L’actualité moteur continue d’agiter le petit monde de la Formule 1 avec la tenue de discussions entre les parties prenantes, notamment à l’occasion du dernier Grand-Prix de Bahreïn. Les coûts élevés de la future réglementation technique et l’incertitude quant au rapport de force entres les motoristes poussent à envisager l’introduction d’une autre motorisation. Celle-ci ne devrait toutefois pas apparaître avant 2029. Avec ou sans Renault.

C’est probablement l’opportunité la plus élevée de revoir un jour un moteur frappé du Losange. L’introduction d’un nouveau type de moteur fait l’objet d’un débat intense entre les motoristes, les équipes et les dirigeants de la discipline. Depuis plusieurs mois, la gouvernance de la discipline a émis l’hypothèse d’un retour du V10 avec un carburant durable. Soulevant de nombreux débats, avec un certain nombre d’acteurs favorables, d’autres non.

Depuis l’apparition de ces discussions, Renault n’a jamais donné son avis en dépit de sa présence dans le paddock via son écurie officielle, et la mise en place d’une cellule de veille à Viry-Châtillon. Pis, aucun média n’a fait part de la présence d’un représentant de la marque à la réunion organisée sur ce sujet en marge du Grand-Prix de Bahreïn. Pourtant, Luca de Meo appelait à de tels changements lorsqu’il a décidé de stopper le développement du moteur 2026.

La formulation technique n’a pas été décidée mais beaucoup discutée. Une forme de consensus tournerait autour d’un V8 plutôt qu’un V10 associé à un KERS, un système de récupération d’énergie au freinage, couplés à une bien plus petite batterie. On parlerait alors d’un ratio 90/10 en faveur du thermique en lieu et place du 50/50 attendu pour 2026. Ce nouveau groupe motopropulseur serait nettement moins cher à développer, et plus facile aussi, avec en sus des pièces standardisées.

Son introduction n’interviendra cependant pas tout de suite. La Formule 1 voulait accélérer le changement réglementaire mais cela ne sera pas avant 2029. Il est également possible qu’il respecte le planning initial avec une introduction pour 2031. Ce calendrier, non-officiellement confirmé à ce stade, pourra être celui de Renault si d’aventure la marque française décide de faire son retour en qualité de motoriste.

L’industrie automobile piétine encore à transformer son industrie en tout électrique, avec des réglementations plus souples en la matière pour accompagner un développement long et coûteux. Le thermique et l’hybrides ont de fait encore de beaux jours devant eux, en particulier à l’international, grâce notamment aux progrès accomplis sur la technologie ainsi qu’avec les carburants durables.

Renault a mis en place une filiale dédiée à ce type de motorisation, codétenue avec Aramco et Geely. La première citée est déjà présente en Formule 1 notamment avec Aston Martin, tandis que l’on prête à la seconde une volonté de s’y engager. Les liens avec l’entreprise chinoise sont d’ailleurs de plus en plus fortes dans l’industrie, et cela pourrait constituer une seconde opportunité de revoir le Losange dans la discipline.

En attendant, il faudra composer avec un moteur Mercedes, au moins jusqu’en 2029. Les rumeurs évoquent d’ailleurs d’excellentes performances, laissant craindre une domination des écuries motorisées par l’Etoile. Au point pour certains d’évoquer la possibilité de voir Max Verstappen s’intéresser au projet Alpine, grâce à la firme allemande mais également à la capacité de Flavio Briatore de construire des projets gagnants. Un peu fou à y croire tout de même !

L’arrivée du moteur Mercedes est toutefois attendue, avec certaines critiques émises contre l’actuel bloc Renault. En raison du gel de la réglementation, le moteur français manque de performance, notamment sur la partie électrique, face à ses rivaux. Une mise à niveau a été refusée en 2023, contraignant le Losange a composé avec un bloc en retrait sur les saisons 2024 et 2025. Selon les tracés, l’impact pourrait être de deux à six dixièmes selon les observateurs.

 » Sans le déficit moteur, nous serions en première ligne « , assurait Flavio Briatore à ce sujet dans le paddock de Bahreïn.  » Selon le circuit, nous perdons trois à quatre dixièmes de seconde rien qu’au niveau du groupe motopropulseur, […], les ingénieurs expérimentaient constamment des solutions pour compenser le déficit moteur. Ces essais n’ont pas fonctionné. C’est pourquoi j’ai dit à l’équipe avant le week-end : ’Plus d’expérimentations. Nous allons piloter comme nous le devrions lors des essais’. « 

L’avis de l’italien est partagé par plusieurs acteurs, renforcés par des chiffres impressionnants, tant à Suzuka qu’à Bahreïn. L’A525 se montre particulièrement véloce dans les parties sinueuses, à la hauteur des meilleures monoplaces du plateau. De fait, avec un bloc moteur plus performant, certains n’hésitent pas à dire que l’Alpine aurait pu être en pole position avec Pierre Gasly.

 » Il est clair que nous allons aller sur des circuits où l’Alpine va voler, des circuits où la Williams [va être forte] « , commente notamment Carlos Sainz Jr.  » Avec un peu de chance, nous allons visiter des pistes où nous serons plus rapides. Ce qui est clair pour moi, c’est que l’Alpine est impressionnante dans les virages. Je ne sais pas si vous avez accès aux données GPS, mais ils ont réussi à aller aussi vite que McLaren du virage 6 au virage 11, donc tous [ces virages] à moyenne-haute vitesse.  »

 » C’est donc très, très impressionnant ce qu’ils sont capables de faire. Ce tour de qualifications de Pierre [était très impressionnant]. Ils se plaignent d’avoir trois dixièmes de [déficit] moteur. Si vous leur mettez un moteur Mercedes ou Ferrari, c’est une voiture qui serait en première ligne « , ajoute l’espagnol.

Cette réalité n’est pas réjouissante car elle ne met pas en avant la qualité du travail des employés de Viry-Châtillon, capables de produire un moteur exceptionnel avec des moyens bien moins importants que ses rivaux. Les investissements réalisés par Mercedes, Ferrari et Honda sont en effet nettement plus élevés, et c’est d’ailleurs l’une des raisons ayant poussé Renault à cesser la production de moteurs.

Cette situation reste cependant difficile à avaler, tant elle est à l’opposée de l’Histoire et la notoriété du Losange en la matière. Une triste fin qui appelle à une implication future, au plus tôt en 2029. Reste à voir quel rôle va jouer la cellule de veille sur ce sujet, avec l’absence d’information concrète aujourd’hui sur son implication. Les discussions, elles, se poursuivent pour aboutir à une réglementation en phase avec les aspirations de Luca de Meo. Suffisant pour convaincre ?