Six mois de prison avec sursis, 5 000 euros d’amende et trois ans d’inéligibilité : le tribunal correctionnel de Paris est allé au-delà des réquisitions du parquet, ce jeudi 7 août, en condamnant Hermano Sanches Ruivo pour abus de confiance et prise illégal d’intérêt.
L’ancien adjoint d’Anne Hidalgo en charge de l’Europe a été reconnu coupable d’abus de confiance pour des faits remontant au début 2013, et de prise illégale d’intérêts entre janvier 2015 et octobre 2020.
Il est reproché à cet homme politique, engagé depuis 2008 aux côtés d’abord de Bertrand Delanoë puis d’Anne Hidalgo, d’avoir participé à des délibérations attribuant des subventions à Cap Magellan, une association que lui-même avait contribué à créer en 1991 et pour laquelle il était devenu consultant rémunéré.
L’affaire avait éclaté en octobre 2021, lorsque ce Franco-Portugais de 59 ans avait été placé en garde à vue à la suite d’une dénonciation anonyme pour blanchiment de fraude fiscale. Quelques semaines plus tard, l’élu avait démissionné de ses fonctions d’adjoint, tout en conservant son siège au conseil du XIVe arrondissement.
La défense fait appel
Fin juin, le parquet avait requis trois mois de prison avec sursis pour la prise illégale d’intérêt, et la relaxe concernant les accusations d’abus de confiance. « Je suis très surprise, pour ne pas dire choquée, s’indigne ce jeudi l’avocate d’Hermano Sanches Ruivo, annonçant faire appel ce vendredi 8 juillet. Ce procès sert à se payer le Portugais de service. Mon client est peut-être maladroit mais malhonnête, sûrement pas. »
« Je le vis avec un profond sentiment d’injustice. Cette décision est pour moi incompréhensible, s’indigne pour sa part l’ancien élu socialiste, au Portugal au moment du délibéré. Comment puis-je être condamné pour abus de confiance alors qu’aucune structure n’a porté plainte, que je n’ai eu aucun bénéfice et que j’ai tout déclaré ? »
CAP Magellan au soutien
L’association CAP Magellan, dont la mission est de faciliter l’accès au travail pour des Français et Portugais dans les deux pays, avait renoncé à son statut de victime. Elle avait même adressé un courrier au tribunal pour défendre son ancien président. « Hermano Sanches Ruivo n’a, à aucun moment, abusé de notre confiance, bien au contraire : son action de salarié et consultant a permis de développer notre présence au Portugal et nous lui maintenons notre totale confiance. »
« Je ne suis pas Cahuzac et ces autres noms. On mélange encore des années où j’étais président et où je ne l’étais plus », poursuit ce jeudi Hermano Sanches Ruivo. À la barre, en juin dernier, ce dernier avait fait état d’une vie et d’une santé « clairement marquées » par cette procédure judiciaire. « Depuis 2021, j’ai vécu des années d’angoisse, de honte. On a remis en cause ma probité, alors que je suis un garçon loyal, altruiste et militant », plaidait-il.
« Je n’ai pas eu accès à mon dossier pendant plus de trois ans »
L’affaire avait débuté avec un redressement du Trésor public pour des salaires non déclarés. L’élu avait soldé sa dette, mais la mairie avait saisi sa commission de déontologie puis déclenché un article 40, mettant en marche la machine judiciaire. « Je n’ai pas eu accès à mon dossier pendant plus de trois ans et demi », dénonce cet homme politique qui avait contribué à tisser des liens entre Paris et Lisbonne.
Son avocate voit « de l’acharnement » dans un « dossier venu sur dénonciation anonyme » et « vide de tout détournement au profit de [son] client ». Lequel a également été condamné à verser un euro symbolique de dommages et intérêts à la Ville de Paris qui s’était constituée partie civile, ainsi que 1 500 euros pour ses frais de justice. L’appel de la défense relancera cette affaire qui a déjà coûté à Hermano Sanches Ruivo son poste d’adjoint… Et désormais son éligibilité pour les trois années à venir.