Alamy

On le surnommait « Superlungs » (« Superpoumons ») pour sa voix jugée exceptionnelle. Le chanteur et musicien Terry Reid vient de mourir à l’âge de 75 ans. Souffrant d’un cancer depuis plusieurs mois, il avait annulé récemment tous ses concerts en raison de ses problèmes de santé. Le guitariste Joe Bonamassa a été l’un des premiers artistes à réagir, saluant le départ d’« un des plus grands ». Si son nom ne vous dit rien, sa carrière est intimement liée à trois des plus grands groupes de rock des années 60 et 70.

Terry Reid se fait un nom dès 1966. Alors âgé seulement de 17 ans, il rejoint le groupe Peter Jay and the Jaywalkers en tant que chanteur et assure la première partie de la tournée des Rolling Stones cette année-là. Après la dissolution de la bande, il se lance en solo et ouvre les concerts américains du groupe Cream, avec Eric Clapton, en 1968. C’est alors qu’il attire l’attention de Jimmy Page.

Le player Dailymotion est en train de se charger…

Il refuse d’être le chanteur de Led Zeppelin et Deep Purple !
Alors guitariste des Yardbirds, Jimmy Page propose à Terry Reid de rejoindre, en tant que chanteur, son nouveau groupe : Led Zeppelin. Reid, qui s’apprête à repartir en tournée américaine avec les Rolling Stones, refuse. « Je ne savais pas quoi faire. Au final, j’ai renvoyé la balle dans le camp de Jimmy. Je lui ai dit « Tu devrais parler à Keith [Richards] et lui dire que je n’irai pas » » rappelait-il au magazine Classic Rock : « Mais Jimmy a refusé et a dit « Je ne veux pas qu’il me tire dans la jambe ». Déjà à l’époque, Keith avait une réputation. J’ai donc fini par aller en Amérique avec les Stones ». Il lui recommande à la place un jeune chanteur venu de Birmingham, Robert Plant, qui prendra sa place. Et le reste appartient à l’histoire. Terry Reid déclarait l’année dernière au Guardian : « J’ai contribué à la moitié du groupe, j’ai fait ma part du boulot ! ».

Un artiste à la carrière fascinante
Au même moment, l’artiste anglais refuse également l’offre de Ritchie Blackmore pour rejoindre Deep Purple comme nouveau chanteur. C’est finalement Ian Gillan qui prendra sa place. Tournant en première partie de Jethro Tull ou Fleetwood Mac, Terry Reid poursuit en parallèle sa carrière solo. Son troisième album « River », sorti en 1973, est un échec commercial mais lui vaut les éloges de la presse musicale. Dans les années 80, il met sa carrière de chanteur sur pause et devient musicien de session. « Ça paye mieux » assurait-il avec humour. On le retrouve notamment aux crédits d’albums de Bonnie Raitt, DJ Shadow, Joe Perry d’Aerosmith ou Don Henley. Dans les années 90, il sort son dernier album « The Driver » et travaille avec un producteur alors inconnu, un certain Dr. Dre. « Il était fasciné par [mon album] « Seed of Memory » et m’a invité dans son studio où il l’a retravaillé avec des rappeurs. C’était une expérience fascinante » se remémorait-il.

Ainsi, s’il n’a jamais été une immense gloire populaire, Terry Reid était très respecté par l’industrie mais aussi ses pairs. La légendaire Aretha Franklin a d’ailleurs confié à son sujet : « Il y a uniquement trois choses qui se sont produites en Angleterre : les Rolling Stones, les Beatles et Terry Reid ». Quelques heures après sa disparition, Robert Plant de Led Zeppelin s’est fendu d’un message en hommage sur les réseaux sociaux : « Son enthousiasme et son soutien était incroyables à l’époque. (…) Il avait tout : un tel charisme, une voix, une tessiture. Ses chansons capturaient cette époque insouciante. Il était vraiment « Superlungs ». Il m’a catapulté dans un monde nouveau et intense qu’il a choisi de refuser. J’écoute maintenant son album « River » et je verse une larme pour mon frère d’armes ».