En conférence de presse, Yannick Bru, manager de l’Union Bordeaux-Bègles, a exprimé ses inquiétudes face au rythme effréné imposé par le rugby professionnel, tant pour les joueurs que pour les entraîneurs.
« Les cadences infernales des matchs, c’est un enjeu majeur de la performance et même du bien-être psychologique », pose d’entrée Yannick Bru. Le manager girondin compare même la situation du rugby à celle d’autres disciplines de haut niveau. « Si on prend l’exemple du PSG, je me demande comment Luis Enrique (entraîneur du club parisien) fait pour se renouveler sur ses briefings d’avant-match. Même si ce n’est pas un sport de combat comme nous, c’est vraiment un sujet majeur, le renouvellement du discours, le rafraîchissement. »
Le technicien va plus loin, évoquant une nécessaire remise en question des pratiques internes. Il estime qu’il est temps de mettre en place un système de rotation, même au sein du staff technique. « On va vraiment mettre en place des choses pour aérer le staff régulièrement. Il faut qu’on accepte que personne n’est indispensable », déclare-t-il. Et Bru n’hésite pas à prendre des exemples concrets au sein même de son entourage sportif. « On peut se passer pendant une semaine de Kiki (Christophe, N.D.L.R) Laussucq, vu tout ce qu’il a mis en place jusqu’à maintenant. C’est la même chose pour Noël McNamara, Shaun Sowerby… et même pour Yannick Bru, puisque tout le monde le connaît par cœur. »
Les joueurs disent : J’ai eu des week-ends de repos, on a gagné sans nous
Cette démarche vise à préserver l’énergie et la créativité de chacun, tout en maintenant le niveau d’exigence de l’UBB. « La machine de l’UBB doit continuer à tourner tout en rafraîchissant les uns les autres. Et ceux qui s’en vont par moments doivent mettre à profit ces semaines-là pour innover, réfléchir et faire partager leur nouveau savoir après. » Avec une pointe d’humour, Bru pointe même un risque : « Très honnêtement, je ne voudrais pas être attaqué en justice pour du harcèlement psychologique. Avec les cadences du rugby, ça pourrait ne pas tarder, je pense. »
Concernant les joueurs, l’accent est mis sur la gestion plus fine des temps de jeu et, surtout, des pauses mentales. Il observe que ses joueurs ont terminé la saison dans un bien meilleur état que la précédente. « Ils ont fini l’année plus frais, plus disponibles et plus heureux. Ils ont moins subi la saison. » Et cela, malgré des statistiques de jeu similaires. Ce qui a changé, c’est la possibilité de prendre de vraies coupures. « Les mecs te disent : « Oui, j’ai joué autant, mais j’ai eu des week-ends de repos et on a gagné sans nous. J’ai pu partir un week-end avec ma fiancée, avec ma chérie. »
Dissocier physique et psychologique
Pour Bru, il est essentiel de distinguer gestion physique et récupération psychologique. « Il faut faire la différence entre la coupure psychologique, où un joueur n’est pas au club pendant 4-5 jours, il est en vacances, plutôt que la gestion stricte du temps de jeu. »
Enfin, l’actuel tacticien champion d’Europe veut continuer à évoluer. « On ne pourra pas continuer à faire jouer 30 matchs à Maxime Lucu », d’autant plus qu’il est devenu un candidat crédible au numéro 9 en équipe de France. « Notre problématique, c’est qu’il faut ajouter les matchs de l’UBB à ceux de l’équipe nationale. »