Par

Antoine Grotteria

Publié le

18 avr. 2025 à 7h30

« Allez, quatre minutes ! On s’arrache ». Les yeux rivés sur sa montre, Julien encourage son équipe. Un cri de douleur émane de la bouche d’un participant qui écrase les pédales d’un vélo d’appartement. Dans le couloir menant à la salle de la société R2 Training, au 6 rue Daunou, dans le 2e arrondissement de Paris, les bobines de deux hommes ressemblent à de petites flammes rougeoyantes.
Les corps ruissellent de gouttes de sueur. Ces témoignages d’une intensité maximale offrent un aperçu grandiloquent de la violence produite. Comme un désir mêlé à un besoin. L’Hyrox, qui représente une marque déposée, constituerait presque une dialectique de la souffrance. Et cela plaît fortement aux forçats de ce sport en vogue qu’actu Paris a pu rencontrer ce mercredi 16 avril 2025.

Une discipline très exigeante

Dans le complexe situé près de l’Opéra-Garnier, il s’agit de l’ultime préparation pour certains à un événement inédit. Du vendredi 18 au dimanche 20 avril 2025, plusieurs milliers de pratiquants de ce sport mêlant endurance et force débarqueront sous la verrière du Grand Palais. Seuls, en binôme, en quatuor, les participants découvriront le monument du 8e arrondissement, rénové dans le cadre des Jeux olympiques.

À 27 ans, Eva en fera partie. « C’est un lieu prestigieux. On va s’éclater », se réjouit auprès d’actu Paris cette Parisienne, encore marquée par l’effort après une heure de séance. Ce week-end, cette discipline inventée par deux Allemands franchira une nouvelle étape dans son développement en France. Une illustration de son succès auprès d’un public plutôt urbain et aux revenus élevés. Explications.

« C’est assez accessible, contrairement au CrossFit, où il faut faire des mouvements techniques. Et ça demande beaucoup de mental »

Eva, 27 ans
Une Parisienne pratiquante de l’Hyrox depuis six mois

En observant les mouvements de ces acolytes, difficile d’infirmer ses propos. Pendant une heure, les athlètes enchaînent plusieurs exercices. Jeté d’un ballon de 4 à 6 kilos répété, port de sacs sur plusieurs mètres, rameurs, courses à pied… Le rythme se révèle élevé. Dans ce cadre, la gestion de son effort s’avère capitale.

Quinze mètres de parcours sur une moquette, alors que la distance en compétition est de 50 mètres.
Quinze mètres de parcours sur une moquette, alors que la distance en compétition est de 50 mètres. (©AG/ actu Paris)La pratique explose

« Cela ressemble à du fitness en plus dur. On n’a pas vraiment le temps de s’arrêter. Mais c’est grisant. On finit la séance complètement vidée », relate Cyril, 33 ans. Originaire de la région parisienne, ce sportif à la silhouette sculptée s’est pris de passion pour l’Hyrox en 2024. À tel point qu’il a voyagé à Turin, en Italie, pour participer à une compétition.

Pour les salles de sport, cette forte croissance de nombre de pratiquants – de 3 500 en 2023 à 10 000 en 2024 à Paris -, représente une aubaine. « Il y a bien sûr un effet de mode, avec des influenceurs très présents. Mais ça colle à une société où les gens ont besoin de se dépasser », explique Julien, entraîneur à R2 Training, une entreprise spécialisée dans le CrossFit, l’Hyrox et le Cross Training, qui possède aussi un complexe près de la place de la Bastille.

Chaque jour, plusieurs créneaux sont pris d’assaut, de 7 heures à 20 heures. Et le soufflet ne retombe pas. « Le midi, on a des personnes qui travaillent dans le quartier qui viennent se dépenser durant une heure. Chacun s’adapte à son activité. Mais si on s’éclate le midi, on sera difficilement productifs », affirme le coach.

Au bord de la piste centrale, sur laquelle progressent lentement les sportifs, l’un d’eux montre déjà des signes de fatigue. « J’en ai fait une fois. C’est crevant. Il ne faut pas que je me crame d’entrée, surtout pas devant les caméras », nous fait-il remarquer malicieusement. D’autres, plus aguerris, semblent maîtriser le début du parcours.

Ces ballons de 4 à 6 kilos sont à jeter sur une cible placée à plusieurs mètres du sol.
Ces ballons de 4 à 6 kilos sont à jeter sur une cible placée à plusieurs mètres du sol. (©AG/ actu Paris)« Plus de 200 euros par mois… »

Parmi ces derniers, quatre sportives. La séance à laquelle actu Paris à assister est représentative de l’attrait exercé par l’Hyrox auprès des femmes. Pour l’entraîneur, plusieurs facteurs entrent en jeu.

« Contrairement au CrossFit, il y a moins cette peur d’avoir un corps ‘d’homme’, un stéréotype qui agit encore. De plus, cela peut se pratiquer à plusieurs. C’est moins individualisé que d’autres disciplines. La solidarité et l’entraide leur plaisent davantage. Enfin, il y a une catégorie ouverte à tout le monde en compétition »

Julien, 42 ans
Entraîneur chez R2 Training

Si l’Hyrox peut se vanter d’avoir pratiquement autant d’athlètes masculins que féminins, son assiette sociologique est très restreinte. « On paie plus de 200 par mois pour un abonnement. C’est très cher », explique Eva, qui reconnaît un manque de diversité. « On a beaucoup d’avocats, de financiers, et de gens avec des salaires très confortables. Mais la politique du prix va peut-être évoluer avec le temps », explique Julien.

Avec plusieurs acteurs privés se partageant le gâteau, l’Hyrox est soumis à une concurrence croissante mais limitée. Machinalement, les coûts peuvent difficilement baisser. De leur côté, les secteurs associatif et public restent éloignés. Une situation qui devrait se maintenir dans les prochaines années.

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