Depuis le départ de Daniel Ricciardo fin 2018, les dirigeants de Red Bull, malgré leurs réflexions incessantes, se heurtent à un problème visiblement insoluble : qui recruter pour faire équipe avec Max Verstappen ? Faut-il prendre un jeune issu de l’académie avec très peu d’expérience, comme Alex Albon, Pierre Gasly ou Liam Lawson ? Faut-il laisser le temps à un pilote d’apprendre pendant quatre ans au sein de l’équipe B avant de le promouvoir, comme Yuki Tsunoda ? Ou faut-il aller chercher à l’extérieur un pilote chevronné, comme Sergio Pérez ?

Les options sont nombreuses, les profils variés, mais tous, sans exception, se sont cassé les dents face au défi. Pierre Gasly, successeur de Daniel Ricciardo, n’a tenu que 12 Grands Prix en 2019 avant de céder son baquet à Alex Albon, lui-même remplacé fin 2020. Sergio Pérez, lui, a résisté quatre saisons, jusqu’à son départ fin 2024, où il a laissé sa place à Liam Lawson. Le Néo-Zélandais, après deux premiers Grands Prix ratés, a été remplacé par Yuki Tsunoda, aujourd’hui en grande difficulté à son tour.

Ces échecs successifs illustrent à quel point il est difficile de faire équipe avec un champion de la trempe de Max Verstappen, qui fait corps avec sa Red Bull et en extrait le maximum chaque week-end. À force, les contre-performances du deuxième pilote sont devenues la norme, et les voir galérer n’a plus rien de surprenant. On peut même se demander si Sergio Pérez, pourtant en perdition lors de ses deux dernières saisons, n’a pas été le meilleur coéquipier de Verstappen depuis 2019.


Le Néerlandais écrase ses partenaires, mais le Mexicain est celui qui s’en est le mieux sorti statistiquement en qualifications, en dominant Verstappen lors de 14,5 % des séances. Derrière lui, Pierre Gasly plafonne à 8,3 %, Alex Albon à 3,8 %, et Yuki Tsunoda comme Liam Lawson à 0 %, n’ayant jamais battu Verstappen. En course, Pérez a devancé son coéquipier sur 12,2 % des Grands Prix, deuxième meilleur total derrière Alex Albon (34,6 %), mais ce chiffre est trompeur : le Thaïlandais n’a réellement devancé Verstappen qu’une seule fois si l’on exclut les abandons du Néerlandais.

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Pérez, finalement pas si largué ?

Vice-champion du monde 2023, Pérez est aussi le seul à avoir remporté des Grands Prix face à Max Verstappen, même si aucun autre pilote n’a bénéficié d’une monoplace aussi dominante que les Red Bull de 2022 et 2023. Reste que les statistiques ont leurs limites : le natif de Guadalajara était bien plus expérimenté que ses prédécesseurs et successeurs, ce qui élevait naturellement les attentes.

Pérez a subi de nombreuses critiques lors de ses derniers mois chez Red Bull, en grande partie à cause de sa difficulté à marquer des points (9 points sur les huit derniers GP de 2024). Cela s’explique aussi par le resserrement des performances entre les équipes, bien plus proches en qualifications et en course qu’avant le changement de réglementation fin 2021. Pourtant, Pérez avait parfaitement entamé la saison, montant quatre fois sur le podium lors des cinq premières courses, avant de s’effondrer. Le pilote de 35 ans n’a ensuite inscrit que 49 points sur les 18 dernières courses. En comparaison, sur quatorze manches en 2025, Liam Lawson (0 point) et Yuki Tsunoda (7 points) font bien pire, avec pour meilleur résultat une 9ᵉ place du Japonais.

La méforme de Tsunoda contribue donc à réhabiliter partiellement le passage de Sergio Pérez chez Red Bull et à se demander s’il n’était pas finalement la meilleure option pour occuper le second baquet. Mais l’écurie autrichienne ne peut pas se contenter de si peu : elle doit absolument concevoir pour 2026 une monoplace plus adaptée à différents styles de pilotage, plutôt que de produire une machine uniquement façonnée pour Verstappen. Car aussi exceptionnel soit-il, le quadruple champion du monde ne peut pas remporter un titre Constructeurs à lui seul.

Verstappen a inscrit 187 des 194 points de Red Bull cette année, empêchant l’équipe de lutter pour la deuxième place du championnat derrière Mercedes (236 points) et Ferrari (260 points). Si l’écart entre Verstappen et Tsunoda était similaire à celui séparant Russell et Antonelli (108 points de plus pour le Britannique), Red Bull serait aujourd’hui deuxième du classement, six points devant Ferrari. D’où l’importance cruciale de pouvoir compter sur un numéro deux fiable et performant.

Quant à Sergio Pérez, ces éléments pourraient renforcer son dossier pour convaincre — si tant est qu’il en ait besoin — Cadillac de lui faire confiance pour la saison prochaine, afin de donner un second souffle à sa carrière en Formule 1.