DDPF. C’est ainsi qu’une série d’attaques d’établissements pénitentiaires a été signée depuis dimanche, laissant planer le doute sur les raisons de tels actes perpétrés dans toute la France, et notamment à Tarascon ce mercredi. Si la piste de l’ultra gauche a un temps été évoquée, les méthodes utilisées par les auteurs orientent les soupçons vers d’autres profils. Entretien avec Fabrice Rizzoli, chercheur et spécialiste de la grande criminalité et cofondateur de l’association Crim’HALT.
Devant la prison de Toulon-La-Farlède, Gérald Darmanin a fait le lien avec le narcobanditisme, est-ce que cela vous semble prématuré ?
C’est une très bonne hypothèse. Dans le contexte de la loi avec deux prisons de haute sécurité sur le modèle italien où des gens vont être enfermés avec deux visites par mois, il y a une totale probabilité que des narcotrafiquants aient envie de marquer leur désapprobation sur ces futures conditions d’emprisonnement et utilisent des Kalachnikovs.
Ce sont les tirs de Kalachnikov sur le sas d’entrée de la prison de Toulon-La-Farlède qui vous font penser ainsi ?
Il y a trois hypothèses : celle de l’ultra gauche, celle des services de renseignement algérien qui manipuleraient un peu des gens des quartiers et donc effectivement celle du narcobanditisme. La Kalachnikov ne me semble pas être le fusil privilégié de l’ultra gauche…
Sur la boucle Telegram utilisée par le groupe de Défense des prisonniers français (DDPF), un montage vidéo a été partagé. Un agent pénitentiaire est directement visé et mis en garde. Qu’est-ce que ces méthodes vous évoquent ?
Je ne vois pas l’ultra gauche faire ça parce que là, c’est une menace vraiment ciblée sur l’agent, même si on parle à l’administration pénitentiaire. Pour moi, cela ressemble beaucoup à ce que peuvent faire effectivement plutôt des bandes criminelles de type crime organisé selon la définition de la convention de Palerme.
Toulon, Luynes, Tarascon, les attaques touchent tout le territoire mais les prisons dans le Sud-Est et son personnel pénitentiaire sont particulièrement visés. Comment l’expliquer ?
Les prisons d’Avignon, de Marseille, du Gard sont peuplées d’un peu plus de narcotrafiquants que dans la moyenne des autres établissements pénitentiaires et de narcotrafiquants d’un certain calibre, notamment des gens qui viennent de Marseille au sens très large. Il peut y avoir l’idée de vouloir cibler des prisons où ils sont, où des complices sont incarcérés.
Pensez-vous que la création de ces deux prisons voulues par Gérald Darmanin touche profondément le crime organisé ?
Les narcotrafiquants voient bien le danger. Pour rappel, Gérald Darmanin est allé chercher cette idée en Italie. Il l’a dit à l’Assemblée territoriale de Corse il y a un mois et répété à l’Assemblée nationale lors de l’examen de la loi : « L’Italie est le pays de la mafia et de l’antimafia ». C’est ce que je dis depuis 15 ans. En Italie, ça marche. Beaucoup de mafieux n’arrivent pas à transmettre leurs ordres. Je crois qu’en France, certains prisonniers savent très bien ce qui se passe en Italie.