Refaire l’histoire avec des « si » : tel est le principe de l’uchronie, genre dans lequel les événements passés d’une vie, d’un pays ou d’un personnage historique sont changés afin de créer un univers narratif alternatif. Du film Un jour sans fin aux BD Jour J, ce schéma narratif a fait recette, et doit une partie de son succès aux écrivains de SF qui en ont forgé l’histoire. Voici le top des livres de ce courant.

Et si on refaisait l’histoire d’Anthony Rowley et Fabrice d’Almeida (2009)

Avant d’être un genre littéraire, l’uchronie fut d’abord un exercice de pensée des historiens : dès Hérodote, le fait de raconter un événement qui se serait produit en fonction d’une « divergence » a été conscientisé dans les sciences humaines. De temps à autre, les spécialistes de telle ou telle période s’y adonnent encore. Et si on refaisait l’histoire, essai d’historien, contient seize « scénarios » sur lesquels on peut méditer et imaginer, à son tour, en quoi notre continuité historique repose sur certains événements : la réussite de la fuite de Louis XVI, la chute de l’État d’Israël pendant la guerre du Kippour ou la défaite de Charles Martel à Poitiers sont autant de « points de divergence » que les auteurs explorent dans cet essai idéal pour entrer en uchronie.

La Patrouille du temps de Poul Anderson (1960)

Le thème du voyage dans le temps, en particulier dans le passé, cher à la science-fiction, a profondément nourri la littérature uchronique : dans La Patrouille du temps, de Poul Anderson, les êtres humains du futur réussissent à voyager au gré des époques. Ils mandent différentes personnes pour empêcher des changements dans l’histoire. Véritable police anti-uchronie, ces agents se distinguent dans une série de nouvelles qui imaginent des divergences à différents moments de notre histoire… Un classique de la SF vintage qui flirte avec l’uchronie !

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Pavane de Keith Roberts (1968)

Avec PavaneKeith Roberts nous place d’emblée dans le comble de l’uchronie littéraire : à la suite d’une divergence avec l’Histoire telle que nous la connaissons, l’univers d’un livre devient un monde entièrement parallèle. Dans ce récit, on mesure les conséquences de la domination de l’Église catholique sur l’Angleterre et ses colonies au XVIe siècle, dans une série de nouvelles qui se déroulent au XXe. L’Inquisition a veillé à ce que les technologies n’évoluent que très lentement, et le pouvoir du Pape étend son influence dans le monde entier. Seule une poignée de révolutionnaires tente de bouleverser cet étrange ordre établi, par lequel Keith Roberts réussit pleinement l’exercice de montrer une réalité lointaine pour mieux parler de la nôtre…

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Le Maître du Haut Château de Philip K. Dick (1962)

Pour sa seule uchronie véritable, le très alternatif auteur SF Philip K. Dick a voulu révolutionner le genre. Si le point de divergence choisi est assez peu original (la victoire de l’Axe sur les Alliés amène les États-Unis à être coupés en deux zones d’occupation, japonaise et nazie), c’est le traitement de cette réalité fictive qui distingue Le Maître du Haut Château du reste de la production. En suivant la recherche d’un livre étonnant, qui renfermerait la vérité sur l’histoire de la Seconde Guerre mondiale, en multipliant les allusions au Yi King, en réfléchissant sur notre rapport au réel, enfin, Dick fait de l’uchronie un support pour sa perception hallucinée du monde, et offre un récit qui figure parmi ses chefs d’œuvres.

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Roma Aeterna de Robert Silverberg (2003)

Le maintien dans le temps de civilisations antiques ou anciennes figures parmi les tropes de l’uchronie. À ce petit jeu, Rome, avec son Empire et son héritage culturel, excite très souvent les imaginaires. Robert Silverberg en donne l’exemple canonique avec Roma Aeterna, ou la survie d’une civilisation latine sur près de 1500 ans. D’une nouvelle à l’autre, l’auteur imagine la succession des empereurs, le rapport de la religion romaine avec les monothéismes méditerranéens, plus tard la révolution industrielle, dans un recueil particulièrement dense, qui se lit comme une Histoire alternative de l’Europe autant que comme une fiction spéculative.

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Rêves de Gloire de Roland C. Wagner (2011)

En partant d’une issue différente à la guerre d’Algérie – avec Alger devenant une ville internationale mêlant Français et Algériens – Roland C. Wagner a souhaité triturer au maximum l’uchronie dans Rêves de Gloire, l’un de ses meilleurs livres. Car non seulement la situation géopolitique du Maghreb y était changée, mais aussi l’horizon culturel de la région. L’écrivain fait en effet apparaître le rock psychédélique dans la Casbah (et non, comme dans la réalité, en Californie), et le cortège de drogues hallucinogènes qui va avec. L’occasion de rendre hommage à la contre-culture des sixties dans un récit (très réussi) qui mêle policier, espionnage et géopolitique.

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Le Complot contre l’Amérique de Philip Roth (2004)

Comme l’ont démontré Eric-Emmanuel Schmitt (La Part de l’autre) ou Laurent Binet (Civilizations), l’uchronie a séduit de nombreux auteurs de littérature blanche. Tel est le cas aussi de Philip Roth, qui, dans Le Complot contre l’Amérique, narre l’arrivée au pouvoir aux États-Unis d’un candidat pronazi (Charles Lindbergh, au tournant des années 1940. Et l’auteur de Portnoy et son complexe de dépeindre, à travers le portrait d’une famille juive du New Jersey, le désastreux arrière-fond d’un pays basculant dans l’antisémitisme et la réaction. L’un des brûlots d’un auteur majeur.

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Des racines blondes de Bernardine Evaristo (2023)

Un monde dominé par les grandes civilisations africaines, et dans lequel les Blancs sont esclaves des maîtres Noirs ? C’est le monde inversé que Bernardine Evaristo dépeint dans Des racines blondes, une uchronie récente engagée et passionnante. L’autrice se sert de son univers de fiction pour mieux évoquer le sujet universel de l’esclavage et de la domination.

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Chroniques des années noires de Kim Stanley Robinson (2002)

Spécialiste de la science-fiction tendance hard (notamment avec sa trilogie de Mars), Kim Stanley Robinson a apporté le même soin documentaire à l’uchronie Chronique des années noires. Le point de divergence ? La peste noire du XIVe siècle décime davantage l’Europe, qui n’a plus aucun rôle dans l’Histoire qui suit. La chronologie alternative déployée voit donc la Chine, l’Inde et le monde islamique imposer leurs visions du monde, le temps d’un roman exotique et qui valorise l’ouverture d’esprit et le multiculturalisme.

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Replay de Ken Grimwood (1986)

De La Vie est belle de Capra, à Mr. Nobody de Jaco Van Dormael, en passant par Un jour sans fin ou L’Effet papillon, l’uchronie « personnelle » n’affecte pas le monde entier, mais plutôt un ou plusieurs héros autorisés ou forcés à revivre des événements passés autrement ou à imaginer leur vie si tel choix avait été différent. Ce type de films a aussi son équivalent littéraire : dans Replay de Ken Grimwood, un homme se retrouve dans une boucle temporelle : il meurt systématiquement à 43 ans, mais « ressuscite » à 18 ans, avec les souvenirs de sa vie antérieure. D’un « replay » à l’autre, le personnage principal teste différents scénarios sur sa propre existence, le temps d’un roman uchronique innovant.

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