Par
Léa Pippinato
Publié le
7 août 2025 à 17h35
« Attends, tiens-toi tranquille… » Claire, 32 ans, incline la tête de Pablo, son croisé berger sable de quatre ans, pour mieux viser l’arrière des oreilles. Un pschitt, deux autres sur le poitrail. « Avant, il se grattait sans arrêt, surtout au retour des balades. Là, ça va mieux. » À l’ombre des arbres du parc Montcalm, autour de cette scène banale, une dizaine de chiens trottinent sur l’herbe. Un autre maître sort lui aussi un spray de son sac à dos. L’été montpelliérain n’épargne personne.
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Selon le dernier bulletin de l’EID (Entente interdépartementale pour la démoustication) Méditerranée, plus de 200 hectares de zones humides ont été traités mi-juillet dans l’Hérault. Pluies, chaleur, stagnation d’eau : les moustiques prolifèrent. Et tous ceux qui piquent l’homme peuvent aussi s’en prendre au chien. La riposte s’organise… et elle s’achète en rayon.
Des rayons fournis, une demande qui explose
Dans l’animalerie Kokoon, située quartier Prés d’Arènes, le phénomène ne fait aucun doute. Deux linéaires entiers sont consacrés aux antiparasitaires. Sprays, pipettes, colliers : les boîtes blanches aux étiquettes vertes s’alignent au milieu des harnais et des jouets. « On a vu les ventes tripler depuis avril », confirme Malick Sissoko, responsable de magasin. « Beaucoup de gens viennent avec une photo ou une compo lue en ligne. Certains veulent du naturel, d’autres du costaud. »

hez Kokoon, les rayons anti-moustiques se remplissent aussi vite qu’ils se vident. (©Métropolitain / LP)
Le constat est le même dans les petites structures. Fanny, fondatrice du concept store canin Chez Eddy, en centre-ville, a lancé son propre spray artisanal à base de lavande et de citronnelle. « On me le demandait sans arrêt. Dès que je l’ai mis en rayon, j’en ai vendu une dizaine rapidement. Maintenant, j’en vends chaque semaine, toute l’année. » En pharmacie, l’offre est discrète mais bien présente. À la Grande Pharmacie des Facultés, les pipettes sont reléguées en bas d’un rayon. « Pourtant, elles partent dès le printemps, souvent en prévention », assure Pauline, préparatrice de commandes. « Les gens veulent compléter les traitements classiques avec une protection légère, simple à appliquer. »
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« On me le demandait sans arrêt. Dès que je l’ai mis en rayon, j’en ai vendu une dizaine rapidement. Maintenant, j’en vends chaque semaine, toute l’année. »
Fanny
Fondatrice du concept store canin Chez Eddy
Le succès dépasse les comptoirs. Entre les pelouses tondues des jardins publics et les chemins de garrigue aux abords de la ville, les répulsifs s’invitent entre la laisse et le sac à friandises. Pour mieux cerner les pratiques, dix propriétaires canins ont été interrogés. Deux n’utilisent rien. Quatre ont recours à un spray du commerce, deux à un collier antiparasitaire. Les autres alternent selon la météo ou l’heure de sortie : recettes maison ou vêtements. Sur une table de pique-nique, une étudiante secoue un petit flacon translucide. L’odeur est fraîche, citronnée. « Ça fait fuir pas mal de trucs, moustiques compris », plaisante-t-elle. Yasmine, en master d’écologie, fabrique elle-même le répulsif qu’elle applique sur Plume, sa jeune chienne adoptée à la SPA. « Citronnelle, vinaigre de cidre, un peu d’huile végétale. Ce n’est pas infaillible, mais au moins, je sais ce que je lui mets. »
Colliers, pipettes… et prudence
Tout le monde ne sort pas l’artillerie lourde. Jean-Pierre, retraité, promène Loki, son labrador, les mains dans les poches, une balle en mousse pour seul accessoire. « J’ai essayé une fois, un spray acheté en jardinerie. Ma chienne d’avant a éternué pendant une heure. Depuis, je fais simple : je vise les moments où les moustiques sont moins voraces. » Sophie a elle aussi abandonné l’idée. « L’un sentait trop fort, l’autre ne faisait rien. À la fin de l’été, j’en avais trois entamés au fond du placard. »
Leur réserve est partagée par les professionnels de santé animale. Daniel Leclercq, vétérinaire installé dans le quartier Saint-Martin, déconseille l’usage de sprays : « Je n’en propose aucun à la vente. Ce sont souvent des produits cosmétiques sans autorisation de mise sur le marché. Certains peuvent provoquer des irritations, d’autres sont tout simplement inefficaces. « Pour une protection durable, il recommande « des colliers antiparasitaires comme Scalibor ou Seresto, qui ont prouvé leur efficacité contre les moustiques, ou certaines pipettes spécifiques, à condition qu’elles soient bien choisies. » Et de rappeler que toutes les piqûres ne se valent pas : « En zone urbaine, il y a peu de risques. Mais si vous allez en garrigue ou le long du Lez, il faut penser à la leishmaniose. Là, pas de compromis. »
Mais au-delà de leur efficacité réelle ou supposée, ces flacons racontent autre chose. Un geste, répété sur le poil mouillé ou juste avant la balade, devenu réflexe. À Montpellier, troisième ville la plus dog-friendly de France, la place accordée au bien-être canin se renforce chaque été.Et le marché suit. Selon 6Wresearch, les produits de soin animal progressent de plus de 6 % par an en France, une tendance qui devrait atteindre 7 % d’ici 2028. À l’échelle mondiale, 65 % des consommateurs privilégient désormais des produits dits « bien-être » pour leurs animaux, d’après Global Growth Insights. Contre les moustiques, les maîtres ont plus d’un spray dans leur sac.
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