l’essentiel
Quitter Singapour pour rouvrir une librairie à Lavaur ? C’est le pari audacieux de Yannis Casse revenu à ses racines, avec pour seuls bagages un amour immodéré des livres… et une solide expérience dans l’industrie du luxe.

Il a bourlingué de Dubaï à Singapour, arpenté les salons feutrés du commerce international après un master à l’ESSEC. Mais c’est à Lavaur, petite ville du Tarn, que ce cadre a choisi de poser ses valises en 2019. En ligne de mire : offrir à son fils une vie au rythme des saisons, renouer avec la famille puis… faire des livres non plus un refuge, mais une profession.

L’aventure commence à l’initiative de Sarah et Yves Lagier, propriétaires de l’enseigne @ttitude et cousins éloignés du repreneur. Ils lui proposent de reprendre leur réseau de librairies (Lavaur, Gaillac, Graulhet et Albi). Mais les difficultés financières de l’entreprise précipitent sa mise en liquidation avant la signature. « J’aurais préféré éviter cette issue, garder les équipes en place, assurer une transition en douceur, mais les chiffres ne suivaient pas », confie-t-il.

La liquidation, paradoxalement, va devenir une opportunité. Elle permet d’assainir les comptes et d’écarter le site d’Albi, trop lourd à porter. La nouvelle structure — Les Ailes du Papillon — a été créée… La machine redémarre.
Loin d’être un coup de cœur naïf, ce projet est un véritable « gros pari personnel », reconnaît l’intéressé. Investir dans un secteur réputé peu rentable, sans être libraire de formation, peut sembler déraisonnable. « Mais entrer dans une librairie, pour moi, c’est comme pour un enfant dans un magasin de bonbons. »

La stratégie se veut ambitieuse mais réaliste : renforcer les fonds de stock en incluant classiques et essais, responsabiliser chaque équipe locale dans la gestion de ses commandes, rompre avec la centralisation d’hier pour mieux coller aux attentes de chaque territoire. Seuls les emplois d’Albi sont sacrifiés.

Les trois librairies devraient rouvrir leurs portes sous peu. « Une librairie qui ferme, c’est un crève-cœur pour une ville », affirme-t-il. En la rouvrant, il espère non seulement sauver des emplois, mais aussi offrir un lieu vivant, curieux, ouvert — où les livres ne seront pas que des produits, mais des passerelles entre les êtres.