1 À Moscou, des Russes optimistes
Pour la plupart des Russes rencontrés dans le centre de Moscou, il était temps que les deux dirigeants négocient directement. « Il est évident qu’ils auraient dû se rencontrer dès le début, mais il y avait ceux qui voulaient que ça traîne », estime Viatchelav, 23 ans, tout près du Kremlin.
Pour ce futur fonctionnaire, qui refuse de donner son nom comme la plupart des personnes ayant accepté de répondre, une entrevue Poutine-Zelensky « n’est devenue possible qu’à la suite de changements politiques ou économiques » en Europe, où la position des alliés de Kiev a été affaiblie par la volonté de M. Trump de mettre fin au conflit au plus vite.
Roman, habitant de Moscou originaire de la région de Stavropol dans le sud de la Russie, présage que « le conflit sera vite fini si une telle rencontre a lieu ». Il aurait voulu « que cet événement se tienne bien avant » car « entre-temps tant de jeunes ont trouvé la mort ». « Je veux que tout se termine par la paix, parce qu’on fait partie du même peuple slave », ajoute ce musicien de 39 ans qui estime que le futur sommet doit se dérouler « en Russie, pour des raisons de sécurité ».
« N’importe quel contact » entre présidents russe et ukrainien sera déjà une chose positive, abonde Svetlana Chvedova, agente immobilière de 60 ans rencontrée devant le théâtre du Bolchoï. Ilia Denissov, étudiant de 19 ans, venu à Moscou depuis Saint-Pétersbourg, peine à croire que Vladimir Poutine et Volodymyr Zelensky puissent se rencontrer. « Même s’ils se voient, cela n’aboutira à rien car ils ne se tolèrent pas l’un l’autre », dit-il avec conviction.
Ksenia, commerciale qui a la cinquantaine, souligne de son côté que M. Poutine a répété ne pas considérer M. Zelensky comme « légitime », son mandat présidentiel ayant expiré en 2024 sans possibilité d’organiser d’élections en raison des hostilités. Pour elle, tous les territoires conquis par la Russie devront lui revenir dans tout accord de paix. « Des gens sont morts pour ces terres, elles sont donc à nous », tranche-t-elle.
2 Peu d’espoir de paix pour les Ukrainiens
Vitaliï n’est tendre ni avec Donald Trump – un « incompétent qui change d’avis tous les jours » – ni avec Vladimir Poutine – « un criminel international ». « Il a violé tous les accords qu’il avait signés, on ne peut donc pas lui faire confiance », ajoute le militaire qui se bat dans l’est du pays, faisant référence au mémorandum de Budapest.
Debout dans les rues de Kramatorsk, non loin du front, Sergiï Davydenko, 51 ans assure lui aussi que la prudence est de mise quant à la signature d’un possible traité de paix avec la Russie. « Beaucoup d’accords ont été signés, aucun n’a été respecté », prévient ce civil originaire de Kostiantynivka, à quelques kilomètres de la ligne de front au-dessus de laquelle volent quotidiennement les drones russes.
Dans les rues de Kiev, Anna, qui n’a pas donné son nom de famille, voudrait elle aussi croire à une possible avancée vers la paix après ces discussions. Mais la Russie « nous a bombardés avant, maintenant, et après la rencontre ». Elle ne pense pas que Donald Trump puisse être d’une quelconque aide, car il « coopère également avec la Russie », estime cette femme de ménage de 60 ans.
Ostap Shavel, lutteur et acteur de 32 ans originaire de l’ouest de l’Ukraine, craint lui que la guerre puisse durer « des décennies ». « Même s’il y a une sorte de gel du conflit, tôt ou tard, il reprendra », conclut-il, sombre.
Si Volodar Velykodniy, 21 ans, est lui aussi circonspect quant à un « impact réel » de ces discussions, il y voit quand même du positif concernant les « relations publiques ». « Nous avons simplement rappelé à la société occidentale l’existence de notre pays, le fait que nous sommes en guerre, afin qu’elle ne nous oublie pas. »