Il n’y a pas que le Scrabble ou les mots fléchés dans la vie des estivants. Plusieurs cahiers d’activités pour adultes proposent à leurs lecteurs de jouer avec la langue française et leur culture littéraire. “Télérama” en a testé trois. 
Illustration Malte Mueller/Getty Images/fStop
Publié le 07 août 2025 à 14h03
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Au début de l’été, Rihanna a trouvé du plus grand chic, lors de son passage en France, de photographier son bambin en train de feuilleter le fameux cahier de vacances Incollables (5-6 ans) à l’arrière de sa voiture. C’est dire à quel point ces livrets semblent devenus incontournables. Le phénomène ne se limite plus aux enfants depuis quelques années. Une panoplie de livrets d’été s’adresse désormais aux ados et aux adultes, brassant le voyage, les jeux (et les sports) intellectuels et autres distractions. Télérama a dénombré au moins trois d’entre eux consacrés au français et à la littérature, et a profité de quelques jours moins denses pour s’y essayer.
Le plus frais
Rapprocher Sappho de Taylor Swift, dire de la Renaissance « c’est vintage » ou imaginer une battle entre Eminem et Jean de La Fontaine… Martin Boujol va un peu loin. L’instagrameur de @la.nuit.sera.mots use de comparaisons parfois discutables, mais il donne un grand coup de frais à la littérature dans son cahier Et si on lisait, qui regorge de quiz, d’extraits et de tests. Sa première partie, sur les courants historiques, parvient à flatter l’estivant d’en savoir un peu et à lui donner le plaisir d’en apprendre un peu plus. On revisite chaque grande période littéraire avec devinettes, mots fléchés et réponses à relier, avant de s’arrêter sur les différents genres et quelques grands thèmes qui traversent toute la littérature. De petits encadrés offrent des extraits de classiques ou de grands livres contemporains. Certaines doubles pages thématiques laisseront hermétiques quelques lecteurs : la littérature de voyage ou le manga ne peuvent plaire à tout le monde. D’autres trouveront les thématiques trop proches du programme du collège et du lycée. Mais le résultat reste ludique, si le lecteur n’est pas trop susceptible.
On a aimé : faire les exercices avec son ado, à haute voix, pour se lancer dans des conversations sur nos livres préférés.
On a moins aimé : l’exercice « Vrai ou faux », qui laisse l’impression de pouvoir retenir des sornettes, à force de réfléchir aux différentes théories.
Et si on lisait ? Cahier d’activités pour les amoureux des livres, par Martin Boujol, éd. Solar, 80 p., 10,95 €.
Le plus classique
Enseignante en lettres classiques en collège REP +, Karine Dijoud a donné un petit frère à son cahier des amoureux de la langue française de l’année dernière. Qu’est-ce qui ne va pas dans « obnibuler » ou « arborigène » ? Quelle est la signification exacte de telles locutions latines ? Écrit-on -ar ou -ard à la fin des mots suivants… L’instagrameuse de @lesparentheseselementaires nous plonge au cœur des multiples difficultés de la langue de Molière, à travers moult exercices d’orthographe, d’étymologie, et même des rébus. On y retrouve les connaissances de français que nous devrions tous posséder et qui finissent toujours par nous manquer. Le niveau de difficulté est inégal, mais c’est tant mieux : cela permet de réussir sur une page, après avoir échoué sur la précédente.
On a aimé : chasser des fautes introduites dans des extraits de textes classiques, pour le plaisir d’être du côté du correcteur de la dictée et celui de découvrir, ou de redécouvrir, de grands auteurs.
On a moins aimé : mais pourquoi n’avait-on jamais remarqué que la conjugaison peut être aussi pénible ?
Le Cahier d’activités. Quiz, anagrammes, charades, jeux de mots… Pour les amoureux de la langue française, par Karine Dijoud, éd. Gallimard, 64 p., 10,95 €.
À découvrir aussi chez Gallimard, dans la collection Série noire, pour les amoureux du polar, le Cahier d’enquêtes. Huit mystères à résoudre, des dizaines de jeux pour y parvenir, par Nicolas Bonnefoy.
Le plus facétieux
Sur la couverture, ce n’est pas Einstein mais Molière qui tire la langue. Le ton est donné : les Linguistes atterrées proposent de la culture pointue… et de l’impertinence. Comme dans cette grille de mots mêlés où ils invitent les estivants à trouver les mots absents de la 9ᵉ édition du dictionnaire de l’Académie française qui se voulait pourtant « ancré dans son époque ». Si « bisous », « cool » et « meuf » n’y figurent pas, comment croire en effet qu’on y trouve les plus récents « féminicides » ou « vapoter » ? Le livret ne se contente pas d’éreinter l’institution française, mais y décrypte, à travers des jeux, tout autant l’ancien français qu’un texte d’Aya Nakamura ou les questions de genre, avec un regard résolument ouvert et inclusif, mais jamais surplombant. Si certains exercices peuvent sembler ardus, l’humour que les auteurs mettent à défendre leurs propositions rend l’ensemble assez plaisant.
On a aimé : le ton très complice et les exercices modernes sur le verlan ou le textisme (langage SMS), vus nulle part ailleurs.
On a moins aimé : passer beaucoup de temps dans les pages de réponses, car il s’agit plus souvent d’apprendre que de jouer.
Le Cahier d’activités. Langue française, par les Linguistes atterrées, éd. de l’Atelier, 80 p., 12,50 €.
AMBIANCE…
Installés dans une salle de réunion, les journalistes de Télérama soufflent beaucoup en ouvrant les cahiers d’activités. « Y a beaucoup trop de lecture, ça fait pas très vacances », chuchote-t-on dans un coin. Quand une anonyme échoue à conjuguer le verbe « boire » au passé simple du subjonctif (Gallimard), on frôle la démission. Puis une détente s’installe. On entend réciter « wesh » sur tous les tons pour répondre à une question des Linguistes. « Ça va, j’ai tout », se rassure la cheffe du service Livres sur la double page « Prix Nobel » du cahier des éditions Solar. À côté d’elle, la rédactrice en chef adjointe Cinéma se déride sur les rébus d’adaptations en films chez les Linguistes. Certains sortent les smartphones pour tricher (les réponses sont pourtant dans les dernières pages). On s’y met à deux, à trois, on rit. Verdict : « Finalement, on s’est amusé, ça te rend curieux. Et les cahiers se complètent. »
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