Il suffit parfois d’un petit détail de conception pour transformer une innovation en problème majeur. Chez Volkswagen, les boutons tactiles intégrés aux volants de ses modèles récents, perçus à l’origine comme une modernisation bienvenue, se retrouvent aujourd’hui au cœur d’une affaire judiciaire aux États-Unis. Ce qui n’était qu’une plainte récurrente dans les forums et auprès des concessionnaires est désormais devenu un motif de poursuite fédérale.

Deux conducteurs américains de SUV ID.4 ont déclenché une procédure qui pourrait coûter cher à la marque allemande. Ils affirment que ces commandes tactiles sont si sensibles qu’un simple effleurement suffit à activer involontairement des fonctions essentielles comme le régulateur de vitesse adaptatif. Résultat : une perte de contrôle potentiel, une sensation d’insécurité constante, et jusqu’à la peur de prendre le volant.

Volkswagen, qui avait déjà admis que ce choix ergonomique n’était pas le plus heureux, pensait sans doute avoir tourné la page en revenant aux boutons physiques sur ses derniers modèles. Mais la justice américaine, elle, n’a pas encore dit son dernier mot. Le constructeur pourrait bien payer le prix fort pour avoir mis trop de confiance dans une solution technologique mal calibrée.

Vue de profil du Volkswagen ID.4 électrique en finition GTX sur route ouverteLe Volkswagen ID.4 affiche une silhouette de SUV moderne et fluide, avec une ligne de toit légèrement fuyante et un traitement aérodynamique soigné. Son gabarit intermédiaire lui permet de rivaliser avec les SUV familiaux du segment C. © Volkswagen
Quand la technologie dépasse l’usage : le cas controversé des boutons tactiles

Ils devaient symboliser la modernité. Les boutons tactiles ou haptiques, apparus sur les volants des Volkswagen récentes, notamment sur les modèles ID électriques, avaient tout pour séduire sur le papier : design épuré, absence de pièces mécaniques, et intégration harmonieuse avec un habitacle numérique. Mais dans la pratique, l’expérience utilisateur a vite tourné à la désillusion.

De nombreux conducteurs ont signalé des activations involontaires de certaines fonctions. En cause, la sensibilité excessive des surfaces tactiles, qui ne laissent aucune marge d’erreur : poser le doigt sans appuyer suffit à déclencher une commande. Difficile dans ces conditions de garder la concentration sur la route, surtout lorsque le volant devient une source constante de surprises inattendues.

Volkswagen n’est pas seule à avoir tenté l’aventure du tout-tactile, mais elle est la première à en payer le prix fort sur le plan judiciaire. Alors que les retours négatifs se sont multipliés, la marque a fini par reconnaître publiquement son erreur… mais trop tard pour certains clients.

Face avant du Volkswagen ID.4 avec signature lumineuse LED et calandre ferméeÀ l’avant, le style du ID.4 se distingue par une signature lumineuse horizontale et une calandre fermée typique des modèles électriques. Le design favorise à la fois l’efficience et la personnalité visuelle. © Volkswagen
Une plainte inédite contre Volkswagen aux États-Unis

C’est dans le New Jersey qu’a été déposée une plainte collective dirigée contre le groupe allemand. Deux propriétaires de Volkswagen ID.4 ont engagé des poursuites en affirmant qu’ils se sentent « terrifiés et réticents à conduire » leurs véhicules. Selon eux, les commandes tactiles du volant activent automatiquement des systèmes comme le régulateur de vitesse adaptatif, même sans volonté du conducteur.

Cette activation non sollicitée d’une fonction censée assister la conduite peut, dans certaines situations, mettre en danger le conducteur et les autres usagers. Une simple friction involontaire avec le pouce suffit à enclencher une accélération ou un maintien de vitesse, là où une action délibérée serait nécessaire. La plainte évoque un problème de sécurité routière, au-delà du simple désagrément ergonomique.

Dans un pays aussi procédurier que les États-Unis, une telle action en justice, même initiée par deux plaignants, pourrait ouvrir la voie à une série de recours similaires. Et les précédents judiciaires en matière automobile laissent penser que les dommages et intérêts pourraient atteindre des montants significatifs.

Intérieur du Volkswagen ID.4 avec volant capacitif et écran central tactileLe poste de conduite du ID.4 mise sur une ambiance épurée, dominée par deux écrans. Le volant capacitif, ici en cause, présente des surfaces tactiles peu appréciées des conducteurs. © Volkswagen
Des reproches graves : omissions, enrichissement injuste et mépris des clients

Les accusations formulées contre Volkswagen ne se limitent pas à une mauvaise conception. Les plaignants évoquent un « fraude par omission », reprochant à la marque d’avoir continué à commercialiser des modèles défectueux tout en étant consciente du problème. En effet, selon les documents déposés, Volkswagen avait connaissance de ces dysfonctionnements par l’intermédiaire des retours de concessionnaires et de clients.

Or, malgré cette alerte interne, aucune solution satisfaisante n’aurait été proposée. Pas de réparation gratuite, pas de remplacement de pièces, encore moins de remboursement. Ce traitement est perçu comme une violation de plusieurs lois de protection des consommateurs, notamment dans les États du Connecticut et du Massachusetts, où résident les plaignants.

L’affaire repose également sur l’idée d’enrichissement injuste : en vendant un produit entaché d’un défaut connu, sans offrir de correctif, Volkswagen aurait conservé un avantage financier indu, au détriment de la sécurité et de la confiance des acheteurs. Une situation qui, si elle est reconnue par la justice, pourrait ternir encore davantage l’image du constructeur.

Arrière du Volkswagen ID.4 avec feux LED en bande et badge GTXL’arrière du ID.4 reprend les codes visuels de la gamme ID avec une bande lumineuse continue et des lignes douces. La finition GTX ajoute une touche de sportivité discrète. © Volkswagen
Une reconnaissance tardive… et un retour progressif aux boutons physiques

Ironie du sort : alors que la procédure judiciaire se lance, Volkswagen a déjà commencé à corriger le tir. La marque a publiquement reconnu que les boutons tactiles n’étaient pas une réussite. Désormais, ses nouveaux modèles reviennent à des commandes physiques traditionnelles, comme en témoigne le dernier Tiguan. Plus sûrs, plus pratiques, ces boutons permettent une utilisation « à l’aveugle », sans distraire le conducteur.

Mais ce retour au bon sens prendra du temps. La transition vers des volants physiques dépend du calendrier de renouvellement de chaque modèle. Il faudra donc attendre plusieurs années pour que l’ensemble de la gamme Volkswagen soit exempt de ces boutons tactiles controversés.

En attendant, les propriétaires d’anciens modèles doivent composer avec ces commandes mal-aimées. Et l’affaire en cours pourrait accélérer la mise en œuvre de solutions concrètes. Entre innovation mal calibrée et exigence croissante des utilisateurs, cet épisode rappelle que l’ergonomie est loin d’être un détail dans l’expérience automobile moderne.