Traité sur la pollution plastique : le point qui bloque tout depuis trois ans et menace encore les négociations

RYAN EDUARD BENAID / NurPhoto via AFP

Traité sur la pollution plastique : le point qui bloque tout depuis trois ans et menace encore les négociations

POLLUTION – Lutte contre la pollution plastique ? Oui, mais pas touche aux intérêts de certains. Les représentants de 175 pays se réunissent ce mardi 5 août à Genève en Suisse sous l’égide de l’ONU : ils ont dix jours pour tenter d’écrire ensemble le premier traité mondial visant à réduire le fléau de la pollution plastique, qui menace d’asphyxier la planète. Mais c’est encore plus facile à dire qu’à faire.

En discussion depuis trois ans, ce texte « juridiquement contraignant » pour les États « n’arrivera pas automatiquement », a prévenu dès lundi le diplomate qui préside les débats, l’Équatorien Luis Vayas Valdivieso, en recevant les représentants de plus de 600 ONG qui suivent les débats.

Sur fond de tensions géopolitiques et commerciales exacerbées, cette session supplémentaire de négociations intergouvernementales – baptisée CIN5-2 – a été ajoutée après l’échec des discussions menées à Busan en Corée du Sud fin 2024. Un groupe de pays producteurs de pétrole y a bloqué toute avancée.

Intérêts divergents

Et depuis trois ans, ce sont toujours eux qui bloquent l’avancée du traité, avec toujours le même point de dissension : la question de la production. Si une majorité des 175 pays emmenés par la « coalition de haute ambition » (qui regroupe 71 États dont ceux de l’Union européenne) veut un texte qui établit la réduction de la production de plastique, un bloc de pays producteurs de pétrole s’y oppose.

Ce groupe minoritaire, mené par l’Arabie saoudite, la Russie et l’Iran, veut que le traité soit cantonné à la question de la gestion des déchets et au recyclage. À chaque rencontre depuis 2022, ils brandissent leur droit de veto pour s’opposer à un texte final qui ferait mention d’une baisse de production. « L’objet de ce traité est d’en finir avec la pollution plastique, pas avec le plastique en soi », avait clamé en décembre dernier le délégué du Koweït lors de la précédente plénière. Comme le souligne Le Monde, l’Arabie saoudite considère le plastique comme « un nouveau gisement face aux incertitudes sur la demande mondiale en pétrole. »

De l’autre côté, le Rwanda et le Pérou, deux pays moteurs de la coalition, proposent, eux, une réduction de 40 % entre 2025 et 2040.

Un « chemin » pour arriver au traité

En mars 2022, les 175 pays avaient adopté une résolution qualifiée d’« historique » qui fixait pour objectif d’aboutir d’ici fin 2024 à un premier traité juridiquement contraignant pour éradiquer la pollution plastique et le danger global qu’elle représente pour l’environnent, le climat et la santé humaine.

Mais depuis, malgré les plénières de 2023 et 2024 à Busan en Corée du Sud, le processus se retrouve bloqué par cette poignée de pays pétroliers dont les intérêts divergent du but principal de ce traité.

« Est-ce que les choses vont être faciles ? Non. Est-ce qu’elles seront simples ? Non. Y a-t-il de la complexité ? Oui. Est-ce qu’il y a un chemin pour arriver à un traité ? Absolument », a indiqué à l’AFP la directrice exécutive du Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE) Inger Andersen, qui organise les débats.

Si rien n’est fait, la pollution plastique pourrait tripler dans le monde d’ici 2060, après également un triplement de la production mondiale à 1,2 milliard de tonnes contre 460 millions de tonnes en 2019, selon un calcul de l’OCDE.