Durant vingt mois, une institutrice de Dübendorf, en Suisse, a touché un salaire qu’elle n’aurait pas dû percevoir. Au total, la ville a versé par erreur environ 36.000 francs suisses (près de 38.000 euros) à cette enseignante qui n’occupait pourtant plus le poste pour lequel elle continuait à être payée. La professeure a refusé de les rembourser, assurant qu’elle avait déjà dépensé la somme et qu’elle ignorait l’erreur. Après plusieurs recours, le Tribunal fédéral a finalement tranché : elle doit restituer l’argent. Mais en cas de trop-perçu en France, que se passe-t-il ? 20 Minutes fait le point pour vous.

Faut-il rendre un salaire versé par erreur ?

Oui. Le Code civil est clair : « Tout paiement suppose une dette ; ce qui a été reçu sans être dû est sujet à restitution » (art. 1302-1). En d’autres termes, le salarié qui a perçu par erreur une somme n’a aucun droit de la conserver, même si la faute vient de l’employeur. « Cette obligation découle du principe selon lequel nul ne peut s’enrichir injustement au détriment d’autrui », explique le cabinet Le Bouard.

Peut-on invoquer la négligence de l’employeur ?

Pas vraiment. Le fait que l’erreur vienne du service de paie ne change rien juridiquement. Selon le principe d’enrichissement sans cause, garder l’argent constituerait un enrichissement injustifié. « En droit, l’erreur n’est jamais créatrice de droits », rappelle le site de l’ADP, une entreprise spécialisée dans les solutions de gestion de la paie et des ressources humaines. La Cour de cassation a confirmé que, sauf cas particulier, l’employeur peut toujours réclamer le remboursement (Cass. soc. 20 octobre 1998, n° 96-41698). En revanche, la Cour de cassation estime que l’employer « ne doit pas contester un versement qu’il a effectué volontairement à l’origine (cass. soc. 20 octobre 1998, n° 96-41698, BC V n° 434) », précise le site de l’ADP.

Quels recours pour l’employeur ?

L’employeur dispose d’un délai de trois ans pour réclamer les sommes indûment versées (art. L.3245-1 du Code du travail). Il peut proposer un remboursement à l’amiable, par exemple via un échéancier. Il peut aussi pratiquer une retenue sur salaire, mais celle-ci ne peut dépasser 10 % du salaire net par mois sans accord écrit du salarié. Si le salarié a quitté l’entreprise, l’employeur devra saisir le Conseil de prud’hommes pour obtenir le remboursement. Passé ce délai de trois ans, les sommes indûment versées ne peuvent plus être récupérées, sauf cas exceptionnels à l’instar d’une fraude avérée.

Que risque le salarié qui refuse de rembourser ?

En cas de refus, le litige se règle en justice. L’employeur a quasiment toujours gain de cause. Le salarié devra donc restituer la somme, y ajoutant souvent les frais de justice inhérents à la procédure.