« Nous sommes prêts à une rencontre bilatérale avec Poutine« , lui a prestement répondu Volodymyr Zelensky, qui a pris grand soin de ne pas contrarier son hôte durant la totalité de la soirée. Les questions de fond, elles, sont toutes reportées. Le président ukrainien ayant lui-même confirmé lundi que le point hautement délicat des revendications territoriales du Kremlin en Ukraine était « une question que nous laisserons entre moi et Poutine ».
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La Russie a réagi mardi par l’entremise de son ministre des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov. « La Fédération de Russie ne rejette aucun format concernant l’Ukraine : ni bilatéral, ni trilatéral », a déclaré ce dernier lors d’une interview accordée à la chaîne de télévision Rossia-24. Avant d’ajouter que « sans respecter les intérêts de sécurité de la Russie, sans respecter pleinement les droits des Russes et des russophones qui vivent en Ukraine, il ne peut être question d’aucun accord à long terme, car ces causes doivent être éliminées de toute urgence dans le cadre du règlement ». Soit la ligne à laquelle le Kremlin n’a jamais dérogé et par laquelle il justifie le déclenchement de l’invasion de son voisin.
Davantage qu’un aboutissement, tout cela ressemble donc au début d’un long et périlleux parcours pour Kiev et ses alliés européens. D’autant que le chef de la diplomatie russe n’a même pas évoqué le sommet quadrilatéral (Russie, Ukraine, États-Unis et Union européenne) réclamé lundi par Emmanuel Macron, qui se démène depuis plus de trois ans avec les autres dirigeants du continent pour imposer l’Europe à la table des négociations.
La Russie ne s’est jamais résignée à une Ukraine souveraine
Le président français a proposé mardi que la rencontre bilatérale entre dirigeants russe et ukrainien ait lieu en Suisse, en raison de la neutralité du pays. Selon deux sources diplomatiques, Vladimir Poutine avait initialement proposé à Donald Trump que cet échange se tienne… à Moscou. Demande cynique, fort logiquement rejetée par Volodymyr Zelensky. Genève a réagi positivement et annoncé que la Suisse offrirait une « immunité » à Vladimir Poutine, visé par un mandat d’arrêt de la Cour pénale internationale, s’il se rendait sur le territoire helvète dans le cadre d’une « conférence de paix ».
Aucune confiance en Moscou
Sur le plan diplomatique, une porte s’est vraisemblablement entrouverte. Mais les frappes russes incessantes sur les civils ukrainiens, le coup d’accélérateur donné par Moscou sur la ligne de front, et l’intransigeance assumée du Kremlin qui réclame une capitulation pure et simple de l’Ukraine depuis l’invasion à grande échelle de celle-ci en février 2022, rappellent que sur le fond, rien n’est réglé.
Du côté européen, personne ne semble se leurrer. « Aujourd’hui, dans les faits, la Russie continue la guerre, elle l’intensifie. Elle mène une guerre contre les civils ukrainiens, et elle ne donne aucun signal de vouloir sincèrement la paix. L’expérience que nous avons, sur les quinze dernières années, de M. Poutine, dans son approche, c’est que, chaque fois qu’il pense qu’il peut gagner par la guerre, il ne négocie pas la paix », rappelait Emmanuel Macron lundi soir. « J’ai les plus grands doutes quant à la réalité d’une volonté de paix de la part du président russe ». D’où l’importance, a-t-il encore rappelé, de donner à Kiev de réelles garanties de sécurité.
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C’est précisément le travail auquel s’attelle désormais la trentaine membres de la « coalition des volontaires », soutiens de Kiev, dont une réunion s’est tenue ce mardi. Donald Trump s’est montré particulièrement clair sur le sujet : les États-Unis « seront impliqués » dans la sécurité de l’Ukraine, mais il revient « aux pays européens » de fournir ces garanties à l’Ukraine « en coordination avec les États-Unis » qui ont exclu de déployer des troupes américaines au sol. À l’Europe, donc, de prendre ses responsabilités et d’assumer la réussite ou l’échec de ce processus de paix.
Le Kremlin, assure Donald Trump, « est d’accord d’accepter des garanties de sécurité pour l’Ukraine ». Reste à déterminer lesquelles. Le chancelier allemand Friedrich Merz a encore insisté à Washington sur la nécessité de mettre en place un cessez-le-feu avant toute réunion bilatérale, alors que la Maison-Blanche a indiqué ne plus en faire une priorité. L’Ukraine et ses partenaires plaident par ailleurs pour le maintien d’une armée nationale conséquente, en opposition à la demande russe d’une « démilitarisation ».
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Les partenaires européens de Kiev débattent, enfin, depuis des mois de l’envoi de troupes européennes en Ukraine, mais il y a peu de chances que cette modalité se concrétise tant que les États-Unis ne préciseront pas la portée de leur propre engagement, et les fameuses « garanties similaires à celles de l’article 5 de l’Otan » annoncées fin de semaine dernière par Donald Trump.
« Les équipes de planification de la « coalition des volontaires » rencontreront leurs homologues américains dans les prochains jours afin de renforcer davantage les plans visant à fournir des garanties de sécurité solides et à préparer le déploiement d’une force de réassurance si les hostilités prenaient fin » a annoncé mardi le Premier ministre britannique Keir Starmer. « La pression sur la Russie devra se poursuivre aussi longtemps que cette paix n’aura pas été établie », a ajouté Emmanuel Macron.