En ce début d’après-midi ensoleillé de fin juillet, Aymone Clavier a décidé de se lancer dans une partie de ping-pong. Le genre d’activités que nombre de vacanciers aiment faire au camping pendant l’été. À ceci près qu’Aymone n’est pas confortablement installée dans un camping de la côte bretonne. Et qu’elle n’est pas en vacances non plus.
Ce jour-là, c’est au sein de l’école Jacques-Prévert, dans le quartier de Bréquigny, à Rennes, qu’elle a décidé de passer son après-midi, entre structures gonflables, parties de badminton et de ping-pong et matchs de football improvisés. Alors que la majorité des étudiants prend un petit boulot pendant les mois d’été, la titulaire d’un Master 1 à Science Po est, elle, en stage au sein de l’association Entourage.
« Faire en sorte que le lien se fasse entre tous »
D’habitude, la jeune femme, aussi, travaille les mois d’été. « Depuis que j’ai 17 ans, je suis monitrice en colonies de vacances avec des jeunes ». Aujourd’hui âgée de 23 ans, elle a pris une autre option pour son été. En juin et juillet, elle est une « Johnny », une bénévole qui consacre une partie de ses vacances aux plus démunis et isolés. Sa mission ? Être là pour tous ceux qui, lorsque les villes se vident et que les associations entrent en pause estivale, se retrouvent encore plus seuls.
Aymone Clavier a multiplié les activités avec Entourage tout l’été. (Photo Le Télégramme/Romain Leroux)
« Mon rôle, c’est de faire en sorte que le lien se fasse entre toutes les personnes présentes aux activités qu’on organise, que personne ne reste dans son coin et se sente exclu, explique la jeune femme de 23 ans. On a parfois des publics vraiment fragiles, sans abri ou en situation financière ou familiale compliquée. Mais on ne pose pas de question, on est là pour leur permettre d’avoir du lien social au moins une fois dans la semaine ».
Tir à l’arc, sortie en bateau, Just Dance…
Les actions des Johnnys ? Des moments simples, comme une sortie en bateau sur la Vilaine, un pique-nique géant dans un parc, une activité tir à l’arc en lien avec le club de la TA Rennes, des ateliers théâtre, une fin de journée jeux de société ou même une session du jeu Just Dance, où il s’agit de reproduire une chorégraphie.
« Cette activité m’a marquée, pointe Aymone. J’ai remarqué qu’une des personnes présentes, un Afghan, ne dansait pas du tout et semblait un peu perdue. On lui a alors proposé de mettre sa musique. Il a lancé une musique afghane et nous a appris à tous une chorégraphie de son pays, on a tous dansé dessus et ça a été un super moment. Ça donne des instants inattendus. »
« Ce sont des voix qu’on n’entend jamais »
Si elle a choisi ce stage cet été, ce n’est pas tout à fait un hasard. Le milieu associatif, Aymone connaît, après avoir œuvré pour une association de distribution alimentaire à Lille et une autre visant à démocratiser l’art oratoire. Engagée dans un Master de concertation et de politique publique, elle a l’intention de travailler dans ce domaine une fois ses études terminées. « J’ai préféré faire ce stage dans une asso pour me rendre utile plutôt que d’être dans un bureau dans une entreprise. »
De cette expérience de deux mois, la jeune étudiante en a tiré « davantage d’ouverture aux autres. Des gens qui ne se seraient jamais parlé ont pu échanger. Les personnes précaires, ce sont des voix qu’on n’entend jamais, elles n’ont pas la parole dans l’espace public. J’ai envie de travailler dans les politiques publiques pour que la société soit plus inclusive et respectueuse, je ne veux pas tout regarder d’en haut. » À la hauteur d’une table de ping-pong ou d’un bateau sur la Vilaine, la perspective est tout autre.