Le marché des Lices de Rennes pourrait lui paraître bien fade. Et c’est pourtant tout le contraire… Il a travaillé aux Etats-Unis, en Allemagne, en Angleterre ou encore au Cameroun mais c’est bel et bien sur le marché rennais, un haut lieu du commerce breton, où touristes et habitués viennent faire leurs emplettes, qu’il prend plaisir à exposer chaque week-end depuis plus de vingt ans.

Derrière son étalage de fruits et légumes bio en tout genre, le maraicher bretillien, la cinquantaine, distribue les sourires et les conseils, dès qu’un client s’arrête pour lui acheter ses fruits et ses légumes, ou tout simplement pour lui faire la causette. « C’est une énergie et une émulsion uniques », résume-t-il sobrement.

Louis Collet possède une gigantesque ferme à Boisgervilly.Louis Collet possède une gigantesque ferme à Boisgervilly. (Photo Le Télégramme / Théo Quintard)

À Boisgervilly, commune de 1 800 âmes à 35 minutes de Rennes, Louis Collet mène une vie presque sans temps mort. Dans son exploitation de 15 ha, baptisée « Les Jardins de la Toucanne » et cédé par ses parents en 2001, ce fils d’éleveurs laitiers dédie « trois quarts de [son] temps » au maraîchage. Il s’occupe également de ses dix bovins, Bretonnes Pie Noir.

« Le marché qui me met en route pour la semaine »

Mais chaque fin de semaine, c’est la même rengaine : le vendredi soir, il récolte ses fruits et légumes pour en garder toute la fraîcheur, puis, dès l’aube le samedi, il prend la direction du marché des Lices, prêt à partager le meilleur de sa récolte. « Bizarrement, c’est automatique », concède-t-il. « Je n’ai aucun souci à me réveiller le samedi matin [pour aller aux Lices]. Ça me porte, c’est le marché qui me met en route pour la semaine. »

Dans un quotidien éreintant mais passionnant, le marché rennais rythme aussi sa vie sociale. « Quand l’hiver, je n’y vais pas pendant plus de deux mois, ça me manque », glisse-t-il.

« Les Lices, c’était un monstre »

Les Lices, c’est aussi et surtout ce vieux compagnon de route, indomptable et intraitable, qu’il faut d’abord apprivoiser avant de nouer une amitié sincère et durable. « Ce marché, c’était un monstre », pensait-il, avant de s’y installer. Louis Collet en a fait l’expérience : il a dû patienter de longues années, avant d’obtenir une place fixe, dans le contrebas des marches, juste en face des poissonniers.

« Je me demandais bien ce que j’allais y faire, moi, le petit maraîcher », continue-t-il. Une personne rencontrée sur le marché voisin d’Iffendic, où il exposait également, le convainc toutefois de devenir « passager » aux Lices, en 2004. Dit autrement, les places restantes sont attribuées par tirage au sort une fois que tous les permanents sont installés, sous les coups de 8 h.

Louis Collet a eu 1001 vies, avant d’exposer au marché des Lices.Louis Collet a eu 1001 vies, avant d’exposer au marché des Lices. (Photo Le Télégramme / Jean-François Chesnay)

Très vite, il fidélise sa clientèle avec « des produits que les plus gros maraîchers n’avaient pas », tel que de la ficoïde glaciale, une plante de la famille des Aizoacées, originaire du sud-est africain, ou des vitelottes, des pommes de terre avec une forme irrégulière, bosselée et une peau épaisse.

Quatre ans plus tard, en 2008, le voilà pérennisé. Il arrête donc son activité de jardinier – paysagiste pour se consacrer pleinement au maraîchage, sans aides agricoles.

Aujourd’hui encore, Louis Collet y revient encore et encore « pour la sympathie des gens ». Et à l’écouter, la réciproque est aussi vraie : « Les clients viennent chercher la fraîcheur et la qualité de mes produits ».

Une ferme à taille humaine

Louis Collet raconte, aussi, entre fierté et nostalgie, la bonne ambiance entre les quelque 290 exposants. Il dit, entre autres, « ne pas concevoir la concurrence, surtout entre producteurs » car il estime que « l’offre attire la demande ».

Une demande qu’il sait croissante mais il se refuse à produire davantage pour garder une ferme à taille humaine et diversifiée. Il aimerait d’ailleurs, à terme, que les jardins de la Toucanne deviennent un collectif, où il rêve de voir de jeunes agriculteurs reprendre sa suite.