Vous souvenez-vous d’Habiba al-Askari ? Cette petite fille originaire de Gaza, âgée de trois ans, et qui était dans un état critique en janvier à cause d’une maladie rare, avait ému la planète suite à un reportage de CNN diffusé le 17 janvier. Notamment parce qu’elle attendait une évacuation qu’Israël se refusait à donner. Elle a depuis été évacuée en Jordanie. 20 Minutes s’est entretenu avec sa mère, Rana, pour prendre de ses nouvelles.
« Habiba est en bonne santé et presque stable depuis qu’elle a été soignée en Jordanie. Elle est toujours à l’hôpital. Elle passe la plupart de son temps à jouer avec ses petits jouets dans la chambre d’hôpital et avec son frère, Suhaib. Elle a des soins quotidiens », explique Rana al-Askari à 20 Minutes.
« Une tentative délibérée de tuer cette enfant »
Habiba souffre d’une maladie rare, un déficit en protéine C, qui a entraîné au début de l’année en janvier une coagulation sanguine dans ses bras et ses jambes. Quand il a compris la situation, le Dr Mohamed Kuziez, un pédiatre américain originaire du Colorado qui a effectué une mission à Gaza et y a soigné Habiba, a compris que la fillette ne survivrait pas sans une évacuation.
Des organisations humanitaires internationales ont alors demandé que la fillette soit exfiltrée, sans y parvenir pendant près de trois semaines, en raison des atermoiements des autorités israéliennes. « Pour quiconque possède des connaissances médicales, cela ressemble à une tentative délibérée de tuer cette enfant. Il n’y a pas d’autre façon de décrire cela », avait estimé à l’époque le Dr Mohamed Kuziez, interrogé par CNN.
« Son cœur s’est arrêté à deux reprises »
Habiba a finalement été évacuée le 3 février en ambulance puis par un hélicoptère jordanien et admise en soins à l’hôpital pour enfants Reine Rania Al Abdullah. Mais trop tard pour ses bras et l’une de ses jambes, dévorés par la gangrène, qui ont dû être amputés.
« Son état était critique et son cœur s’est arrêté à deux reprises. Sa survie est un miracle », commente sa mère, qui regrette cependant les revirements d’Israël : « Ses membres auraient pu être sauvés si elle avait quitté Gaza plus tôt pour se faire soigner à l’étranger ».
« Maman, quand mes membres repousseront-ils comme ceux des autres enfants ? » demande aujourd’hui Habiba à sa mère, selon cette dernière. « Je reste silencieuse, incapable de lui répondre. Comme tout enfant, Habiba rêvait de jouer et de courir, mais aujourd’hui, elle en est incapable. Cependant, elle a la volonté de vivre, et c’est ce qui la rend suffisamment forte pour affronter sa nouvelle vie avec courage », nous raconte Rana al-Askari.
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J’accepteLa France n’a accueilli que 27 personnes
Près de 15.000 personnes à Gaza sont en attente d’une évacuation médicale d’urgence, selon l’OMS. Et selon Médecins sans frontières, près d’un tiers sont des enfants. Ces organisations internationales exhortent l’ensemble des pays qui le peuvent à accueillir plus de patients et patientes. Mais depuis octobre 2023, les 53 pays de la zone Europe de l’OMS en ont accueilli moins de 1.000. L’Italie est l’un des pays les plus accueillants, et a procédé selon ses dires à près de 14 évacuations médicales depuis janvier 2024, dont une opération mi-août portant sur 31 enfants et 114 personnes au total incluant leurs familles. La France n’a accueilli que 27 personnes. Joint par 20 Minutes pour étayer ces chiffres, le ministère des Affaires étrangères n’avait toujours rien répondu au moment de la publication de cet article.
L’OMS a indiqué en juillet qu’au rythme actuel, il faudrait des années pour évacuer tous les patients ayant besoin d’un traitement ne pouvant être fourni à Gaza. Et ce, dans un contexte où certains pays ont restreint l’accueil de réfugiés gazaouis. La diplomatie américaine a annoncé samedi qu’elle suspendait ses visas médicaux, après les posts d’une influenceuse complotiste d’extrême droite. La France a gelé ses évacuations début août après les propos antisémites d’une étudiante gazaouie accueillie par Sciences Po. Et d’après nos informations, ne les a toujours pas reprises.
« Nos enfants méritent aussi de vivre »
« Nous sommes victimes de cette guerre, nous n’en sommes pas responsables, ni de près ni de loin. Ma fille a perdu ses trois membres simplement parce qu’elle est originaire de la bande de Gaza. Nous souhaitons simplement vivre en sécurité avec nos enfants et nos familles », s’insurge la mère d’Habiba, qui espère que la France accueillera sa fille après la fin de son traitement en Jordanie.
« Mon message à la France et à son grand peuple, qui ont soutenu la Palestine dans toutes les instances et à toutes les positions, est que nos enfants méritent aussi de vivre comme tous les autres enfants du monde. Nous espérons que la France interviendra pour mettre fin au bain de sang de cette guerre dévastatrice », interpelle Rana al-Askari.
La guerre de représailles menée par Israël a fait 62.064 morts à Gaza, majoritairement des civils, selon les données du ministère de la Santé du Hamas, jugées fiables par l’ONU. L’attaque du 7-Octobre a quant à elle entraîné la mort de 1.219 personnes, en majorité des civils, selon un décompte de l’AFP réalisé à partir de données officielles.