Le président russe réclame que l’Ukraine lui cède les oblasts de Donetsk et Lougansk de façon à occuper toute la région du Donbass. Mais Volodymyr Zelensky a exclu toute concession territoriale, s’appuyant notamment sur la constitution de son pays.
La paix passera-t-elle par l’abandon de territoires ukrainiens à la Russie? C’est en tout cas ce que continue de réclamer la Russie de Vladimir Poutine, trois jours après son sommet avec Donald Trump et alors que se tient une série de réunions cruciales ce lundi 18 août à Washington, entre le président américain, son homologue ukrainien Volodymyr Zelensky et plusieurs dirigeants européens.
« Ce qui est très important, c’est que toutes les questions sensibles, territoriales (…) soient discutées lors d’une réunion trilatérale », a déclaré le président ukrainien lors d’une réunion autour de Donald Trump et des dirigeants européens.
Selon plusieurs sources à Reuters et l’AFP, Moscou réclamerait un départ des troupes ukrainiennes des zones de l’oblast de Donestk qu’elles contrôlent encore, de sorte à ce que l’armée russe, qui occupe déjà l’oblast de Lougansk, détienne toute la région du Donbass. En contrepartie, la Russie accepterait de geler la ligne de front ailleurs dans le pays.
Un responsable au courant d’échanges téléphoniques, samedi, entre Donald Trump et des dirigeants européens a affirmé à l’AFP que le président américain s’était rangé derrière la proposition russe. Officiellement, le milliardaire républicain défend un « échange de territoires », sans plus de détails. Il réclame en revanche publiquement que l’Ukraine renonce définitivement à la Crimée, occupée depuis 2014 par la Russie.
« C’est contre notre Constitution »
Volodymyr Zelensky, lui, ne l’entend pas de cette oreille. Le président ukrainien martèle qu’il ne retirera pas ses troupes du Donbass et ne fera pas de concessions territoriales, citant notamment la constitution ukrainienne.
« La réponse à la question territoriale ukrainienne se trouve déjà dans la Constitution ukrainienne. Personne ne s’en écartera, et personne ne le pourra. Les Ukrainiens ne céderont pas leurs terres à l’occupant », a-t-il écrit sur X le 9 août dernier.
En avril dernier, alors que le président américain le sommait déjà d’abandonner la Crimée, Volodymyr Zelensky répliquait: « Il n’y a rien à discuter. C’est contre notre Constitution. C’est notre territoire ».
« Le territoire de l’Ukraine est indivisible et inviolable »
Ratifiée en 1996, la loi fondamentale ukrainienne est en effet sans ambiguité sur le sujet. Son article 2 affirme: « la souveraineté de l’Ukraine s’étend sur tout son territoire. L’Ukraine est un État unitaire. Le territoire de l’Ukraine, dans ses frontières actuelles, est indivisible et inviolable ».
Pour céder un territoire à la Russie, il faudrait donc changer la Constitution, un droit qui revient « exclusivement au peuple » selon son article 5. Mais un autre obstacle juridique se dresserait alors. En effet, l’article 157 de la Constitution interdit toute modification du texte qui viserait à « supprimer l’indépendance ou à violer l’indivisibilité territoriale de l’Ukraine ».
Par ailleurs, ce même article 157 ajoute que « la Constitution de l’Ukraine ne peut être modifiée en cas de loi martiale », ce qui est le cas aujourd’hui.
Si la Constitution rend impossible la cession de territoires à l’ennemi, la législation ukrainienne a dû s’adapter à l’invasion de ses territoires par la Russie. En 2014, après l’annexion de la Crimée, le parlement a voté une loi réaffirmant que la péninsule est « partie intégrante » de l’Ukraine et seulement « temporairement occupée ». Le texte a depuis été mis jour à plusieurs reprises. Il juge nuls les différents référendums d’annexion tenus dans les oblasts ukrainiens envahis en 2022 et plus largement, toutes les décisions prises par les autorités occupantes.
Ces barrières juridiques risquent d’agacer Donald Trump, qui s’était déjà dit la semaine dernière « contrarié que (Volodymyr) Zelensky dise ‘je dois avoir une autorisation constitutionnelle' ». Avant leur rencontre ce lundi 18 août à Washington, le chef d’État américain a mis une pression maximale sur son homologue ukrainien, qui a selon lui deux options: « mettre fin à la guerre avec la Russie presque immédiatement » ou « continuer à combattre ».