Par
Lou Batteux
Publié le
18 août 2025 à 17h39
Et si l’on vous disait qu’à deux pas de Rennes, des dizaines de milliers de gambas sont élevées ? Avec 50 tonnes de gambas et 70 tonnes de fruits et légumes produits à l’année, Agriloops, basée à Bréal-sous-Montfort, présente la première ferme aquaponique en milieu salé d’Europe.
Mais c’est quoi, une ferme aquaponique ? En mêlant aquaculture, l’élevage d’espèces aquatiques au sein de bassins hors-sol, et hydroponie, la culture de fruits et légumes hors-sol, cette exploitation bretonne incarne un modèle d’agriculture innovant.
Une start-up née d’une amitié
À la tête de cette jeune start-up : Romain et Jérémie. Les deux amis se sont rencontrés pendant leurs études à l’institut Agro de Rennes.
On se rêvait agriculteurs en se disant qu’on aurait notre ferme commune avec chacun nos ateliers. Romain était spécialisé en aquaculture et moi en production végétale.
Jérémie Cognard
Cofondateur et directeur général d’Agriloops
C’est là qu’ils découvrent l’aquaponie : cette association de leurs deux expertises. En sortant de l’école, ils décident de se lancer et de concrétiser leur idée. Agriloops voit alors le jour en 2016.
En 2019, la start‑up construit sa première ferme pilote et le 15 mai 2025, elle inaugure Mangrove #1, sa première ferme aquaponique à grande échelle, implantée au 720, rue du Pré-Miel à Bréal-sous-Montfort.
Depuis, l’entreprise rassemble une vingtaine de salariés et détient une capacité de production agricole de 100 tonnes par an.
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Des larves aux gambas
Mais qu’est-ce qui se cache derrière les murs de cette grande usine de 2 000 m2? En déambulant entre les grands bassins d’eau salée, Jérémie explique que leurs gambas proviennent de plusieurs écloseries européennes qui créent des post-larves (c’est-à-dire le dernier stade larvaire des crustacés).
Celles-ci se développent ensuite sur leur site près de Rennes, en passant de bassins en bassins. À leur arrivée, les larves ne pèsent que quelques milligrammes. Elles restent quelques jours en quarantaine, dans une salle sous-pression, pour éviter toute contamination de bactéries.
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Ensuite, les jeunes crevettes sont transférées par épuisette dans la nurserie où elles évoluent et grandissent pendant près d’un mois. « Elles sont nourries avec des aliments formulés (fibres végétales et protéines végétales et animales) fabriqués par la coopérative bretonne Le Gouessant », expose Jérémie. Enfin, elles terminent leur croissance dans des bassins de grossissement jusqu’à atteindre leur poids final, soit environ 20 grammes.
Tout un système de filtration permet de garantir un environnement stable et parfaitement adapté à l’élevage de nos gambas. Leur eau est chauffée à 30°C et l’atmosphère dans les salles est à la même température pour éviter l’évaporation. Dans chaque bassin, il y a plusieurs milliers de crevettes.
Jérémie
Cofondateur et directeur général d’Agriloops
Lorsqu’elles atteignent leur taille commerçable, les gambas sont commercialisées localement, auprès de chefs et de poissonniers : au restaurant gastronomique étoilé Le saison ou encore Les Tourelles, le restaurant 5 étoiles situé au Château d’Apigné.
Les crustacés sont également vendus en région parisienne et aux alentours de Saint-Malo, indique Jérémie.
5 000 m2 de serres
Sous neuf serres, occupant un espace de 5 000 m², Jérémie et Romain cultivent aussi des tomates cerises de saison ainsi que des jeunes pousses de betterave, de pak choï, de moutarde de chine émeraude et pourpre, de wasabina (légumes au parfum de wasabi) et de mizuna (appartenant à la famille des choux et de la moutarde), toute l’année. En hiver, les plants de tomates sont remplacés par du chou asiatique.
Sous une des trois grandes serres qui abritent des plants de tomates, Jérémie présente les deux variétés qui y poussent. (© Lou Batteux)
Par la suite, Agriloops a lancé sa propre marque de fruits et légumes, Yodée, à retrouver en grande surface.
Mangrove #1 commercialise déjà ses tomates cerises et son mesclun auprès de certains primeurs et dans les grandes surfaces du secteur rennais et malouin depuis mai 2025, mais elle va seulement vendre ses premières gambas à la rentrée.
Une agriculture « locale, durable et économe »
Si l’entreprise est pionnière dans l’aquaponie, elle cherche également à proposer une agriculture locale, durable et la plus économe possible en ressources.
L’eau salée dans laquelle grandissent les gambas est ensuite utilisée pour irriguer les fruits et légumes. Les effluents des gambas, quant à eux, servent d’engrais naturels pour ces cultures.
C’est un avantage pour les fruits et les légumes, ça permet une meilleure qualité, tant sur le plan gustatif que nutritionnel. Ça leur apporte également plus de sucre et de vitamine C.
Jérémie
Cofondateur et directeur général d’Agriloops
Avec son système de filtrage, la ferme réalise « jusqu’à 95 % d’économie d’eau ».
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