Les passagers ayant transité par les aéroports de Marseille ou Nice depuis le 1er juillet dernier ont peut-être constaté que les agents d’Air Corsica ont cédé leur place à des personnels de la société Alyzia, spécialisée dans les services aéroportuaires, derrière les comptoirs d’enregistrement. Un changement que la direction de la compagnie présente comme mineur, mais qui provoque l’ire de Force Ouvrière. 
 
Dans un tract transmis à la presse il y a quelques jours, le syndicat faisait part de ses inquiétudes, déplorant que « la direction d’Air Corsica, avec le soutien de son principal actionnaire – la Collectivité de Corse -, (ait) fait le choix de recourir à des entreprises prestataires continentales sur les escales de Nice et Marseille », le tout « au détriment des salariés corses, sacrifiés sans scrupule, et au mépris du bien-être des passagers insulaires ». Et de pointer des conséquences qui selon le syndicat découle directement de cette nouvelle organisation : « Multiplication des retards, difficultés accrues pour la prise en charge des passagers à particularité, files d’attente interminables aux bornes d’enregistrement et à l’embarquement ». « Le quotidien des voyageurs est désormais un véritable parcours du combattant », regrettait alors FO Air Corsica et l’Union départementale FO de Haute-Corse en fustigeant : « Cette décision est d’autant plus incompréhensible que l’entreprise prestataire continentale choisie, Alyzia, remplace des agents d’Air Corsica expérimentés en pleine saison estivale – période de trafic intense – par du personnel novice, peu formé aux spécificités du service « passage » d’Air Corsica. Leurs méthodes de travail, éloignées des procédures internes habituelles, désorganisent les flux de passagers et compliquent l’ensemble du parcours client ».

Une situation qui selon les responsables du syndicat aurait de plus eu un impact direct sur les agents d’Air Corsica à qui étaient jusqu’ici dévolues ces missions, qui seraient « profondément éprouvés » et peineraient « à comprendre comment la direction d’Air Corsica – avec la bénédiction de la Collectivité de Corse – a pu les trahir à ce point ». « Qu’en est-il de la priorité à l’emploi local ? Qu’en est-il des engagements pris envers les Corses, au sein d’une entreprise financée en grande partie par de l’argent public corse, censée œuvrer pour le service des Corses ? », écrivait encore FO Air Corsica. 
 
Face à cette mise en cause, Pierre Muracciole, le président du directoire d’Air Corsica confirme que la compagnie a bien procédé à l’externalisation d’une « petite parte de son activité passage » – « l’enregistrement et l’étiquetage des bagages pour l’essentiel » – sur les escales de Marseille et Nice et qu’« un certain nombre d’anomalies de traitement des passagers » a fait l’objet de remontée depuis le début de l’été.  « Il est vrai que des passagers se sont plaints de ne pas avoir l’accueil habituel. C’est bien entendu regrettable, mais c’est aussi normal lorsqu’on transfère une activité qu’il y ait une période de transition. Il faut que le personnel du prestataire apprenne. Il y a une montée en charge et d’énormes progrès ont été fait depuis début juillet. Les problèmes ont été identifiés et résolus, notre sous-traitant a mis des moyens supplémentaires pour accompagner la montée en charge et tout ceci s’est fait de la façon la plus professionnelle possible », assure-t-il en notant que des évènements extérieurs et imprévus ont quelque peu compliqué la tâche. « Les premières semaines du mois de juillet ont été très éprouvantes à la fois pour nos passagers, mais aussi pour nos équipes. La conjonction de plusieurs évènements majeurs – la grève des contrôleurs aériens, les incendies à Marseille entraînant des retards et des annulations parfaitement imprévisibles – a fortement perturbé le début d’été », souligne-t-il.
 
Quant au choix d’externaliser cette activité dite de passage, le président du directoire de la compagnie aérienne rappelle que celle-ci est aujourd’hui « sous-traitée partout, sur tout le réseau Air Corsica ». « Il n’y avait qu’à Marseille et Nice que cette fonction était remplie par des agents d’Air Corsica. Y compris dans les quatre aéroports corses, cette activité était déjà sous-traitée depuis longtemps. Ce n’est donc pas quelque chose qui est une innovation », pose-t-il en expliquant par ailleurs : « L’externalisation de cette activité sur Marseille et Nice fait partie de l’adaptation des métiers de l’aérien aux nouvelles normes. Ce sont des métiers qui ont vocation à disparaître progressivement car la digitalisation entre en ligne de compte ». Pour autant, il indique qu’aucun agent ne sera « laissé sur le carreau ».  « Les agents que nous avions dans les escales qui ont vu leur mission transférée au prestataire ont eu trois options. Ils ont tout d’abord pu prendre une rupture conventionnelle s’ils le souhaitaient, car il n’y a pas de départ forcé. Par ailleurs, ils ont pu être promus à un poste de superviseur s’ils ne voulaient pas bouger de Marseille ou Nice car nous avons voulu renforcer l’encadrement en créant des postes qui n’existaient pas. Et puis nous avons aussi ouvert 17 postes à haute valeur ajoutée en Corse sur lesquels ils pouvaient candidater pour rentrer sur l’île. C’est une opportunité qu’ils n’auraient pas eue autrement », détaille Pierre Muracciole.
 
En outre, il tient à affirmer qu’il est « faux de dire qu’Air Corsica veut externaliser les escales et que c’est une forme de désengagement ». « Il n’y a pas d’externalisation globale mais une évolution ciblée de l’organisation », précise-t-il, « C’est un chantier stratégique qui ne repose ni sur une logique économique, ni sur une volonté de réduction des effectifs. En parallèle, nous réinternalisons des tâches aujourd’hui sous-traitées comme les comptoirs ventes de Nice et Marseille, les devis de messe et de centrage des avions ». « Notre engagement en faveur de l’emploi en Corse est total. Les chiffres sont clairs : sur les périmètres concernés par la sous-traitance, les 2/3 des postes sont réinvestis avec un niveau de valeur ajoutée supérieur de l’ordre de 20% et un solde net positif d’emplois en Corse de 17 nouveaux postes à responsabilité », insiste-t-il encore en concluant : « Notre exigence sur la qualité de service ne fait pas de compromis, au contraire. Nous avons et dans les prochaines semaines, nous mettrons en place des équipes formées, y compris en langue corse, des superviseurs repositionnés sur le terrain, une meilleure information passagers qui sera très visible dans quelques semaines à l’issue de la campagne de mobilité en cours, et un surinvestissement assumé pendant la période estivale. L’objectif est clair : une qualité meilleure qu’avant en gardant la maîtrise sur les prestations rendues ».