Par
Antoine Blanchet
Publié le
17 août 2025 à 6h32
Un bruit sourd et en quelques instants, plus rien. Le 1ᵉʳ juin 1961, l’impensable se déroule à Clamart (Hauts-de-Seine), mais aussi à Issy-les-Moulineaux tout à côté. Un effondrement de carrières souterraines provoque la disparition d’un quartier dans les profondeurs. Maisons, rues et même stade : le lieu résidentiel passe de la vie au néant en quelques instants. Au total : 21 personnes décèdent dans la catastrophe.
Le fontis : un risque réel en région parisienne
Pour comprendre ce drame qui a frappé les deux communes, il faut parler des carrières souterraines. « Depuis l’Antiquité, on a creusé en sous-sol dans cette zone afin d’extraire le gypse ou encore la craie. Le gypse servait à fabriquer le plâtre », détaille Dominique Boussuge, experte technique et scientifique en ouvrage bâti. Le calcaire était aussi prisé pour façonner les bâtiments.
Ces siècles d’exploitation des carrières ont eu pour conséquence de faire d’une partie de Paris et des départements limitrophes des gruyères souterrains. Dans la capitale, les catacombes, officielles et officieuses, sont des traces de ce travail souterrain. « Après la guerre, on a commencé à construire des logements sur ces galeries à Clamart ».
D’années en années, certaines de ces structures en profondeur se fragilisent. L’une des causes : la pluie. « C’est surtout le cas avec la craie et le gypse qui vont se dissoudre au contact de l’eau », détaille Dominique Boussuge. Ces dégradations progressives peuvent endommager le toit des carrières et créer un fontis. Il s’agit d’un effondrement progressif jusqu’à la surface. Voirie, habitations… Le phénomène peut aboutir à l’effondrement pur et simple de ce qui se trouve au-dessus.
Un quartier disparaît en quelques secondes
C’est sur des carrières de craie que se trouvait le quartier de l’hôpital Percy. Est-ce lié à de fortes pluies les jours précédents que le 1ᵉʳ juin 1961, vers 10h30, une secousse vint troubler la quiétude du quartier résidentiel ? Le tremblement de terre secoue les maisons. Au niveau de l’allée de Bellevue et au stade d’Issy-les-Moulineaux, un premier affaissement se produit. Quelques habitations sont éventrées. Une personne décède dans ce premier ébranlement.
À ce moment-là, beaucoup d’habitants de Clamart sont au marché. Trente minutes après, de nouveaux tremblements se produisent au niveau de la rue du Général-Négrier. L’effondrement est d’ampleur. Un entonnoir de six hectares se forme. En quelques secondes, les pavillons tombent entièrement dans les carrières souterraines. Beaucoup d’habitants qui étaient chez eux trouvent la mort. Un jeune père de famille, qui avait pu évacuer sa femme et son fils après la première secousse, était revenu dans sa maison accompagné de deux adolescentes pour récupérer des affaires. Les trois trouveront la mort dans l’effondrement.
De nombreux sinistrés
Au total, ce sont 25 maisons, un immeuble et une usine qui chutent dans les profondeurs. « Tout le quartier est descendu brusquement, juste devant moi. Je vois encore l’usine de mosaïque s’écrouler », se remémore un survivant auprès de nos confrères du Parisien. Très vite, les secours se mettent en place pour retirer les corps et les éventuels survivants engloutis. Dans cette catastrophe d’ampleur, 21 personnes trouvent la mort. Parmi les défunts, des enfants, dont le plus jeune est âgé de trois ans. On compte aussi une quarantaine de blessés.
La circulation est complètement coupée dans le quartier. Des habitants sont évacués de leurs logements, car on craint de nouveaux effondrements. De nombreux sinistrés doivent être pris en charge. Un centre d’hébergement est créé pour les accueillir. Des aides sont octroyées par l’État et président de la République Charles de Gaulle. Le secours vient même de l’étranger, telle la ville de Weiden en Allemagne, jumelée avec Clamart. La localité envoie des secours aux indigents de la commune.
Une enquête est ouverte pour déterminer les causes de cet effondrement qui a pris tout le monde de court. L’Inspection générale des carrières, chargée de surveiller le gruyère souterrain en Île-de-France, rend très vite ses conclusions. C’est une carrière de craie qui s’est effondrée. Les causes seraient liées à plusieurs facteurs, mais les fortes pluies ayant touché la commune peu de temps auparavant auraient causé le fontis. Des confortations des carrières sont mises en place et du béton est injecté dans plusieurs d’entre elles pour éviter un nouvel effondrement.
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