• Dans une lettre adressée à son Premier ministre mercredi, Emmanuel Macron a prôné « plus de fermeté » à l’égard de l’Algérie, face à la crise diplomatique entre les deux pays.
  • La France « fait porter tous les torts à la partie algérienne », répond le ministère algérien des Affaires étrangères.
  • Il annonce par ailleurs la rupture d’un accord sur une exemption de visas pour les titulaires de passeports diplomatiques, que la France a annoncé suspendre.

Suivez la couverture complète

Après un réchauffement, le ton remonte d’un cran entre Paris et Alger

La poussée de fièvre a repris de plus belle entre les deux capitales. L’Algérie a accusé jeudi la France de s’exonérer « de ses responsabilités » dans la crise bilatérale en cours, dans un communiqué officiel. Il a par ailleurs affirmé que l’accord sur l’exemption des visas au profit des titulaires de passeports diplomatiques et de service, dont Paris a annoncé la suspension la veille, était désormais rompu.

Dans une lettre adressée mercredi à son Premier ministre François Bayrou, Emmanuel Macron a prôné « plus de fermeté » à l’égard de l’Algérie (nouvelle fenêtre), en dénonçant son inflexibilité sur la question migratoire et la détention de deux ressortissants français, que Paris juge arbitraire. Cette lettre « exonère la France de l’intégralité de ses responsabilités et fait porter tous les torts à la partie algérienne. Rien n’est plus loin de la vérité et de la réalité », a répliqué ce jeudi le ministère algérien des Affaires étrangères.

La lourde charge d’Alger contre Paris

Dans sa lettre, Emmanuel Macron a notamment demandé au gouvernement de suspendre un accord datant de 2013 exemptant de visas courte durée (nouvelle fenêtre) les détenteurs de passeports diplomatiques ou de service. Pour Alger, « c’est la France, elle seule, qui a été à l’origine d’une telle demande ». « En décidant la suspension de cet accord, la France offre à l’Algérie l’opportunité d’annoncer la dénonciation pure et simple de ce même accord », autrement dit la fin de cet accord, a ajouté la diplomatie algérienne. 

La décision d’Emmanuel Macron actait déjà une situation de fait : le ministre des Affaires étrangères français, Jean-Noël Barrot, avait annoncé le 14 mai dernier « le renvoi en Algérie de tous les agents titulaires de passeports diplomatiques qui n’auraient pas actuellement de visa ». La France réagissait alors à une décision « injustifiée et injustifiable » d’Alger d’expulser des fonctionnaires français, avait-il déclaré.

Lire aussi

Détention de Boualem Sansal : « La méthode dure ne marchera pas » avec l’Algérie, estime Dominique de Villepin sur LCI

Les relations entre Paris et Alger traversent depuis l’été 2024 une crise sans précédent après la reconnaissance par la France d’un plan d’autonomie « sous souveraineté marocaine » pour le Sahara occidental (nouvelle fenêtre), territoire que se disputent depuis 50 ans le Maroc et les indépendantistes du Polisario, soutenus par Alger. Dès l’éclatement de la brouille due, selon Alger, au revirement de Paris sur le Sahara occidental, la France a « procédé par injonctions, ultimatums et sommations », dans une « gestion en termes de rapports de forces », a affirmé le ministère des Affaires étrangères dans son communiqué. 

La France n’est pas dans « l’esprit d’un affrontement perpétuel »

Dans sa lettre, Emmanuel Macron demandait aussi à son gouvernement d’utiliser le levier « visa-réadmission » qui permet de suspendre la délivrance de visas de long séjour aux citoyens d’un pays dont les autorités coopèrent « insuffisamment » pour réadmettre leurs ressortissants en situation irrégulière. Une mesure qu’Alger a qualifiée de « violation flagrante » des accords bilatéraux en vigueur.

Emmanuel Macron a notamment motivé le tour de vis envers Alger par la situation de l’écrivain franco-algérien Boualem Sansal (nouvelle fenêtre), condamné à cinq ans de prison ferme notamment pour « atteinte à l’unité nationale », et du journaliste français Christophe Gleizes (nouvelle fenêtre), condamné à sept ans de prison en Algérie pour « apologie du terrorisme ». Le président français a néanmoins assuré que son « objectif reste de retrouver des relations efficaces et ambitieuses (nouvelle fenêtre) avec l’Algérie ». Jeudi, François Bayrou a affirmé de son côté que son gouvernement allait « appliquer » les mesures demandées par Emmanuel Macron, mais « non pas dans l’esprit d’un affrontement perpétuel mais dans l’esprit de retrouver un jour des relations qui soient équilibrées et justes ». 

La crise entre les deux capitales s’est déjà traduite jusqu’alors par des expulsions de fonctionnaires de part et d’autre, le rappel des ambassadeurs des deux pays, et un gel de toutes les coopérations officielles. Mais aussi la cessation de la coopération des consulats algériens en France, avec les services de l’État français, en matière de réadmission d’Algériens jugés dangereux. 

M.L. avec AFP