Cet été, nous avons eu la chance de croiser une Chalmers Type 17 de 1913 (voir épisode 41 des Marques disparues). Mais, nous avons aussi croisé une automobile encore plus rare puisqu’à priori unique survivante de la production originelle. Connaissez-vous la Silver Hawk ?

Noel Macklin, un touche-à-tout de l’industrie

Silver Hawk motors n’a pas tenu bien longtemps. Lancée en 1920, elle disparait en 1921. Mais, son histoire est liée à une partie intéressante de l’industrie automobile.

En effet, Silver Hawk Motors a été créée par Sir Noel Campbell Macklin. Le nom de Macklin vous dit peut-être quelque chose car son fils, Lance Macklin était pilote de sport automobile. Il a fait un peu de Formule 1 au début du championnat dans les années 50, mais aussi de l’endurance. Hélas, en 1955, il est un élément clé de l’accident dramatique des 24 Heures du Mans 1955. Pour éviter la Jaguar de Mike Hawthorn qui lui fait une queue de poisson pour plonger dans les stands, Macklin fait un écart et freine. Pierre (Bouilin dit) Levegh ne peut l’éviter et sa Mercedes déchiquetée tue plus de 80 spectateurs. Lance Macklin tiendra plus tard une concession Facel Vega.

Mais revenons-en au père. Noel (Campbell) Macklin (il n’avait pas encore reçu son titre de chevalier, voir plus loin) était un touche-à-tout. Il cofonde en 1919 la marque Eric-Campbell avec H Eric Orr-Ewing. L’association fait long-feu et Macklin reprend sa liberté en 1920 à peine.

Silver Hawk, après Eric-Campbell

C’est alors qu’il fonde tout seul Silver Hawk à Cobham dans le Surrey à une trentaine de kilomètres au sud-ouest de Londres. Pour démontrer son talent, Macklin construit une nouvelle machine (après tout c’est lui qui était la tête pensante de Eric-Campbell.

La Silver Hawk est une voiture de course et légère. La carrosserie est en aluminium pour plus de « légèreté ». Elle est équipée d’un moteur à soupapes latérales de 1498 cm3. Macklin se tourne vers Coventry Climax qui s’appelait encore à l’époque Coventry Simplex. Climax eu son heure de gloire dans les moteurs de compétition avec le FWMV V8 1 500 cm3 Formule 1 qui a remporté deux championnats de F1 avec Jim Clark et Lotus en 1964 et 1965.

Cette Silver Hawk fonctionne plutôt bien et son 1500 cc lui permet de belles prestations en courses de voitures légères (ou voiturettes). C’est par exemple le cas avec Violette Cordery à son volant. Cordery n’était autre que la belle-soeur de Macklin. Hélas, le succès commercial n’est pas au rendez-vous et seuls 12 exemplaires seront construits dans les écuries de la maison de Macklin.

L’unique survivante roulante était à Bressuire

Désormais, il ne reste plus qu’un seul exemplaire roulant au monde ! Et il est en France, aux mains d’un collectionneur privé. Nous avons eu la chance de la voir rouler au Grand Prix historique de Bressuire 2025. Intrigués par cette voiture inconnue au bataillon, nous avons pu échanger avec le propriétaire. La voiture a appartenu au même collectionneur pendant des années. Puis, par chance, le propriétaire actuel l’a convaincu de lui céder la voiture pour qu’elle retrouve la course en historique.

Propulsion, embrayage à cône et boîte 4. C’est du sport de rouler avec « à bonne vitesse », surtout qu’elle chauffe un peu et réclame souvent de l’eau. Mais voir une dame de 105 ans lancée dans les rues de Bressuire entre les bottes de paille n’a pas de prix. Détail important, le GP a des manches nocturnes alors que la plupart des voitures de l’époque n’avaient (et n’ont toujours pas) de feux !

Ce propriétaire a également plusieurs MG dont une de course d’origine et une autre avec moteur officiel MG de course mais dans une version civile (superbe) de la voiture. Merci à eux de partager leur passion.

Quatre marques automobiles à son actif

Après l’échec de Silver Hawk, Noel Campbell Macklin n’abandonne pas l’automobile. Il fonde Invicta en 1925. Un peu comme Bugatti, la marque connaît une première époque de 1925 à 1933. Campbell est appuyé par la fortune d’un héritier sucrier, Oliver Lyle. La recette reste la même et il est encore fidèle au Coventry Simplex.

Pour faire la retape commerciale des Invicta, Campbell fait une nouvelle fois appel à Violette Cordery ! Elle pulvérise ou établit plusieurs records dans les années 20. Ce sont des records d’accélération, mais aussi d’endurance avec des parcours de 10 000 miles (plus de 16 000 km) en plusieurs jours à Monza, ou plusieurs mois à travers le monde. En 1929, au volant d’une Invicta, avec la plus jeune des trois soeurs Cordery, elle parcours 30 000 miles (plus de 48 000 km) en 20 jours et 20 heures sur le circuit de Brooklands. Près de 100 km/h de moyenne à l’époque !

Cette première période d’Invicta se termine en 1935. Invicta renaîtra en 1946, sans Macklin. En 1950, elle s’arrête de nouveau pour redémarrer en 1989. Christopher Browning qui restaure des Invicta y voit là un moyen de potentiellement relancer le tout. Au final, ce sera en 2004 qu’Invicta, relancée une nouvelle fois, présente un nouveau véhicule, la S1. Cette Invicta S1 arrête sa production en 2012. Depuis…plus rien.

Son plus gros succès fut des bateaux pour la Royal Navy

Pour Macklin, après Invicta, il fondera Railton en 1933. Serial entrepreneur mais sans succès ! Cette fois, les Railton ne sont plus légères mais orientées luxe. 8 cylindres 4 litres au programme, puis une ouverture vers le bas avec du 6 cylindres. En 1940, la Seconde Guerre Mondiale met fin à l’aventure.

Cette Seconde Guerre Mondiale pousse Macklin à fonder Fairmile Marine en 1939 ! La société produit des bateaux de guerre qu’elle fournit à la Royal Navy. Macklin fut un membre de la Royal Horse Artillery, puis de la réserve de la Royal Navy. Pour tout cela, il est fait Chevalier par l’Empire Britannique. Il meurt en 1946 à 60 ans.

Les photos #2 et #3 de la galerie sont le Captain Keddie à la Thundersley hill climb course en 1921. La photo #4 est Thomas sur Silver Hawk V à la coupe internationale des voiturettes en août 1920.