En plein été, sous le soleil parisien, la tour Eiffel prend quelques centimètres comme si elle se mettait sur la pointe des pieds. On ne le voit pas à l’œil nu, mais les ingénieurs le mesurent très bien. L’édifice imaginé en 1884 par l’équipe de Gustave Eiffel pour culminer à 300 mètres lors de l’Exposition universelle de 1889 dépasse en réalité cette hauteur quand le mercure grimpe. Et chaque hiver, elle redescend tranquillement, comme si elle reprenait son souffle.
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La Dame de fer grandit chaque année de 12 à 15 cm
Quand un métal chauffe, ses atomes vibrent davantage, ce qui les pousse légèrement à s’écarter les uns des autres. Ce phénomène porte un nom : la dilatation thermique. Trois paramètres entrent en jeu : le type de matériau, la longueur de l’élément et l’ampleur du changement de température.
Le fer puddlé et l’acier de la tour ont un coefficient de dilatation d’environ 12 × 10⁻⁶ par degré Celsius. Autrement dit, une barre de fer d’un mètre s’allonge de 12 micromètres lorsqu’elle prend un seul degré, soit moins qu’un cheveu humain.
De –20 à 40 °C : un siècle de degrés
Paris a déjà connu des hivers à –20 °C et des étés proches des 40 °C, soit une amplitude thermique de près de 100 °C entre les extrêmes. En plein soleil, la température du métal peut même dépasser l’air ambiant.
Si l’on applique le calcul à une barre de fer de 100 mètres, on obtient un allongement théorique de 12 centimètres. En transposant aux 300 mètres de la tour Eiffel, ce chiffre grimpe à 36 centimètres.
Les mesures réelles sur le terrain
La tour n’est pas une simple barre droite, mais un entrelacs de 18 000 pièces métalliques pesant 7 300 tonnes. Certaines sont droites, d’autres inclinées ou courbées, et l’ensemble subit aussi la poussée du vent. Résultat : les mesures montrent que la hauteur varie réellement de 12 à 15 centimètres selon la saison.
Autre phénomène discret : la chaleur n’est pas répartie uniformément. Quand un côté chauffe davantage, il s’allonge plus que l’autre et la tour s’incline légèrement, d’une fraction de degré, avant de se redresser à la tombée de la nuit.
Une géante qui se comporte comme un thermomètre
La tour Eiffel suit les cycles du jour et des saisons. Sa hauteur monte et descend au rythme des variations de température, et sa légère inclinaison indique même la position du soleil. Chaque été, elle est donc un peu plus haute et un peu plus penchée qu’en hiver.
Une démonstration à ciel ouvert
Ce phénomène n’est pas propre à la Dame de fer. Les mêmes calculs s’appliquent au viaduc de Garabit, au pont du Forth en Écosse ou encore aux rails des voies ferrées. Sauf qu’ici, c’est un symbole mondial qui l’illustre.
Ce qui se joue à l’échelle atomique se traduit, étape par étape, par un mouvement mesurable à plus de 300 mètres de haut. Chaque carte postale estivale de Paris capture sans le savoir cette petite transformation : un monument qui vit et réagit à la chaleur comme un organisme géant de fer et d’acier.
Allongement thermique estimé de constructions emblématiques
Hypothèses de calcul : coefficient de dilatation linéaire α = 12 × 10⁻⁶ / °C (acier/fer puddlé) et amplitude thermique saisonnière ΔT = 100 °C. Formule : ΔL = L × α × ΔT. Résultats arrondis.
Variation de longueur/hauteur liée à la dilatation thermique
Lecture rapide : la tour Eiffel gagne en moyenne une dizaine de centimètres mesurés en été, soit une valeur réelle inférieure à cette estimation théorique, en raison de la géométrie treillis, des assemblages rivetés et des échauffements non uniformes. Même logique pour les autres ouvrages.
Source : https://theconversation.com/the-eiffel-tower-gets-bigger-every-summer-heres-why-261904