Écrit par
Cindy Duffay
et
Charles Lemercier
Publié le06/08/2025 à 20h05
Le 6 août 2025, plusieurs familles en situation irrégulière, avec leurs enfants, ont été expulsées d’un appartement à Limoges. Conscientes qu’elles dormiront dehors ce soir, elles cherchent désespérément un hébergement d’urgence et un peu de nourriture.
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« T’as pas peur de dormir dehors ce soir ? – Non, ça va, j’ai juste peur des cafards », racontent deux petites filles, qui errent sans abris avec leurs parents. Six adultes avec onze enfants en situation irrégulière ont été expulsés ce matin, le 6 août 2025, avenue du Louyat, à Limoges (Haute-Vienne). Ces familles occupaient l’appartement de manière illégale. Les enfants jouent, comme si de rien n’était, mais ce soir, ils dormiront dans la rue. Les familles cherchent désespérément un hébergement d’urgence.
Certaines personnes, arrivées il y a huit ans, ont déposé une demande de séjour, mais d’autres, arrivées il y a peu, ont conscience qu’elles n’obtiendront pas de document. « Je fais du bénévolat dans la Maison des Droits de l’Homme, je suis venu ici depuis récemment donc je n’ai pas le droit. Si je dépose ma demande, automatiquement, je reçois l’OQTF (Obligation de quitter le territoire français) », raconte Miloud, qui vient d’être expulsé. Impossible donc de trouver un logement, même avec des enfants scolarisés.
D’origine algérienne, Miloud, père de trois enfants, est arrivé en France en 2022.
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© Angèle Batailler – France Télévisions
D’origine algérienne, il est arrivé en France en 2022. Père de trois enfants, il a été hébergé pendant un an et demi par les urgences, puis a trouvé un squat à Limoges. « On ne trouve pas une solution, nous sommes à droite à gauche, cette fois-ci, ils nous ont mis dehors dans la rue », raconte-t-il.
Nous les adultes, on se débrouille, je peux même dormir sur un banc ou sous un arbre comme ça, je m’en fous, mais les enfants ne peuvent pas.
Les enfants jouent, comme si de rien n’était, le 6 août 2025, mais ce soir, ils dormiront dans la rue.
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© Angèle Batailler – France Télévisions
Miloud, qui n’a pas la possibilité de travailler, tente malgré tout de s’en sortir : « Je fais le nettoyage des voitures, mais le travail, il y en a peu, seulement de temps en temps, je lave une voiture, donc je n’arrive pas par exemple à louer un appartement. »
Mahdgouba, elle, est arrivée en France en 2017, à Perpignan. Elle a déposé un dossier à la préfecture, qui a été refusé. Ensuite, elle a déménagé à Limoges et a tenté de joindre le 115, mais sans succès. »C’est la même chose, il n’y a pas de place, j’étais obligée de venir dans un squat juste pour mettre mes enfants sous un toit pour dormir », souligne-t-elle.
Je vais dormir dehors cette nuit-là, je n’ai pas de famille, je n’ai pas d’amis, je n’ai rien.
Mère de deux enfants, elle s’inquiète pour ce soir. Cet après-midi, le 6 août, elle a tenté de rappeler le 115 : « Je suis dehors avec mes enfants, j’étais dans un squat, et la police est venue ce matin, ils nous ont fait sortir, donc je suis avec deux enfants, avec mon bagage, on est tous dehors maintenant », explique-t-elle par téléphone.
Mahdgouba, mère de deux enfants, essaie d’appeler le 115, le 6 août, pour trouver une solution d’urgence pour dormir.
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© Angèle Batailler – France Télévisions
Les appels d’urgence lui ont répondu qu’aucune solution n’est disponible, que toutes les places sont occupées, et qu’elle doit rappeler le lendemain. L’attente pour obtenir un hébergement d’urgence peut parfois s’étendre sur plusieurs mois, voire une année entière.
Hébergées à l’hôtel pendant des années, les familles se sont ensuite retrouvées en squat. En mai 2025, Limoges Habitat a alors engagé une procédure d’expulsion. « J’ai proposé à chacune des familles qui étaient sur place de les reloger moyennant le fait qu’elles s’engagent à retourner dans leur pays parce qu’il s’agit de familles en situation irrégulière sur le territoire, elles ont toutes refusé », explique François Pesneau, préfet de la Haute-Vienne.
Mais pour Mahdgouba, quitter le pays n’était pas une option envisageable : « Ils nous ont dit qu’on devait quitter la France, ils vont nous aider pour faire les démarches, une aide financière aussi, ça fait huit ans que je suis ici, je viens de déposer un dossier à la préfecture, donc j’ai refusé. »
Cet après-midi, le 6 août, les familles étaient dehors avec toutes leurs valises.
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© Angèle Batailler – France Télévisions
Par la suite, le préfet de Haute-Vienne explique avoir envoyé une lettre à chacune des familles : « Je leur ai envoyé un courrier, le 1er juillet, en leur disant que si elles refusaient l’offre que je leur proposais, d’être logés afin de préparer leur départ, leur retour danse leur pays, il sera procédé à l’évacuation forcée du logement d’ici à la fin de l’été donc il n’y a pas d’effet de surprise, j’ai pris le temps, j’ai mis en place le dispositif. »
Les familles ont été expulsées avenue du Louyat, ce 6 août, à Limoges, en Haute-Vienne.
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© Angèle Batailler – France Télévisions
À partir de ce moment-là, je n’avais plus de voie alternative à l’expulsion et donc on a commencé l’opération, qui a commencé, ce matin, à 8 h 30 et s’est terminée aux alentours de 11 h 30, 12 heures.
François Pesneau
Préfet de la Haute-Vienne
« Si les enfants doivent dormir dehors, c’est le choix des parents de se maintenir en situation irrégulière. L’État a proposé de reloger les familles avec une aide financière, en attendant leur retour en Algérie, mais elles ont refusé », ajoute François Pesneau.
Ce 6 août, les parents sont à la recherche d’un toit d’urgence pour les enfants afin qu’ils puissent dormir.
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© Angèle Batailler – France Télévisions
Pour ces familles, la priorité est désormais de trouver un toit pour les enfants et de pouvoir se nourrir.