Un mousquetaire appelé D’Artagnan, ça vous dit quelque chose ? Oui, à tous les coups. Mais attention, il y a un piège ! Le D’Artagnan dont nous allons parler n’est pas celui auquel vous pensez. Pierre de Montesquiou, comte d‘Artagnan (1640-1725), est le cousin du personnage historique qui inspira le livre d’Alexandre Dumas. Alors, non, il n’est pas né à Rennes (il vient de Bayonne) mais n’empêche : lors de son passage chez nous, il a suffisamment marqué les esprits pour mériter sa place dans notre galerie de portraits. ll est temps de remettre un peu de lumière sur ce personnage controversé, éclipsé par l’ombre de son homonyme.

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En 1715, Louis XIV meurt. La France, qui sort de longues années de guerre, est gravement endettée. Et la Bretagne, jalouse de ses prérogatives, en a assez de mettre la main au portefeuille selon le bon plaisir du pouvoir royal. C’est dans ce contexte qu’arrive un nouveau gouverneur, le maréchal de Montesquiou.

La noblesse bretonne le prend rapidement en grippe

Le moins qu’on puisse dire, c’est que ce militaire expérimenté, mais brutal et hautain, n’est pas très doué pour se faire aimer des Bretons. La noblesse le prend rapidement en grippe. C’est vrai qu’il a tendance à se comporter comme un policier en inspection dans une province qu’il ne cherche guère à comprendre. « Ici il faut surtout montrer de la sévérité », résume-t-il dans ses lettres à Paris. « Il faut ôter de l’esprit de cette province qu’ils ont des droits particuliers et qu’ils sont indépendants. » Des fois que ça serait contagieux ?

En 1717, lorsque les États de Bretagne refusent de voter aveuglément de nouveaux impôts décidés par la Régence, le Maréchal furieux fait exiler les responsables les plus influents et déclare les États dissous.

Un bras-de-fer entre les Bretons et le gouverneur

Les arrestations arbitraires se multiplient au parlement de Rennes. Les lourdes taxes voulues par le Régent, Philippe d‘Orléans, mènent une partie de la noblesse sur le chemin de l’insurrection. Une tentative de soulèvement, « la conspiration de Pontcallec », est rapidement matée par le maréchal de Montesquiou qui fait décapiter quatre de ses meneurs.

Le bras-de-fer entre les Bretons et le gouverneur aux joues flasques prend parfois des allures assez ridicules. En 1718, une troupe d‘opéra se produit à Rennes sans autorisation du Parlement (pourtant obligatoire), sous prétexte qu’elle a ses entrées à la Cour. Les juges, soucieux de leur indépendance, font condamner le local où doit avoir lieu le spectacle. Le maréchal de Montesquiou ne peut supporter cet affront fait au pouvoir royal et envoie vingt soldats pour ouvrir la porte. Voulant montrer qui est le boss, il fait proclamer par tambour dans toute la ville que la représentation aura lieu, non mais.

Finalement, les comédiens jouent, tandis que la noblesse les boycotte complètement.

La rupture entre les Bretons et leur gouverneur est si consommée que certains commentateurs n’hésiteront pas à l’accuser, sans preuves, d‘être à l’origine du grand incendie de Rennes, en 1720. Bon, il n’était déjà plus en poste…. Mais cette vengeance à grand spectacle lui aurait, assurément, gagné sa place dans un livre d’Alexandre Dumas.