Bébés tortues à l’horizon? Avec l’entrée dans la période d’émergence, la vigilance est montée d’un cran à Sanary. Dans la nuit du 25 au 26 juin (voir Var-matin du 29 juin) en contrebas de la route de Bandol (RD 559) qui surplombe le littoral en corniche, sur la plage dorée, une tortue caouanne (espèce menacée et protégée) a en effet choisi de déposer des œufs, juste en face de la cuisine du restaurant éponyme.

« C’est la première ponte de tortue marine référencée sur les côtes méditerranéennes françaises de la saison 2025 (1) qui se termine en octobre, rappelle Sidonie Catteau, déléguée générale de l’association Émergence, en charge de la coordination du Réseau tortues marines de Méditerranée Française (RTMMF) dont la compétence s’étend de Menton jusqu’à la frontière espagnole. À Sanary, nous sommes à 52 jours d’incubation, ce qui veut dire que l’on rentre dans la période d’émergence ».

Le doute, jusqu’au bout

C’est pour préparer au mieux l’éclosion des œufs enterrés dans le sable, pour l’instant en phase d’incubation précédent leur émergence, et guider la course des futurs tortillons (bébés tortues) jusqu’à la mer que Sidonnie Catteau avec Bénédicte Choux, également déléguée générale d’Émergence, toutes deux rejointes par plusieurs bénévoles, dont Emma Hermann, chargée de faire remonter les informations, ont tracé et optimisé un chemin d’accès sur la plage, ce lundi 18 août, en fin d’après-midi. « L’émergence arrive entre 45 et 80 jours après la ponte, elle dépend de la température, précise Sidonnie Catteau. Mais pour qu’une naissance se produise, il faut encore qu’un mâle ait fécondé la femelle avant qu’elles ne viennent pondre. Sinon, il ne se passe rien ».

Ouvrir le chemin à la mer

Depuis mardi, donc, des barrières Vauban, recouvertes de tissus noirs, ouvrent maintenant la voie. Une grille anti-prédation a par ailleurs été posée sur le nid, autorisant uniquement le passage des tortillons – de 4cm et 12 grammes en moyenne – qui seront en outre guidés jusqu’à la mer par un chemin plus étroit, matérialisé entre deux planchettes en bois. « Si les tortillons émergent la nuit, ils peuvent être attirés par les lumières artificielles, et prendre la mauvaise direction. C’est pour cela qu’ils seront guidés », détaille Bénédicte Choux.

En outre, un effort sera réalisé pour tenter de réduire cet éclairage perturbant, sur une plage où les opérations de nettoyage par criblage ont également été totalement interrompues. Avec un effort également consenti par le gérant du restaurant La plage dorée, Alexis Remeuve, qui a régulé ses lumières et dont l’organisation de la terrasse extérieure, dorénavant barrée et en partie accessible par la mer, a pour le moins été perturbée.

Si le taux de réussite à l’éclosion estimé à 95% pousse à la confiance, l’arrivée à la mer n’est pas synonyme de fin des épreuves pour les tortillons qui seront confrontés aux prédateurs. Les spécialistes estiment ainsi que « sur les 600 œufs que peut pondre une tortue durant la saison, un seul tortillon parviendra à la maturité sexuelle ». En attendant, tic-tac, tic-tac, le compte à rebours est enclenché. L’émergence peut s’étaler de deux… à dix-sept jours.

1. Sur les côtes varoises, deux autres pontes ont eu lieu à Cavalaire, le 23 juillet et le 4 août.

14 sites de pontes en Méditerranée

Une tortue caouanne pond jusqu’à six fois par saison, de juin à août, entre 80 et 120 œufs par ponte.

L’espérance de vie d’une tortue caouanne est peut-être de 60 à 80 ans.

En 2025, quatorze sites de ponte ont été pour l’heure référencés sur les côtes méditerranéennes françaises. Le même nombre que l’année dernière à fin octobre. Cela veut dire que d’autres pontes, encore non identifiées, viendront gonfler les statistiques.

Le réseau Émergence qui a tiré des enseignements de l’explosion du nombre de pontes – qui ne s’explique pas encore – à partir de 2023 en France, a allégé la surveillance et mise maintenant sur la sensibilisation des usagers des plages, à partir du 15 juin.