Lunettes sur le nez et cheveux tirés en arrière, Cécile Quesnot évolue dans les longs couloirs du Palais Saint-Georges à Rennes (35). Son nom ne vous dit sûrement rien. Pourtant, quand le rideau se lève sur les scènes qui se jouent au marché des Lices, se trouve Cécile Quesnot. Son rôle : placière et gardienne du bon ordre !

Pour cette quadra, sa relation avec les Lices, depuis son arrivée il y a neuf ans, n’est pas le fruit du hasard, mais presque. « Je ne connaissais pas ce métier, avoue-t-elle. Mon mari de l’époque avait demandé sa mutation à Rennes et moi, j’ai donc quitté mon travail. J’ai vu cette annonce de placière qui dépend de la police municipale. Ayant fait partie plus jeune de la Police nationale, il y avait un lien. J’ai tenté et j’ai été prise. » Elle est même devenue la cheffe du service des marchés de Rennes en 2019.

La gestion des commerçants

Son samedi commence généralement à l’aube, aux alentours de 5 h. Équipée de son uniforme ASVP, elle démarre par un peu de manutention « avec l’installation des bornes électriques, de l’accès à l’eau, des barrières. Un tas de choses comme ça ».

Vient alors la gestion des commerçants. « Il y en a 260 en tout, mais on n’installe pas tout le monde. » Si les titulaires se placent seul, Cécile Quesnot doit gérer les commerçants « passagers » en réalisant un tirage au sort. « Il peut y avoir 20 ou 30 passagers, ça dépend des samedis. On procède selon le produit vendu. Il faut connaître le terrain pour placer. Il y a des choses à ne pas faire. »

Les numéros sont tirés par Cécile et son équipe. « Nous avons un sachet avec des pions entre un et 80. Le placier fouille dedans. Les plus petits numéros sont placés en premier. » Parfois, l’opération entraîne quelques mécontentements. « Les commerçants sont superstitieux pour certains. Pour eux, s’ils sont mal placés, c’est de notre faute. S’ils avaient tiré leur pion, ils auraient eu un meilleur chiffre. » Malgré tout, la placière passe au-dessus et les caprices lui glissent dessus. « Il n’y a pas de priorité. » Derrière ce calme, s’entrevoit un fort caractère. « Il faut savoir s’affirmer, surtout quand on est une femme sur le marché. »

La placière plus de 200 commerçants sur le marché des Lices.La placière plus de 200 commerçants sur le marché des Lices. (David Brunet)De l’eau à l’électricité

Lorsqu’elle est de service, la placière fait souvent face à quelques imprévus aux Lices. Panne d’eau, pas d’électricité, les obstacles sont légion. « Je crois que ça fait partie du truc. Il s’y passe toujours quelque chose, ce qui en fait un marché extraordinaire. Ça fait partie du folklore. »

Le plus gros caillou dans sa chaussure : les véhicules oubliés sur les places du marché. « On peut avoir dix à quinze véhicules. Pendant qu’on verbalise, certains propriétaires arrivent pour enlever avec leur véhicule. Il y a la problématique de ceux qui veulent récupérer leur voiture après une soirée… »

Un marché haut en couleur

Avec une gouaille retenue par le caractère de son uniforme, elle raconte que le marché peut être parfois animé, ente chalands et visiteurs du soir : « Aux Lices, le plus difficile à gérer, c’est l’humain. »

Sur les Lices, il y a les fêtards qui attendent la galette saucisse.

Elle embraye : « Parfois, il y a des bagarres et on peut se mettre en danger. On joue parfois les médiateurs quand on le peut, mais ça peut nous faire perdre du temps. »

Les liens au fil des années

Au fil des années, la placière a lié des relations avec les vendeurs. « On s’attache aux commerçants. Par exemple, on met une fleur sur la place du titulaire et on laisse sa place libre pendant deux à trois semaines. » Ce qui lui permet « de connaître l’histoire des commerçants, pour les aider et les écouter. Il ne faut pas être introverti ».

Lors d’un service, Cécile Quesnot avale les kilomètres. Parfois, elle s’octroie des petites pauses, surtout vers 8 h pour s’offrir « un wrap au poulet » ou un petit café avec un commerçant. « On a nos habitudes. On sait très bien où aller manger, assure la placière. J’ai plein d’adresses sur le marché des Lices, mais ne peux pas s’arrêter partout, sinon on ne ferait que manger. »