Tenter de passer d’un 4 cylindres en ligne peaufiné
durant des décennies à un V4 dont les arcanes sont inconnues est un
acte courageux de la part des hommes du département Yamaha MotoGP, mais en attendant de regarder avec attention
les très belles photos de la M1 prises lors d’un scoop pendant le
test privé à Brno, nous allons vous conter l’histoire atypique de
ces dernières. Après tout, l’actualité étant quasiment au point
mort avant la reprise en Autriche le week-end prochain, coucher sur
le papier les coulisses de ce genre d’exercice pourrait intéresser
certains d’entre vous…

En préparation du Grand Prix de la République Tchèque s’est donc
tenu un test privé sur le circuit de Brno. Pour répondre à la
réglementation qui interdit tout essai dans les 14 jours précédant
un GP, le test a été fixé le mardi 1 et mercredi 2 juillet, alors
que le GP était programmée le week-end du 20 juillet, juste avant
la pause estivale.

Le circuit de Brno avait été loué par Honda pour deux jours,
mais comme cela n’est pas rare pour des questions budgétaires,
d’autres teams y étaient autorisés : Yamaha bien sûr, mais aussi
quelques équipes de Moto2, telles Marc VDS, American Racing, et
même Mattia Pasini qui préparait sa wild card.

Un test privé, comme son nom l’indique n’est en théorie ouvert à
personne, journalistes et photographes compris, à l’exception des
équipes présentes, et il est donc très rare d’en voir des photos,
surtout de qualité professionnelles, comme celles que nous
diffuserons prochainement. Un concours de circonstances allait
toutefois engendrer une exception à cette règle…

A quelques kilomètre du circuit vit Jaromir
Havranek
, un photographe tchèque que nous croisons sur les
GP et qui a tissé depuis des années son réseau dans le paddock.
Evidemment, l’envie le démangeait d’aller voir les MotoGP, mais
c’est avant tout pour effectuer une opération de maintenance
hydraulique sur un camion qu’il a reçu l’autorisation de rentrer
sur le circuit mardi. Toutefois, son travail réalisé, l’occasion
était trop belle pour ne pas tenter de reprendre son activité
favorite…

Une fois le feu vert accordé mercredi par le circuit, en bons
voisins, pour aller en voie de sécurité, il a ainsi pu prendre
entre autre quelques clichés de Luca Marini sur la
Honda, d’Alex Rins, Augusto
Fernandez
et de Miguel Oliveira sur les
Yamaha, mais aucune des machines ne présentaient la moindre
originalité, alors que pendant ce temps Andrea Dovizioso tournait sans
forcer au guidon d’une M1 équipée de capteurs optiques sur le bras
oscillant, à l’image de ceux utilisés par Ducati sur ses machines
de développement.

Mercredi midi, au restaurant, Jaromir a même pu poser quelques
question à Andrea Dovizioso, celui-ci lui confiant
que le tarmac et le grip étaient parfaits et qu’ils fournissaient
beaucoup de sensations. Mais l’Italien ajoutait qu’il arrêterait
son travail assez tôt à cause de son vol de retour. Désœuvré, notre
homme est quand même retourné en voie de sécurité. On ne savait
jamais…

Et il a eu raison ! A 17 heures, la séance a été interrompue au
drapeau rouge, Mattia Pasini venant de pulvériser
sa Kalex, celle-ci creusant même deux trous dans l’asphalte en
effectuant des tonneaux. Dans de telles circonstances et avec 37°
au soleil, n’importe quel photographe serait probablement rentré
dans le paddock en pensant. Pas Jaromir !

A 17h40, il voit apparaître une moto toute noire, jamais vue
jusqu’à présent. Il reconnaît le casque d’Augusto
Fernandez
, note les échappements sous la selle : c’est la
V4, pour seulement quelques tours, la séance se terminant à 18
heures !
Sa pression artérielle monte en flèche, il mitraille au 500 mm avec
une vitesse d’obturation supérieure à la normale, ne sachant pas
combien de tours l’Espagnol va faire et ne voulant pas rater ses
clichés.
Deuxième passage, c’est dans la boîte, il court à un autre virage
pour changer d’angle, il mitraille.
Augusto Fernandez le voit, la pression monte
encore : va-t-il en informer l’équipe Yamaha qui enverra
immédiatement quelqu’un le déloger ?
En attendant, il mitraille durant le dernier quart d’heure avant
l’arrêt des activités en piste.
Le scoop n’est pas encore acquis, car une barrière ferme la voie de
sécurité, et un comité d’accueil peut très bien l’y attendre pour
lui prendre sa carte mémoire…
Mais non, personne. La pression retombe. Une pression que nous
connaissons bien, pour nous être déjà faits effacer quelques photos
de MotoGP ici et là…

Très correct, Jaromir demande quand même au circuit s’il peut
diffuser ses photos uniques au monde et, effet compatriote ou pas,
il reçoit à nouveau le feu vert.
Il les diffuse donc dans un média par pays, en Italie, Espagne,
Grande-Bretagne, Pays-Bas, en Allemagne et en France.
Elles font évidemment tout de suite l’actualité et vous les avez
sans doute déjà vues en faible définition sur les sites étrangers.
Mais Yamaha se montre quand même beau joueur en allant jusqu’à le
féliciter pour son travail.

L’histoire se termine donc bien et nous les diffuserons
prochainement avec un œil plus technique, mais en attendant nous
avons pensé qu’éclairer ce genre de « sport », à l’heure
où nous sommes abreuvés de photos sans même que l’on sache qui les
a prises, rendrait un peu hommage aux hommes derrière les
objectifs…

Bravo Jaromir !

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