Cinq mois après la chute d’ascenseur, Bruno Solari ressent toujours un vertige. Joint par téléphone dans la torpeur de l’été, il entrecoupe son propos de petits rires nerveux et exprime une colère froide : « On s’est fait escroquer au nom du Conseil régional et personne n’a même daigné nous recevoir. Qu’aux prochaines élections, ils ne viennent pas faire un meeting vers chez nous, sinon ils vont m’entendre », maugréé cet homme élégant, à la voix grinçante et aux faux airs de Stéphane Bern.
On rembobine. Nous sommes à la fin du mois de janvier 2025. Au centre de la modeste salle des fêtes de Mazan, l’ancien viticulteur vauclusien est d’humeur inverse, littéralement euphorique. Président depuis quelques années du très confidentiel concours Mister et Miss Élégance, ancien Mister Gay France, il se croit en plein rêve. Micro en main et accréditation autour du cou, ce chômeur longue durée prend la pose devant un énorme chèque en carton comme ceux popularisés par les jeux télévisés, sur lequel sont inscrits le logo Région Sud et une somme à six chiffres. Un cadeau en période de restriction budgétaire : 175 000 euros. C’est le pimpant Eddie Goujit, vice-président de la Région en charge de la jeunesse, de la culture et du sport, qui est venu en personne lui remettre cette subvention. Alors, Bruno a cru faire « une crise d’apoplexie ». « Je tenais la main de la personne à côté de moi pour ne pas tomber », se rappelle-t-il au téléphone, amer.
Tiré à quatre épingles, Eddie Goujit, fier représentant du président Renaud Muselier, ne s’est pas contenté ce jour-là de jouer au Père Noël. Il s’est également fendu d’un discours exalté, en accrochant la prestigieuse médaille de l’Ordre du Mérite au revers de la veste de Bruno Solari.