Par

Maréva Laville

Publié le

5 août 2025 à 18h46

Un an. C’est le temps qu’il aura fallu pour revoir le Schéma départemental d’accueil et d’habitat des gens du voyage (SDAHGV) – ainsi renommé en ajoutant « habitant », NDLR – applicable lors des cinq années à venir. Car le sujet est épineux. Toujours plus nombreux et de plus en plus sédentaires, les gens du voyage ravivent chaque année des tensions chez les habitants de la Haute-Garonne. Comment les accueillir ? Où ? De quelles façons ? Avec quelles obligations et quelles recommandations ? Tout ce qu’il faut savoir sur le nouveau plan d’accueil des gens du voyage en Haute-Garonne pour 2025-2030.

+ 100 % de passage de caravanes en trois ans

5 510 caravanes, contre 2 690 en 2021. En trois ans, la population de gens du voyage de passage en Haute-Garonne à l’occasion de grands rassemblements évangélistes a presque doublé, atteignant même un pic historique l’an dernier.

Mais le nombre de places proposées, lui, reste identique et toujours en deçà de ce que demandait l’État aux EPCI chargés d’organiser l’accueil des gens du voyage entre 2020 et 2025.

Le nombre de caravanes reçues en Haute-Garonne a doublé entre 2021 et 2024.
Le nombre de caravanes reçues en Haute-Garonne a doublé entre 2021 et 2024. (©Capture d’écran communiqué SDAHGV 2025-2030)Pour seulement deux aires de grand passage officielles

En Haute-Garonne, on ne compte que deux aires officielles de grand passage fixe : deux hectares à la Snède (Toulouse Métropole) et deux autres hectares à Villeneuve-de-Rivière (Communauté de communes Cœur et Couteaux du Comminges). Deux autres aires provisoires ont vu le jour à Labège et Blagnac durant la période estivale tandis qu’une aire non-officielle existe à Plaisance-du-Touch.

C’est concrètement, pas assez. Ni en nombre ni en espace. Selon nos calculs, la Haute-Garonne aurait besoin d’environ 1 000 places supplémentaires, au minimum. Avec ses deux aires fixes et deux aires provisoires, le département ne peut donc recevoir que 697 caravanes actuellement. À partir de cette année 2025 et jusqu’en 2030, l’État a pour objectif de pouvoir en recevoir entre 1 000 et 1 200.

Quatre aires minimum réclamées par l’État et le Département

Pour ce faire, les 14 territoires du département sont appelés à construire un total de quatre aires de grand passage et une cinquième en recommandation (contre deux existantes aujourd’hui). Celles-ci devront proposer une surface minimum de quatre hectares pour accueillir jusqu’à 200 « résidences mobiles » chacune. Le schéma départemental cible notamment cinq EPCI.

Dans les années à venir, devront naître des aires de grand passage dans la Métropole de Toulouse, dans le Sicoval, dans l’agglomération muretaine et de façon mutualisée, entre le Bassin Auterivain, le Volvestre et le Cœur de Garonne, au sud de Toulouse. L’aire recommandée quant à elle est envisagée dans la communauté de commune du Grand Ouest Toulousain. Mais où pourraient-elles alors s’installer précisément ?

Voici où sont ciblées les futures aires de grand passage pour 2025-2030.
Voici où sont ciblées les futures aires de grand passage pour 2025-2030. (©Capture d’écran SDAHGV 2025-2030)

Dans la métropole de Toulouse, c’est Aussonne qui était ciblée, sur un terrain localisé à côté d’une exploitation maraîchère. Mais le terrain n’est, depuis le mois d’avril dernier, plus à vendre, comme le rapportait dans cet article Actu Toulouse. Il va pourtant bien falloir trouver une solution. Et c’est dans ce cadre-là qu’il convient de notifier une nouveauté qui pourrait chambouler quelques plans…

Les petites communes incitées à participer

Dans son nouveau schéma du département d’accueil et d’habitat des gens du voyage, l’État et le Département incitent les communes comptant entre 4 500 et 5 000 habitants à participer.

Jusque-là, en dessous de 5 000, elles étaient automatiquement épargnées. À ce titre, le SDAHGV intègre désormais cinq communes : Cazères (4 851 habitants), Gratentour (4 786 habitants), Pechbonnieu (4 552 habitants), Castelmaurou (4752 habitants) et Bouloc (4 773 habitants). Si elles n’ont pas l’obligation légale de participer, ce n’est en revanche pas le cas des trois nouvelles communes passées au-dessus du seuil des 5 000 habitants, que sont Villefranche de Lauragais et Roques.

Ces trois dernières peuvent donc, au même titre que les autres, être ciblées par leurs territoires pour recevoir une aire de grand passage et doivent également pouvoir proposer 20 places d’ancrage ou de passage.

Le besoin de sédentarité à répondre

Car c’est l’autre grand axe de travail du schéma départemental concernant les gens du voyage : l’ancrage. La Haute-Garonne doit s’adapter au nouveau mode de vie plus sédentaire des gens du voyage.

« 90 % des places actuelles sont sédentarisées », faute de solutions alternatives, remarque le Département. Or, « le manque de places et la sédentarisation par défaut entraînent des stationnements illicites récurrents », reconnait l’institution.

Faute de possibilités, et dans des aires de passage trop vétustes, les gens du voyage s'installent souvent sur des terrains de façon illégale.
Faute de possibilités, et dans des aires de passage trop vétustes, les gens du voyage s’installent souvent sur des terrains de façon illégale. (©Maréva Laville / Actu Toulouse)Des formes d’habitats pour les gens du voyage

C’est probablement l’autre changement le plus majeur de ce nouveau plan pour 2025-2030 : offrir une logique d’habitat et non plus seulement de stationnement. Pour certaines infrastructures, on parle même de bail locatif. Ce serait le cas notamment pour les habitats adaptés (logements sociaux compatibles avec une caravane) et les terrains familiaux locatifs publics (TFL). Les aires permanentes d’accueil, quant à elles, logent les caravanes pour une durée de trois mois maximum (ou sept mois si dérogation).

Dans le nouveau SDAHGV, l’État et le Département prescrivent le passage de 14 places d’ancrage existant sur quelques sites seulement, dont Toulouse et Tournefeuille, à 398 places et 166 supplémentaires recommandées.

Des actions sociales

Plus percutent en ce sens, 13 actions sociales (contre cinq auparavant, NDLR) ont été ajoutées au SDAHGV. Domiciliation, inclusion numérique, santé mentale, scolarisation ou insertion professionnelle figurent parmi les priorités.

Par exemple, le Département entend pérenniser les transports scolaires vers les collèges depuis les aires permanentes d’accueil, les terrains familiaux locatifs et les habitats adaptés. Il souhaite également soutenir les auto-entrepreneurs parmi les gens du voyage. Autre volonté : réduire les inégalités d’accès aux soins, alors que l’espérance de vie des gens du voyage reste inférieure de 8 à 11 ans à la moyenne nationale.

Plus que jamais, la Haute-Garonne amorce un tournant dans son accueil des gens du voyage. Plus humaniste, plus ambitieux… Reste à savoir comment ce schéma sera accueilli et appliqué pour offrir, peut-être enfin, une solution aux installations illégales tant guettées par les habitants du département.

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