Depuis plusieurs jours, l’artiste Fakele a posé ses valises pour cinq jours au Bleymard afin de photographier les marcheurs de passage sur le chemin de Stevenson. Mais pas avec n’importe quel appareil photo.
Depuis le début de la semaine, Kevin – Fakele de son nom d’artiste – intrigue les passants avec son drôle d’appareil photo. Une machine à soufflet à l’ancienne, dans une caisse, recouverte d’une toile, qui fait à la fois appareil et labo photo. « Ce type d’appareil, ça n’a jamais été produit en série. On appelait ceux qui l’utilisaient les photographes ambulants, explique Fakele. C’était un petit métier de rue qui a existé aux alentours de 1900, et c’était souvent des appareils fabriqués par les propres photographes. »
Des clichés argentiques (presque) instantanés
L’appareil permet d’obtenir un cliché en “seulement” une dizaine de minutes. Un temps qui peut paraître long à l’ère des smartphones, mais qui est extrêmement rapide par rapport à l’époque où ce procédé a été inventé. Développer une pellicule prend en effet entre 1 h et 1 h 30. Mais Fakele emploie un autre procédé : « La spécificité, c’est qu’on utilise du papier argentique à la place de la pellicule. Normalement, ce papier est vraiment fait pour réaliser des tirages d’exposition. Mais nous, on s’en sert comme manière de prise de vue, d’obtenir le négatif. » Pour obtenir le cliché final, Fakele doit donc « reprendre en photo la photo » et obtient ainsi un négatif du négatif. Le résultat ? Un superbe cliché en noir et blanc.
Mais Fakele ne prend pas n’importe qui en photo. Après avoir fait le chemin de Stevenson seul l’an dernier, il a décidé cette année d’immortaliser les randonneurs qui le traversent. » J’ai créé beaucoup de liens avec des personnes sur ce chemin. Au début, mes photos étaient très centrées sur le paysage. Et au fur et à mesure, je me suis vraiment dirigé vers du portrait. C’est pour ça que je suis revenu pour continuer ce projet. »
« Pour moi, ce qui est attendu est plus apprécié »
Après avoir passé quatre jours en Haute-Loire, où il a pris une dizaine de clichés par jour, Fakele continue donc son bout de chemin au Bleymard, jusqu’au vendredi 8 août 2025. Il ira ensuite à Saint-Jean-du-Gard, où les marcheurs qu’il a photographiés pourront obtenir leur portrait. « Pour moi, ce qui est attendu est plus apprécié, sourit l’artiste. Le but, c’est vraiment d’attendre et d’aller dans ces valeurs de la marche, qui sont de prendre le temps, de revenir à quelque chose de plus simple. » Les randonneurs de Haute-Loire qu’il retrouve au Bleymard peuvent donc récupérer la prise de vue effectuée quelques jours auparavant. Un souvenir unique.
« À travers son travail photographique, l’artiste choisit de capturer l’essence des choses simples, la réalité d’un chemin et surtout les motivations personnelles qui émanent de chaque marcheur qu’il rencontre, souligne Lucie Guillot, chargée des relations presse au comité départemental du tourisme. Nous avons choisi de l’accompagner, parce qu’encourager une telle démarche, c’est aussi défendre l’authenticité et la richesse de notre territoire. »
Avec la matière récoltée, que ce soit les photos ou les témoignages, Fakele espère aller plus loin en proposant une exposition ou un livre. « Je suis aussi en recherche de gens qui voudront soutenir ce projet, qui sont intéressés par ce fond photographique et qu’on imagine ensemble la suite. »