Sous le kiosque de la place des Réformés, en haut de la Canebière, les bâches interpellent « 40 minots à la rue — Marseille, que fais-tu ? », peut-on y lire. Au pied de l’escalier, un tableau blanc recense les besoins urgents : place d’hébergement, boissons fraîches, gâteaux, conserves et fruits. À l’intérieur, le sol est recouvert de matelas et de tentes. Des cagettes de nourriture, un petit réfrigérateur et quelques conserves composent l’intendance sommaire.

Le lieu, en plein cœur de Marseille, est depuis un mois le campement improvisé d’une quarantaine de jeunes migrants isolés, regroupés au sein du collectif Binkadi. Ils réclament 40 places de relogement d’urgence, sans réponse des autorités. « Notre situation ici est mauvaise. Parfois, des garçons tombent malades. En septembre, je dois aller à l’école. Je ne peux pas dormir ici jusqu’à la rentrée. L’État doit nous aider », explique en anglais un jeune Ghanéen, installé depuis six mois à Marseille. Il dénonce un « racisme » qui, selon lui, pèse sur l’accès à l’hébergement. « Quand ils nous voient, ils pensent à notre peau. Ils ne veulent pas nous aider. C’est pour ça qu’on se bat. »

« Un silence qui est le reflet de leur mépris »

À ses côtés, Mohamed, bénévole et ancien occupant relogé grâce à une mobilisation en début d’année, continue de venir en soutien. « Chaque jour, des habitants ramènent à manger ou donnent un peu d’argent pour préparer les repas. Les manifs n’ont rien donné. On nous répond toujours qu’il n’y a pas de place. »

Le collectif a déjà manifesté, interpellé la mairie et la préfecture, mais seules huit places d’hébergement ont été proposées, loin de couvrir les besoins. En attendant, les occupants comptent sur la solidarité des passants. Contacté, le département des Bouches-du-Rhône, le plus condamné de France pour la prise en charge des jeunes migrants, n’a pas souhaité commenter.

« Un silence qui est le reflet de leur mépris, on ne peut laisser autant de jeunes à la rue si longtemps », juge Sarah, bénévole. La Ville, elle, dit agir « dans la limite de la loi », en fournissant repas, produits d’hygiène et accès aux douches, faute de pouvoir les loger. Tandis que certains continuent de douter de la minorité de ces jeunes et accusent une « instrumentalisation ».