Plus rare, et surtout plus chère : l’offre d’habitat étudiant à Strasbourg fait entrer l’agglomération dans la catégorie de celles où le logement des jeunes en formation supérieure constitue un sujet de tension. Une diversité de réponses y est apportée. Présentée le 20 août à l’aube de la rentrée, elle porte l’objectif prioritaire de solutions « accessibles et à prix abordables », ainsi rappelé par Suzanne Brolly, vice-présidente de l’Eurométropole de Strasbourg (EMS) à la politique de l’habitat.
Du studio pour étudiants, il y en a, certes. Mais le parc privé classique qui concentre localement 80% de l’occupation a durci ses conditions d’accès et relevé ses prix. Les résidences dédiées ne couvrent qu’un sixième des besoins : elles représentent 11 600 places selon l’Observatoire territorial du logement étudiant de l’agence d’urbanisme locale Adeus (1) face à un total de 68 488 étudiants strasbourgeois (pour l’année scolaire 2023-24). Et en leur sein, quelque 30% des capacités proviennent des résidences privées générant les mêmes problèmes de coûts. Le cumul mensuel du loyer et des charges y dépasse en général 600€, avec des pointes recensées à 800€.
La barre est très élevée, voire trop, pour la part d’étudiants issus de milieux « modestes », qui est jugée « importante » par l’observation. Le document classe dans cette catégorie les 24% de boursiers de l’Université qui accueille 55 000 jeunes au total et une bonne partie des 20% d’étudiants internationaux à Strasbourg (contre 13% en moyenne nationale) car ceux-ci « sont proportionnellement beaucoup plus concernés par la précarité », relate Mathilde Huault, chargée d’études à l’Adeus.
Développer le conventionné
La réponse collective vise ainsi à développer l’offre de résidences « conventionnées », dont le coût mensuel pour son occupant est mesuré pour la plupart des cas entre 400 et un peu plus de 500€.
Le plan de développement du Centre régional des œuvres universitaires et scolaires (Crous) Strasbourg va dans ce sens. Il repose sur la création d’une nouvelle résidence de 500 chambres tout près du campus de centre-ville, sur la place d’Islande. Alors qu’il est contesté par des riverains au nom de la préservation de la végétation existante, Suzanne Brolly a confirmé le soutien de l’EMS, y compris financier, à ce projet mené par le Crous en marché global de performance. Les trois groupements en lice dans le dialogue compétitif doivent être départagés au premier trimestre 2026 en vue d’une livraison fin 2028.
Les restructurations lourdes des dernières années ont également permis d’augmenter à la marge les capacités, comme les 60 places supplémentaires à la cité Paul-Appell (sur le total de 1 400) depuis 2023.
Le gisement des anciens bureaux
La marge de progression se niche dans le parc locatif social qui ne représente que 2% des occupations. La mutation des bureaux en habitat étudiant forme une piste pour laquelle la métropole se positionne en particulier. Elle concentre ainsi quatre des exemples parmi la trentaine en France déployés à cette fin en ce moment par la Foncière de Transformation Immobilière (FTI) d’Action Logement via des baux à construction d’une cinquantaine d’années avec les Entreprises sociales pour l’habitat (ESH) du groupe.
Ainsi, l’ancienne chambre régionale des comptes en centre-ville de Strasbourg devient en cette rentrée une résidence étudiante de 57 studios en association avec Domial, également partenaire de la création de fin 2026 de 64 autres places dans un ancien site Orange. C’est également dans un immeuble de l’opérateur de télécommunications que Néolia installera 22 petits appartements d’ici un an.
Et 73 offres supplémentaires pour étudiants doivent venir, en 2028, de l’ancienne direction régionale des finances publiques, ainsi restructurée « plutôt que démolie-reconstruite », pointe Katelle Le Guillou, directrice générale de FTI. La foncière en porte le projet (17,5M€) avec ICF Habitat Nord-Est.
La conception de l’agence DRLW Architectes comprend notamment le percement d’ouvertures de sorte à transformer le « socle massif aveugle » qui abritait des locaux techniques en chambres, ainsi qu’une surélévation en structure bois. La résidence comptera au total 148 logements pour l’accueil aussi de jeunes actifs, selon le constat de l’EMS d’une « porosité » croissante entre les deux publics avec le développement de l’alternance et la recherche d’un premier logement lors de l’entrée sur le marché du travail.
Une certaine massification devra toutefois s’instaurer pour donner un corps significatif à l’objectif de rééquilibrage entre résidences privées et sociales. Et le changement d’usage de locaux économiques doit rester réaliste, c’est-à-dire « concentré sur les emplacements pertinents : on ne vas pas envoyer les étudiants s’héberger dans des zones d’activités », rappelle Suzanne Brolly.