mercedes rétro lancée sur la corniche marseillaise, cheveux au vent, coucher de soleil sur la Méditerranée : Zone Interdite distille l’ivresse moite des nuits d’été. Tourné entre les blocs de la Castellane et les collines qui surplombent la ville, le clip accompagnant ce single annonce le premier album de Bianca Costa prévu à l’automne. La chanteuse franco-brésilienne – révélée par ses reprises de rap en portugais sur YouTube – s’est imposée en quelques années comme l’une des voix les plus singulières de la pop latine francophone. Sur ce morceau, elle mêle trap et baile funk, une énergie percussive et sensuelle, à la croisée de Rio et Marseille. Les paroles racontent une cavale amoureuse insouciante (« Toi et moi au bout du monde / On fume, on boit, on savoure chaque seconde ») où il ne reste que la route et le vertige de l’instant.
Polo & Pan et Beth Ditto – Petite étoile
Comme un Polaroïd qui jaunit au soleil, Polo & Pan rappellent que l’électro française sait encore conjuguer nostalgie et ivresse estivale. Dix ans après avoir conquis le monde avec leurs hymnes électro‑solaires (Canopée, Ani Kuni), les deux petits génies français reviennent avec un nouvel album baptisé 22:22, une odyssée taillée pour les nuits chaudes, celles où l’on débouche une bouteille de rosé face à la mer. Au milieu des collaborations prestigieuses (Metronomy, Arthur Teboul) et un joyau : Petite Étoile avec Beth Ditto. Sa voix puissante au timbre rock‑soul vient contrebalancer les textures électroniques du duo, mêlant énergie brute et nappes oniriques. Un mariage parfait pour danser, s’embrasser jusqu’au bout de la nuit et oublier, l’espace d’un instant, l’équilibre du jour.
Keman, Booba – Autoroute du soleil
Keman prend l’autoroute du soleil avec le patron du rap français en co-pilote, mais les lignes jaunes qui défilent sont celles d’un ciel ombrageux. La lumière estivale n’est qu’un prétexte pour dépeindre la noirceur des relations humaines. « Quand j’aurai tout accompli, aurai-je encore mes frères à mes côtés ? » s’interroge le rookie de Noisy‑le‑Grand, dernière recrue du label 92i. Le morceau explore la trahison et le vertige des amitiés qui se défont quand la réussite arrive. Après avoir rappelé qu’il trônait encore tout en haut du rap français avec un couplet de quarante secondes sur Bonne Mentale, Booba démontre, en empruntant l’asphalte, qu’il n’est jamais aussi à l’aise pour déployer sa misanthropie et son fatalisme que sur des piano‑voix. Quant à Keman, nourri par la rumba congolaise et le RnB de son adolescence, il s’impose comme l’un des nouveaux visages les plus prometteurs de la scène rap et prouve qu’il avait raison, enfant, de croire qu’il pouvait « toucher les étoiles depuis son lit superposé ».
Aya Nakamura – Baddies
À Découvrir
Le Kangourou du jour
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L’été a ses lois. Et celle d’Aya Nakamura en est une : chaque année, un hit. Sacrée star planétaire aux JO de Paris, elle a dégainé dès le 15 mai Baddies, duo entêtant avec le Franco‑Haïtien Joé Dwèt Filé (révélé avec 4 Kampé), déjà fort de plus de 30 millions d’écoutes sur Spotify et YouTube. Entre douceur zouk, groove moelleux et refrain accrocheur, tout est calibré pour faire danser et se sentir invincible. Car Baddies est d’abord un hymne à la confiance en soi : « J’veux minimum dix compliments cet après-midi », lance Aya, mi‑provoc, mi‑assurée, avant de clamer : « Des attitudes de baddies. Ah‑Ah. Ça te dérange ? Tu m’as pas dit. Ah‑Ah. » Rien de révolutionnaire, mais tout y est : rythme, sensualité, ce ton unique qui prolonge l’énergie du BRAT summer 2024. Une recette qui marche, encore et toujours, parce qu’Aya sait exactement ce qu’elle fait. Vous pouvez faire semblant de ne pas l’entendre. Bonne chance !
Blasé – Instant Magique
On aurait pu vous parler de tout l’album. Parce que BLABLABLA, premier EP du Franco‑Américain Blasé, est un manifeste généreux : 15 titres qui font le grand écart entre hip-hop old‑school, disco, funk, jazz et new‑wave. « J’aime tous les genres », déclare le producteur et musicien, qui compose tout lui‑même. Mais on s’arrête sur Instant Magique, premier et presque unique titre en français du disque, sur lequel sa voix languissante aux paroles naïves (« Quand je m’endors, quand je m’endors, avec elle, avec elle, c’est trop bon, c’est trop bon, c’est trop bon ») se traîne sur fond d’instru psyché aux riffs de synthés syncopées qui rappellent l’époque de la fin des années 1990 et le début des années 2000. Simple et parfaitement mixé, Instant Magique séduit par son efficacité immédiate, tandis que l’album, en lice pour le prix Joséphine 2025, déroule un moment aérien qu’on a envie d’écouter partout, tout le temps. Sautez dans le train !
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