LUDOVIC MARIN / AFP
L’Algérie, ici représentée par son président Abdelmadjid Tebboune, reproche à la France de fuir ses « responsabilités ».
POLITIQUE – Jusqu’où iront les tensions entre la France et l’Algérie ? Les deux pays, qui ont une histoire commune et qui entretiennent d’importants liens économiques, n’en finissent plus de s’affronter par voie diplomatique. Dans une lettre envoyée le 6 août, Emmanuel Macron plaidait pour la suspension de l’accord de 2013 et appelait à « plus de fermeté » à l’égard d’Alger. En cause : le maintien en détention de deux ressortissants français, Boualem Sansal et Christophe Gleizes, ainsi que « l’inflexibilité » supposée de l’Algérie sur la question migratoire.
Un changement de braquet très mal reçu de l’autre côté de la Méditerranée. Ce jeudi 7 août, le ministère des Affaires étrangères algérien reproche à la France de fuir « ses responsabilités » dans le bras de fer qui anime les deux pays depuis un an. À l’entendre, Emmanuel Macron « fait porter tous les torts à la partie algérienne ». « Rien n’est plus loin de la vérité et de la réalité », tranche-t-il.
Concernant l’accord de 2013, qui vise principalement les détenteurs de passeports diplomatiques, donc une infime partie de ceux qui voyagent entre les deux pays, l’Algérie rappelle que « c’est la France, et elle seule, qui a été à l’origine d’une telle demande. En décidant la suspension de cet accord, la France offre à l’Algérie l’opportunité idoine d’annoncer, quant à elle, la dénonciation pure et simple de ce même accord ». Si cette coopération sur les visas venait à être enterrée, il est à craindre que la prochaine étape soit la remise en cause pure et simple d’un autre partenariat : l’accord de 1968.
Or celui-là est beaucoup plus déterminant. D’abord parce qu’il concerne plus de monde, mais aussi parce qu’il régit la circulation, le séjour et l’emploi des ressortissants algériens en France. En clair, les Algériens bénéficient aujourd’hui de conditions facilitées pour obtenir un titre de séjour, accéder à certains emplois ou rejoindre un proche en France. Cet accord avait été signé quelques années après l’indépendance algérienne, obtenue après une longue période de colonisation féroce et de guerre sanglante.
« Des ultimatums » lancés par la France ?
En outre, Alger accuse Paris de n’avoir « procédé que par injonctions, ultimatums et sommations » depuis l’été 2024. La crise avait éclaté juste après la reconnaissance par la France du Sahara occidental comme étant « sous souveraineté marocaine ». Ce qui avait déplu au voisin algérien.
La réplique d’Alger a en tout cas fait réagir au plus haut sommet de l’État, puisque le Premier ministre François Bayrou, qui ne prend pas de vacances en cette période estivale, a fait savoir ce 7 août qu’il ne se plaçait pas « dans l’esprit d’un affrontement perpétuel » avec l’Algérie. Au contraire, estime le centriste, il faudra « retrouver un jour des relations qui soient équilibrées et justes ». La veille, Emmanuel Macron tentait lui aussi de ne pas apparaître comme trop affirmatif, assurant que son « objectif » restait de « retrouver des relations efficaces et ambitieuses avec l’Algérie ». On en est pour l’instant bien loin.