Aux 400 coups, leur librairie, ouverte depuis le 3 mai dernier rue Maréchal Joffre à Bordeaux, Philippe Poutou et Béatrice Walylo apprennent encore le métier. Et découvrent les rouages de la rentrée littéraire : « On se fait inviter à des rencontres par des éditeurs qui arrivent avec des poches remplies de bouquins… » Sans grande surprise, l’ancien candidat du Nouveau Parti Anticapitaliste et sa compagne n’entendent pas se plier à cette « logique productiviste ». D’autant que leurs rayons présentent aussi une bonne partie d’essais, qui ne suivent pas le même calendrier.
Au début, ils ont pourtant bien essayé de vendre quelques romans à succès, comme on le leur avait conseillé. Mais « La Femme de ménage » comme les seuls trois exemplaires des « Vieux Fourneaux », « ça ne part pas, confesse Béatrice Walylo. Idem pour la dernière sortie de Vanessa Schneider, qu’il fallait avoir absolument. Inutile d’essayer de faire la concurrence à Mollat ou à La Machine à Lire ».
Une rentrée militante
Le duo a donc décidé de s’en tenir à son créneau « woke » – assumé, comme le terme – y compris durant la rentrée littéraire. « On ne fait pas l’impasse sur le dernier roman de Sorj Chalandon, qu’on aime beaucoup, ni sur ‘‘L’Application des peines’’ de Didier Castino qui tourne autour de la prison. » D’abord parce que ce genre de romans correspond à l’ambiance militante de la librairie, ensuite parce que cela donne une bonne raison pour inviter les auteurs à Bordeaux.
Pour autant, la rentrée littéraire charrie son lot de rencontres qui permettent de découvrir petits éditeurs et libraires indépendants. Et c’est ainsi que la librairie renfloue son stock : « On avait choisi nos premiers livres sur nos connaissances. Maintenant, on s’appuie sur notre réseau », sourit Philippe Poutou. À rebours de la plupart des librairies qui font le gros de leur chiffre d’affaires avec la rentrée, il faut avouer que les deux militants peuvent aussi surfer sur une certaine notoriété pour assurer leurs arrières.