Par

Maréva Laville

Publié le

7 août 2025 à 18h46

Elles y sont depuis le 25 mai. Plus de deux mois. 75 jours, ont compté Stéphanie et Pierre, deux habitants de Roques, au sud-ouest de Toulouse. À quelques mètres de chez eux, côté Villeneuve-Tolosane, une centaine de caravanes campent, vont et viennent, restent deux à trois semaines et puis repartent, avant qu’un autre flux n’arrive. « On est à proximité, donc près du bruit, des voitures qui passent toute la journée, des bagarres, des odeurs et tout ce qu’on peut imaginer d’un camp », blâme Stéphanie.
Pourtant, une ordonnance d’expulsion a été prise par la Préfecture de Haute-Garonne, le 15 juillet 2025. Mais à ce jour, les gens du voyage sont toujours là et risquent de rester encore un moment. Que se passe-t-il ? Pourquoi est-il si compliqué de les faire partir ?

Près de deux mois avant l’ordonnance d’expulsion

Le cas est d’école. Non loin, à Muret, les 700 caravanes arrivées dimanche 3 août sont déjà sommées de partir, suite à une ordonnance d’expulsion prise par la Préfecture trois jours après leur arrivée.

Mais à Villeneuve-Tolosane, il a fallu attendre près de deux mois avant de l’obtenir. Car contrairement à leurs voisins, ici, ce n’est pas sur des terrains appartenant à la commune que le campement a trouvé place, mais sur des parcelles agricoles privées détenues par différents propriétaires, derrière le collège Jacqueline Auriol, entre la route de Portet et le chemin de Bourrouil.

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Sans plainte sur des terrains privés, la procédure bloquée

« Ça représente entre 10 et 15 parcelles au total. C’est relativement petit, il n’y a pas beaucoup d’hectares. Elles étaient en jachère », décrit Romain Vaillant, le maire de Villeneuve-Tolosane. Mais suffisamment pour accueillir une centaine de caravanes et pour ne pas pouvoir les chasser.

Car seuls les propriétaires de ces terrains pouvaient saisir la justice. Aucune des parcelles occupées n’appartenait à la Mairie. À une toute petite exception…

Le mini terrain municipal sauve la mise

Il a toutefois fallu attendre le mois de juin pour que les gens du voyage investissent ce petit bout de champ. « C’est lorsqu’ils se sont mis sur notre petite parcelle qu’on a pu saisir le tribunal judiciaire. Avant, on n’était pas victime. Ils étaient sur des terrains privés, utilisaient l’eau de Toulouse Métropole et s’étaient branchés sur le compteur Enedis du collège, mais ça ne concernait pas la commune », explique Romain Vaillant.

Pour se fournir en électricité, les gens du voyage se sont branchés au compteur Enedis.
Pour se fournir en électricité, les gens du voyage se sont branchés au compteur Enedis. (©Capture d’écran Maps)

Feu vert. La Mairie de Villeneuve-Tolosane obtient dès lors, dans le cadre de sa procédure, un mandat pour réclamer le départ de l’ensemble du campement avec l’accord des autres propriétaires, qu’elle a réussi à convaincre. La décision du tribunal va dans le sens de la commune, « mais les gens du voyage ne sont pas partis », déplore l’édile villeneuvois. Une inexécution qui aura valu à la Préfecture de prendre la fameuse ordonnance d’expulsion. Le 15 juillet.

Un avis médical stoppe l’expulsion des gens du voyage

À compter de cette date, dépanneuses et gendarmes en nombre devaient être mobilisés. L’opération était prévue pour la fin du mois de juillet.

« Mais entre-temps, il y a eu un avis médical s’opposant au déplacement du patriarche qui est mourant. Or, le concours des forces publiques s’applique soit pour tout le monde, soit pour personne », regrette Romain Vaillant qui soutient bien comprendre l’indignation et l’exaspération des habitants de Villeneuve-Tolosane et de Roques. « On est coincé par cet avis médical… »

« On vit dans la crainte »

La nouvelle est tombée ce jeudi 7 août midi pour Stéphanie et Pierre.

Humainement, je l’entends [qu’il soit malade]. Mais de là à tout bloquer… On n’a plus de perspectives et je me dis que ça ne s’arrêtera jamais en fait. Et puis, il y a le camp de Muret qui semble devoir partir. On vit dans la crainte qu’ils arrivent ici.

Stéphanie
habitante de Roques, juste à côté du campement

Des arrivées de gens du voyage de plus en plus importantes

Et pour cause. À Villeneuve-Tolosane, ce n’est pas la première fois que les gens du voyage stationnent leurs résidences à quatre roues. « L’an dernier, c’était sur le stade de foot. Mais depuis ces deux dernières années, ce sont des groupes beaucoup plus importants. Pour nous, c’est beaucoup ! Et c’est inquiétant aussi », lâche Romain Vaillant, le maire.

Pour éviter que cela ne se reproduise, il insiste sur la volonté de la commune de racheter les terrains agricoles « laissés en jachère, pour maintenir les vraies vocations agricoles et installer un maraîcher. »

Un compromis sur la propreté et le bruit

En attendant cette solution, l’élu s’est déplacé lundi 4 août sur le campement désormais illégal, à la rencontre de ses occupants.

« Il a été convenu que si on ne peut pas exécuter le concours de la force publique, cela suppose qu’ils nettoient leurs déjections humaines et réduisent le bruit, car le volume est trop fort, et il y a la question des chiens qui aboient toute la journée. Ils se sont engagés à faire des efforts et à assurer la propreté de la zone », conclut Romain Vaillant.

Pour le reste, il va falloir se montrer patient visiblement…

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